L’homme moderne veut une validation scientifique, technologique, physique, mathématique, technique, pour donner du crédit à un récit à caractère historique. La Bible n’est pas la seule à souffrir de ce biais. N’importe quel texte est soumis à cette injonction. En un sens, on dira que cela est mieux ainsi. Cela permet de ne pas être abusé par un texte mensonger. Prenons l’exode des hébreux, leur fuite depuis l’Égypte jusque leur arrivée en terre de Canaan. Le récit biblique mêle merveilleusement une dimension historique et une dimension spirituelle. Un historien ancien aurait pu dire que l’exode des hébreux est un fait historique, mais que l’intervention divine et les faits miraculeux sont davantage liés à la foi. Nombreux sont ceux qui ont essayé de chercher une cause naturelle aux plaies d’Égypte, aux miracles, pour un faire un événement à la probabilité statistique vertigineuse, mais qui reste dans le domaine naturel. Exit Dieu. Les hébreux sont partis, mais sans Dieu. Ils ont juste eu beaucoup beaucoup de chance. Mais ils sont partis. Ensuite, la sécularisation rationaliste a encore avancé. Elle a exigé une preuve même de l’exode. Les hébreux ont passé 40 ans dans le désert il y a 3000 ans, nous voulons au moins voir un squelette, une trace, quelque chose. Le fait que l’archéologie n’arrive pas à valider un événement devient pour l’homme moderne synonyme du fait que l’événement n’a pas eu lieu. Cette évolution est assez incroyable quand on y pense.

L’œuvre d’Homère n’a pas échappé à cette rationalisation extrémiste. S’il est difficile de prouver quoi que ce soit sur l’odyssée d’Ulysse, l’Iliade racontant le siège de la ville de Troie, l’homme moderne avait décrété : tant que nous n’avons pas trouvé de vestiges de la ville de Troie, des preuves de ce siège qui dura plus de dix ans, nous ne pourrons y croire. Pendant longtemps, la guerre de Troie avait donc été rangé dans la catégorie des fictions géniales, des légendes fondatrices, mais en aucun cas ne pouvait faire partie de la catégorie sérieuse, universitaire, académiquement étiquetée : histoire. Les chercheurs ont donc pu s’en donner à cœur joie sur les concepts de chronologie d’interpolation, de mythologie comparée, projection mythologique. Puis vint Heinrich Schliemann. Ce personnage atypique est fascinant à plusieurs titres. Il est officiellement le découvreur du site archéologique de Troie. Il est donc celui qui a amené Troie de la légende à la réalité, de la mythologie à l’histoire. Autodidacte, éloigné des cercles académiques principaux, il est un peu une sorte d’étendard, le héraut des tenants des théories alternatives. Il envoie ce message à tous : n’écoutez pas les soi-disant experts, ils se donnent leurs diplômes entre eux, et poursuivez vos intuitions. Elles valent tous les doctorats.

Malheureusement, Schliemann devrait nous renvoyer une tout autre réalité. Celle de la vacuité totale de l’archéologie. Schliemann nous fait comprendre que l’archéologie est une vaste arnaque. Il a tout simplement réalisé un hold-up génial sur cette science après en avoir compris les mécanismes. Non pas que Troie n’ait pas existé. L’archéologie est juste une « science » impossible. On ne peut pas dater un objet. On ne peut pas dater un vestige. En tout cas scientifiquement. Je vous renvoie à la méthode scientifique, et vous comprendrez aisément que celle-ci est absolument inapplicable à tout ce qui met en place une interaction avec du temps long. En effet, je ne peux pas placer un objet dans le sol, laisser passer 5000 ans, puis vérifier que la datation fonctionne correctement, et ceci plusieurs fois de suite, de façon répétée, afin de valider une quelconque méthode de datation. Donc tout ceci n’est pas scientifique. Que font les archéologues : ils découvrent des choses et extrapolent en fonction de leur univers mental, ou bien ils créent des faux et les font passer pour vrais, en extrapolant toujours sur leur univers mental. C’est ce qu’a fait Schliemann. Il a mis ses « collègues » archéologues devant le fait accompli : « j’ai fait comme vous ; si vous ne me validez pas, vous invalidez toutes vos tromperies antérieures ».

Qu’est-ce qui me permet d’affirmer que Schliemann a tout bidonné ? Parce qu’il a été accusé de cela par les archéologues officiels de l’époque. Parce qu’il avait la fortune personnelle pour réaliser les faux à cette ampleur. Parce que le temps des fouilles correspond bien au temps nécessaire à réaliser les faux artefacts. Parce que c’est la solution de loin la plus simple. Parce que l’archéologie est avec le cinéma la plus grande industrie de production de faux. Parce que le temps recouvre tout, efface tout, d’une façon qui fait que seuls les récits traditionnels peuvent nous raconter quelque chose. Alors que peut-on savoir sur la guerre de Troie ? C’est l’un des deux récits qui avec toute la pensée philosophique a façonné la culture grecque et son miracle. L’Iliade fait partie de la préparation au baptême de l’hellénisme. Et c’est cela qu’il nous faut surtout regarder.