Etude canonique du concile pan-orthodoxe de 2016 en Crète : chapitre 1 : religion et violence
Etude canonique du concile pan-orthodoxe de 2016 en Crète
17. Aujourd’hui, nous vivons une recrudescence de la violence au nom de Dieu. Les exacerbations fondamentalistes au sein des religions risquent de faire valoir l’idée que le fondamentalisme appartient à l’essence du phénomène religieux. La vérité est que, en tant que « zèle que la connaissance n’éclaire pas » (Rm 10, 2), le fondamentalisme constitue une manifestation mortifère de religiosité. La véritable foi chrétienne, calquée sur la Croix du Seigneur, se sacrifie sans sacrifier ; c’est pourquoi elle est le juge le plus inexorable du fondamentalisme, quelle qu’en soit l’origine. Le dialogue interreligieux franc contribue au développement d’une confiance mutuelle dans la promotion de la paix et de la réconciliation. L’Église lutte pour rendre plus tangible sur terre la « paix d’en-haut ». La véritable paix n’est pas obtenue par la force des armes, mais uniquement par l’amour qui « ne cherche pas son intérêt » (I Co 13, 5). Le baume de la foi doit servir à panser et à guérir les plaies anciennes d’autrui et non pas à raviver de nouveaux foyers de haine.
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Commentaire/Analyse
le Concile passe très vite (mais est-ce lieu pour développer plus avant ?) sur les liens entre religion et violence, en affirmant un peu rapidement : la vraie religion n’est pas violence. Il ne faudrait pas croire que le fondamentalisme appartienne à l’essence du phénomène religieux. Et c’est aller un peu vite en besogne que de dire simplement qu’il n’y a pas de lien. Si l’on se positionne en tant que sociologue et que l’on voit que deux phénomènes sont toujours corrélés, il faut bien considérer qu’ils sont liés d’une façon ou d’une autre. La question plus juste à poser finalement serait : qu’est-ce qui fait que la religion devient violente ? En ce cas il convient de voir dans deux catégories : les fausses religions et la vraie. Et force est de constater, que la véracité de l’Orthodoxie ne l’a pas non plus prémunie contre les manifestations de violence.
L’Orthodoxie a beau regarder la Croix et comprendre la notion de sacrifice, elle n’en pas pour autant immunisée contre ceux qui vont pouvoir tomber dans la violence. Deux choses à répondre à ceux qui tracent rapidement ce trait reliant religion et violence. La première chose est que la religion est au final un remède contre la violence. Je mets l’islam à part car il est difficile de différencier ce qui relève de la violence religieuse intrinsèque de la construction politique. Une personne qui instrumentalise la religion pour en déduire le « droit » de recourir à la violence est quelqu’un sur qui ce remède n’a finalement pas réussi. Même le Bouddhisme qui jouit de cette aura de religion pacifique et pacifiste a connu dans son histoire des instrumentalisations politiques conduisant à la violence. Ainsi le point des utilisations politiques du religieux sont-elles à mettre au débit des religions ? Seconde chose à bien comprendre : la religion parle de la violence pour affronter directement la problématique. Ainsi, on trouvera dans le corpus biblique des textes d’une grande violence. Le recours à la violence en utilisant ces textes est au final un défaut d’herméneutique. Ce n’est pas le texte qu’il faut craindre, mais le lecteur. La religion est quelque chose qui demande du discernement, de la subtilité. J’ai montré (et je montre encore) dans mes posts sur la franc-maçonnerie ce que donne un texte lu par un idiot. Mais au moins cet indigent de l’herméneutique n’était pas violent. Il était simplement bête. Il convient donc d’accepter, du point de vue religieux, que la violence est belle et bien présente, et que sa gestion demande finalement une herméneutique bien plus évoluée que le simple « Jésus était non violent ». On pourra toujours trouver les contre arguments du côté violent : l’épisode des marchands du Temple, certains passages dans l’AT, etc. La violence fait partie des textes. C’est quelque chose que chaque religion, et l’Orthodoxie n’en est pas exempte, doit regarder en face. Ce sera un signe de maturité de l’islam de regarder ce point si important dans cette phase particulière de son essor.