Etude canonique du concile pan-orthodoxe de 2016 en Crète

VI. L’Église face à la globalisation, la violence en tant que phénomène extrême point 19 : l’Église face aux migrations

19. L’imprévisible crise contemporaine des réfugiés et des immigrés pour des raisons économiques, politiques et climatiques s’aggrave continuellement et occupe le centre de l’intérêt mondial. L’Église orthodoxe n’a cessé de considérer ceux qui sont chassés, qui sont en danger et dans le besoin, conformément aux paroles du Seigneur : « Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger et vous m’avez recueilli ; nu, et vous m’avez vêtu ; malade, et vous m’avez visité ; en prison, et vous êtes venus à moi » (Mt 25, 35-36) et « en vérité, je vous le déclare chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits, qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait ! » (Mt 25, 40). Au cours de son histoire, l’Église s’est toujours trouvée aux côtés de « tous ceux qui peinent sous le poids du fardeau » (cf. Mt 11, 28). De tout temps, la philanthropie de l’Église ne se limite pas simplement à un acte de charité occasionnel envers l’indigent et le souffrant, mais elle cherche à éliminer les causes génératrices des problèmes sociaux. Le « ministère accompli » par l’Église (Ep 4, 12) est reconnu de tous. Nous lançons donc un appel – avant tout à tous ceux qui sont en mesure d’éradiquer les causes générant la crise des réfugiés – à prendre des décisions adéquates dans ce sens. Nous appelons les autorités politiques, les fidèles orthodoxes et les citoyens des pays d’accueil, vers lesquels les réfugiés ont afflué et continuent d’affluer, de leur procurer toute aide possible dans la mesure de leurs moyens.


Commentaire/Analyse




La vie spirituelle s’accompagne toujours de discernement. Celui-ci est la marque de celle-là. Et il est une tentation, bien naturelle dans un cadre chrétien, c’est de faire de l’Église une version « religieuse » des restaurants du cœur de Coluche. Mais l’Église est toute autre chose. C’est le Corps mystique du Christ, là où se réalise la divine eucharistie. On voit dans le livre des Actes et dans les épîtres, que des collectes étaient organisées pour les pauvres. Il y avait donc une activité « restaurant du cœur » indéniable, au moins dans le financement, mais qui restait somme toute périphérique par rapport à la mission, à la prière et aux activités spécifiquement spirituelles. Et le discernement va se nourrir de cette vie spirituelle. Et comme le concile nous y invite, le discernement doit également s’effectuer sur les causes génératrice de problèmes sociaux. Il faut essayer de comprendre ce qu’il se passe actuellement.

La première des choses, est de ne pas se retrouver piégé à cause des mots utilisés. Le terme de migrant s’est substitué à celui d’immigré. Si « immigrer » faisait référence à une démarche volontaire de la part de l’immigré, le terme « migrant » désigne presque un phénomène naturel, comme si la personne subissait sans même le vouloir un déplacement. Or, chaque migrant réalise un acte volontaire, selon les circonstances de son existence. Et le concile de préciser, très subtilement, que les migrants le sont d’abord pour des raisons économiques. Elles ne sont ensuite que politiques puis climatiques. Elles ne concernent que très minoritairement des familles entières qui fuient des zones de guerre et des persécutions. Elles concernent principalement des hommes jeunes, en âge de se battre, et qui cherchent des conditions d’existence plus favorables. Et c’est là qu’il faut faire attention à ne pas réécrire les Paroles du Christ. Il n’a pas dit : « j’étais opportuniste et tu m’as accueilli. J’étais lâche et tu m’as invité ». Pourquoi opportuniste ? Parce qu’il y a un opportunisme à considérer que l’on ne peut pas participer au développement économique de son propre pays, mais que l’on va aller illégalement (puisque c’est ce dont il s’agit ici) dans un autre pays, y tricher pour gagner un peu de confort. Il ne s’agit en rien d’une immigration légale, comme quelqu’un qui voudrait donner à sa carrière une touche internationale, mais bien de personnes qui ne respectent pas les lois que se sont données ceux dont il espère profiter du niveau de vie. Pourquoi lâche ? parce qu’une fois encore, si l’on observe qui sont ces migrants, ce sont des hommes. Ils fuient les zones de guerre. En un sens, on peut les comprendre. Mais si les russes avaient choisis de devenir migrants devant les nazis, ou les français dans la même situation ? Non. Ils se sont battus pour libérer leur territoire. Il y a dans ces migrants et dans la faiblesse coupable liée à leur accueil inconditionnel, une cécité face au concept biblique de nation. On ne fuit pas devant Daesh. On combat Daesh. C’est le rôle d’un homme. Il y a une telle inversion de valeurs, que dans certaines zones concernées, les hommes sont partis mais les femmes se battent (ainsi que l’ont montré certains reportages édifiants). Que sont ces hommes qui fuient et laissent les femmes se battre ? Des lâches, ni plus ni moins. A-t-on envie d’accueillir en France des pleutres et des couards de cette espèce ? Ceci n’a rien à voir avec les russes blancs fuyant le bolchevisme. Ceci n’a rien à voir avec les scènes d’exode du début de la seconde guerre mondiale. A la vraie détresse d’alors, s’est substitué une invasion de poltrons égoïstes et arrivistes qu’il convient de repousser avec la plus grande clairvoyance.



Il convient ici, de poser un diagnostic sur les causes profondes de ce qui se produit. Certains pays, pour des raisons très différentes correspondant à leurs intérêts géostratégiques essaient des déstabiliser totalement la Syrie. Ces pays sont l’Arabie Saoudite, le Qatar et Israël. Les USA, la Grande-Bretagne et malheureusement la France sont partie prenante dans ce processus. Lutter contre ceci commence déjà par le comprendre. Avant que ces pays ne fassent de l’Irak et de la Libye des foyers d’instabilité chroniques, ces pays étaient politiquement stables. Ce sont maintenant des zones de migration, de passage de migration et des zones d’instabilité liées au terrorisme islamique. Le processus se poursuit également en Syrie, au mépris du bon sens élémentaire. Le seul pays qui agit avec intelligence (et en plus en respect du droit international) c’est la Russie. C’est une fierté que ce pays soit orthodoxe de tradition. Il eut été plus judicieux que le concile fasse un appel du genre « nous invitons chaque chrétien orthodoxe à soutenir l’effort de paix et de stabilisation entrepris courageusement par la Russie dans cet effroyable conflit. Nous appelons également chacun au discernement à ne pas confondre la charité élémentaire d’avec la complicité concernant l’immigration illégale. Car comme le dit notre hiérarque Saint Basile de Césarée, il convient de lutter contre les invasions étrangères  “Préserve, Seigneur, cette ville, toute ville et tout village de la famine, de la destruction, des tremblements de terre, des inondations, de l’incendie, du glaive, de l’invasion étrangère et de la guerre civile”. Mais peut-être le fait que ce concile ait été financé par de l’argent américain rend-il illusoire le fait d’avoir ce genre de déclaration… On pourra se consoler en se disant que la rédaction du texte essaie de montrer de façon assez subtile que nul n’était dupe, mais que la marge de manœuvre rédactionnelle était limitée.

La responsabilité première du chrétien orthodoxe sera donc d’agir pour la paix, et de prier en ce sens. Sa prière consistera donc à souhaiter que les USA, la France et le Royaume-Uni changent de politique étrangère et se tournent vers la paix que mérite cette région. Il est tout de même poignant de se dire que c’est sur le chemin de Damas que le Christ a choisi son plus grand apôtre…