l’oecuménisme comme erreur ecclésiologique

Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai lu, où j’ai entendu l’expression : l’Eglise indivise. A chaque fois, pour la personne qui l’emploie, il s’agit de citer l’époque, jusque 1054, où l’Eglise n’était pas divisée entre l’Orient et l’Occident, entre le Catholicisme romain et l’Orthodoxie. Avant, tous étaient orthodoxes, tous étaient catholiques (ce qui signifie universel, concernant l’universel). Et à cette période particulière, à cet âge d’or de la communion des patriarcats, succède donc une période, la période actuelle, presqu’aussi longue, de division. Concernant cette division, on voit émerger ici ou là, diverses théories : la théorie des deux poumons de l’Eglise est la parfaite illustration de mon propos. Si nombre de théologiens ou prêtres se pensent autorisés à parler ouvertement « d’Eglise indivise », personne n’évoque ouvertement le concept d’Eglise divisée, car il est ecclésiologiquement difficilement défendable, même par les plus grandes acrobaties rhétoriques. Mais qu’on y prête bien attention : si l’Eglise a connu une période indivise, alors elle connaît obligatoirement une période divisée. Car si l’indivisibilité cessa en 1054, que pouvons considérer comme ayant succédé à l’indivision première, sinon la division seconde ?

Ainsi, je voudrais attirer l’attention des chrétiens orthodoxes. Si nous acquiessons sur le concept d’Eglise indivise comme étant la marque de l’histoire du premier millénaire de l’Eglise, alors, nous acquiessons automatiquement sur le concept d’Eglise divisée, comme étant la marque de l’histoire du second millénaire de l’Eglise. Or, il n’y a pas d’Eglise indivise, car il ne saurait y avoir d’Eglise divisée. L’un est « consubstantiel » de l’autre. Quelle est donc la nature de la division de 1054 pour considérer ainsi, que cette division est particulière au point de permettre la multiplication de l’Eglise en deux Eglises ? Il s’agit de la rupture de communion (encore valide aujourd’hui) et d’une série d’anathèmes (sortes de malédictions ecclésiales levées par le Pape Paul VI et le patriarche de Constantinople Athenagoras I). Cette rupture de communion est le symbole du trop grand écart de concepts entre l’Orient et l’Occident. L’Occident, en la personne du patriarche de Rome avait modifié unilatéralement de Credo de Nicée-Constantinople pour y ajouter la fameuse mention « filioque », modifiant l’enseignement chrétien traditionnel sur la Sainte-Trinité, et avait amené une vision déformée de la primauté, également non traditionnelle, et contraire au fonctionnement synodal de l’Eglise durant tout un millénaire. En 1054, l’histoire prend acte du trop grand écart entre l’orient orthodoxe synodal et l’occident filioquiste pyramidal. Il n’est plus possible de se reconnaître mutuellement dans l’Eglise fondée par le Christ.

L’Eglise étant le Corps mystique du Christ, peut-on considérer que se produisit à ce moment très particulier, quelque chose qui ne s’était jamais produit auparavant dans toutes les questions doctrinales ? Lorsqu’Arius avait amené son enseignement impie dans l’Eglise, ses partisans constituaient-ils un poumon arien dans une Eglise à deux poumons ? non. Lorsque Nestorius, patriarche de Constantinople, avait enseigné que Marie n’était pas la Mère de Dieu, avons-nous considéré une Eglise bicéphale ? pas davantage. Et de même pour les monophysites, les monothélites, les iconoclastes, etc. Pourquoi donc devrions-nous considérer que la séparation de 1054 est différente des précédentes ? J’aimerai qu’on me réponde sur cette problématique. La mention d’Eglise indivise est la marque d’un œcuménisme qui ne dit pas son nom. Mais ce n’est pas rendre service à nos frères romains que de leur faire croire qu’ils sont encore dans l’Eglise. Ils sont tombés dans le schisme, et plus le temps passe, plus les hérésies s’accumulent. L’Eglise n’est pas indivise. L’Eglise a quatre attributs, qui sont connus par tous ceux qui connaissent leur Credo : elle est une, sainte catholique, et apostolique. Cela signifie bien qu’elle n’est pas double, qu’elle n’erre pas, qu’elle concerne tout le monde, et qu’elle est bâtie sur l’enseignement des apôtres.

Une vision ethnique détestable, que j’ai maintes fois rencontré, considère que l’orient est réservé aux orthodoxes, et l’occident aux catholiques romains. Quelle horreur… considérer que toute une civilisation est condamnée à vivre dans le schisme et l’hérésie à cause de son lieu de naissance et de son éducation. Pourquoi ? Les occidentaux doivent-ils se résigner à vivre dans un Christianisme qui renie la tradition des saints Pères ? bien sûr que non ! le destin du catholicisme romain est de revenir à l’Orthodoxie ou bien de disparaître. Il offre au monde une caricature de ce qu’est le Christianisme. Le destin du monde entier est de s’inscrire dans la seule véritable ekklesia du Christ. L’uniatisme et l’œcuménisme sont des tentatives non orthodoxes de conversion. Il ne doit pas y avoir, de notre côté, d’équivoque, avec des expressions qui entretiennent les ambiguités. Les Pères de l’Eglise ne faisaient pas de soirées de l’unité des chrétiens avec les ariens, les nestoriens, les monophysites, etc. Nous ne devons pas non plus participer à ces parodies d’amour chrétien. Cessons de parler d’Eglise indivise. Si tout le monde tombait dans l’hérésie, et qu’une seule personne gardait la doctrine intacte, il serait l’Eglise à lui tout seul. Il ne serait pas indivis.