Les esséniens et l’histoire judéo-chrétienne

original anglais

The Coast of the Asphaltites, The Essenes. En-gedi

"On the western shore" (of the Asphaltites) "dwell the Essenes; whom persons, guilty of any crimes, fly from on every side. A nation it is that lives alone, and of all other nations in the whole world, most to be admired; they are without any woman; all lust banished, &c. Below these, was the town Engadda, the next to Jerusalem for fruitfulness, and groves of palm-trees, now another burying-place. From thence stands Massada, a castle in a rock, and this castle not far from the Asphaltites."

Solinus, Pliny's shadow, speaks the like things: "The Essenes possess the inner parts of Judea, which look to the west. The town Engadda lay beneath the Essenes; but it is now destroyed: but its glory for the famous groves, that are there, doth still endure: and in regard of its most lofty woods of palms, it hath received no disparagement either by age or war. The castle Massada is the bounds of Judea."

We are looking for the places, not the men: -- we might otherwise begin the history of the Essenes from those words, Judges 1:16: "And the sons of the Kenite, Moses' father-in-law, went out of the city of palms, with the sons of Judah, into the deserts of Judah." From these we suppose came the Rechabites, -- and from their stock, or example, the Essenes. Which if it be true, we make this an argument of the ill placing of En-gedi in the maps, being set too much towards the north, when it ought to have been placed towards the utmost southern coasts.

If the Essenes were the same with the Kenites in seat and place, and the Kenites dwelt beyond Arad southward, or indeed even with Arad, which is asserted in the text alleged, -- and if below these were En-gedi, which is also asserted by the authors cited, -- certainly, then, the maps have laid it a long way distant from its own proper place, too much northward. View them, and think of these things. To which we also add this: --

The southern borders of the land, Ezekiel 47:19 (the very same which are mentioned Numbers 34 and Joshua 15:2), are thus declared; "The southern coast southward from Tamar to the waters of Meribah in Cadesh," &c. But now Tamar and En-gedi are the same, 2 Chronicles 20:2. Nor have we any reason why we should seek another Tamar elsewhere. Certainly, the Chaldee paraphrast, and Rabbi Sol. Jarchi, and Kimchi following him, have rendered Tamar, in Ezekiel, Jericho. But upon what reason? For how, I beseech you, was it possible, that Jericho should be the bounds of the south land, when it was the utmost bounds of Judea northward? It was this, without all doubt, drove them to that version of the word, because Jericho is called the City of Palms, -- and Tamar תָמָר signifies a palm; since En-gedi would not give place to Jericho, one inch in regard of the glory of palm-groves.

Whether Tadmor, 1 Kings 9:18, be the same with this our Tamar, -- and whether Tadmor in the Talmudists be the same with that Tadmor, -- we leave to the reader to consider. We produce these few things concerning it, which are related by them -- for the sake of such consideration: --

"They receive proselytes from those of Cardya and Tadmor. Rab. Abhu, in the name of R. Jochanan, saith, The tradition asserts, that the proselytes of Tadmor are fit to enter into the congregation." It was said a little before; "Haggai the prophet taught these three lessons: -- צרת הבת The rival of a daughter" (of a priest) "may be married by a priest. The Moabites and Ammonites ought to tithe the poor's tithe the seventh year. And the proselytes of Tadmor are fit to enter into the congregation."

This story is recited, in the Jerusalem Misna: מרים תדמורית "Mary, of Tadmor, having part of the blood sprinkled upon her" (whereby she was to be purified), "heard in that very juncture of time, that her daughter was dead," &c. But the Babylonian calls her תדמורית "of Tarmod." -- "From the place Tarmud," saith the Gloss. -- The 'Tarmudeans,' תרמודאי are said, by those of the Babylonian Talmud, to be certain poor people, who got themselves a livelihood by gathering up wood, and selling it.

R. Jochanan said, "Blessed is he, who shall see the destruction of Tadmor: for she communicated in the destruction of the first and second Temple. In the destruction of the first, she brought eighty thousand archers: and so she did, in the destruction of the second."

traduction

La côte des Asphaltites, les Esséniens, En-Gedi

« sur la rive occidentale » (des asphaltites) « résident les esséniens ; vers qui, les coupables de n’importe quels crimes, accourent de tout côté. C’est une nation qui vit seule, et de toutes les autres nations du monde, la plus admirée ; Ils sont sans femmes ; toute convoitise est bannie, etc ; Sous eux, était la ville d’Engadda, proche de Jérusalem pour la fécondité, et des plantations de palmiers, devenues aujourd’hui un lieu de sépulture. Dès lors se tient Massada, un château dans un rocher, un château non loin des asphaltites. »

Solinus, l’ombre de Pline, dit la même chose : « les esséniens possèdent les parties intérieures de la Judée, qui regardent vers l’ouest. La ville Engadda se trouve sous les esséniens ; mais elle est à présent détruite : mais sa gloire par les fameuses plantations, qui sont là, se poursuit néanmoins : et en regard de son plus noble bois de palmier, il n’a jamais été dénigré ni par l’âge ni par la guerre. Le château de Massada est la limite de la Judée ».

Nous regardons les lieux, et non les hommes : -- nous pourrions par ailleurs débuter l’histoire des esséniens de ces mots, Jug 1:16 : « et les fils du Kénien, le beau père de Moïse, sortit de la cité des palmiers, avec les fils de Juda, dans les déserts de Juda ». Nous supposons que d’eux vinrent les Rechabites, -- et de leur descendance, ou exemple, les esséniens. Si ceci est vrai, nous en faisons un argument pour placer l’hospice de En-Gedi sur les cartes, placé trop au nord, alors qu’il aurait du être placé davantage vers les rivages au sud.

Si les esséniens étaient les mêmes que les Kéniens en lieu et place, et les Kéniens résidaient au-delà d’Arad vers le sud, ou à Arad même, ce qui est affirmé dans le texte présumé, -- et si sous ceux-ci était En-Gedi, ce qui est attesté par les auteurs cités, -- certainement, alors, les cartes l’ont indiqué très loin par rapport à son propre emplacement, trop au nord. Regardez les, et pensez à ces choses. De ceci nous ajoutons également : --

Les frontières sud du pays, Ezekiel 47:19 (exactement celles qui sont mentionnées en Nb 34 et Jo 15:2), et ainsi déclarées ; « le rivage sud à partir de Tamar jusqu’aux eaux de Méribah dans Kadesh » etc. Mais maintenant Tamar et En-Gedi sont le même, 2 Chr 20:2. Nous n’avons aucune raison de chercher Tamar à un autre endroit. Certainement, les chaldéens paraphrasent, et Rabbi Sol. Jarchi, et Kimchi le suivit, ont rendu Tamar, dans Ezekiel, Jericho. Mais pour quelles raisons ? De quelle façon, je vous implore, était-il possible, que Jéricho soit dans les limites du sud du pays, alors qu’il est dans la partie la plus au nord du pays ? Cela était, sans aucun doute, due à la version du mot, parce que Jéricho est appelée cité des palmiers, -- et Tamar תָמָר signifie un palmier ; A partir de ceci, En-Gedi ne laisse pas sa place à Jericho, pas même un pouce vis-à-vis de la gloire des plantations de palmiers.

Peu importe Tadmor, 1 Ro 9:18, serait le même que notre Tamar, -- et peu importe le Tadmor des talmudistes serait le même que ce Tadmor, -- nous laissons la décision au lecteur. Nous produisons ces quelques arguments le concernant, qui y sont reliés – pour notre considération : --

« ils reçoivent des prosélytes de ceux de Cardya et Tadmor. Rab Abhu, au nom de Rab Jochanan, a dit, la Tradition rapporte, que les prosélytes de Tadmor sont faits pour entrer dans la congrégation. » Il a été dit un peu auparavant ; « Haggai le prophète a enseigné ces trois leçons  צרת הבת : la rivale de la fille » (d’un prêtre) « peut épouser un prêtre. Les Moabites et Ammonites doivent la dime du pauvre dans la septième année. Et les prosélytes de Tadmor sont faits pour entrer dans la congrégation ».

Cette histoire est racontée dans la Mishna de Jérusalem : מרים תדמורית « Marie, de Tadmor, ayant été aspergée par une partie du sang » (par lequel elle devait être purifiée), « entendit dans cet instant très précis, que sa fille était morte » etc. Mais celle de Babylone l’appelle תדמורית «  de Tarmod ». – “de Tarmud” dit la Glose. – Le Talmud de Babylone déclare, תרמודאי les ‘Tarmudéens’, être certains pauvres, qui allaient chercher un moyen de subsistance en réunissant du bois et en le vendant.

R. Jachanan disait, « Béni soit-il, qui verra la destruction de Tadmor : car elle communiqua dans la destruction du premier et second Temple. Dans la destruction du premier, elle apporta huit milles archers : elle fit de même dans la destruction du second. »




Commentaire/Analyse

Au delà des interrogations géographiques que pose Lightfoot (avec véhémence parfois), il évoque les esséniens. Pour ceux qui s’intéressent aux recherches bibliques, théologiques, les esséniens sont un phénomène d’importance depuis la découverte des fameux manuscrits de la mer morte. Il est intéressant de voir que Lightfoot ne cherche pas de proximité intellectuelle ou spirituelle entre esséniens et chrétiens. Il évoque les esséniens comme un peuple parmi d’autres peuples. On notera aussi avec intérêt que les esséniens sont rapportés en tant que nation, alors que la vision moderne est de les voir comme une secte juive, qui ajouta à l’époque du Christ une tonalité particulière parmi les pharisiens, les sadducéens, etc.

Déjà chez les historiens cités par Lightfoot, leur ascèse semblait légendaire et leur spiritualité fascinait. Mais qui étaient les esséniens ? Les manuscrits de la mer morte nous ont renseigné et on peut tracer au final le portrait suivant : il s’agit d’une secte apocalyptique juive, qui s’était retirée au désert et attendait la fin des temps dans une vie très ascétique. Nombreux sont ceux qui ont cherché à faire des esséniens les proto-chrétiens, et de Jésus un grand maître essénien. Deux soucis majeurs par rapport à ces dérisoires tentatives de saper les fondations du Christianisme. Premièrement, les textes des gens ne témoignent pas de comment vivaient les gens. Quelqu’un peut très bien écrire un document magnifiant l’ascèse, tout en étant un grand dépravé. Il y a un donc un raccourci méthodologique à conclure des façons de vivre relativement à un texte. Deuxièmement, les textes témoignent d’une problématique qui pousse les gens à se réunir ainsi, qui regarde très directement l’histoire de l’Église. Et cette problématique en elle-même sert à témoigner de façon irréductible que Jésus n’était pas un essénien, et que les premiers disciples n’étaient pas esséniens. Il s’agit des vétéro-calendaristes.

Les vétéro-calendaristes sont des chrétiens qui sont sortis de l’Église via un schisme, au moment d’une réforme de calendrier. Ils considèrent la réforme inutile, toxique même pour la vie liturgique, l’intrusion du monde profane dans le monde liturgique et spirituel qui doit être préservé. En effet les réformes liturgiques sont souvent faites pour gommer des éloignements trop importants entre le temps liturgique et le temps de la vie courante. Ces phénomènes se sont produits plusieurs fois et donnent lieu à des « églises » parallèles à l’Église. J’utilise le mot église ici avec des pincettes, car il n’y a pas plusieurs églises du Christ, mais bien une seule. Mais comment savoir s’il s’agit de l’Église orthodoxe, ou bien des vieux-calendaristes ? Il en existe en Russie, en Roumanie, avec la même théologie, la même liturgie, des évêques, des prêtres, des paroisses, etc. Tout est semblable, à l’exception du calendrier. Et bien les esséniens sont des veux-calendaristes juifs. Les sadducéens ont fait une réforme liturgique que les esséniens n’ont pas supporté. Ils ont fait un schisme, sont partis au désert et ont attendu la fin du monde, devant autant de corruption et de laisser-aller. On voit donc que les réflexes psychologiques sont les mêmes. Les vieux-calendaristes sont toujours dans une sorte de surenchère. Mais c’est le Christ qui va servir de boussole au final. Le Christ a-t-il renié le Temple ? le Christ a-t-il attaqué les sadducéens sur cette problématique ? Il a prêché au Temple, et a attaqué les sadducéens durement, mais jamais sur ce point. C’était leur lecture des Écritures et leur aveuglement sur la résurrection des morts à la fin des temps qui posait problème au Christ. Il n’a jamais dit mot de leur réforme liturgique, et a suivi ce nouveau calendrier.

Ceci suffit à tirer les conclusions sur les mouvements des vieux-calendaristes. Ce sont des mouvements dont la théologie n’est pas sérieuse au final. Ils font de la forme extérieure de la liturgie un absolu. Mais comme le disait le Saint Apôtre Paul : la lettre tue et l’Esprit vivifie. Prions le Seigneur que l’orgueil et le manque de connaissance à l’origine de ces schismes se résorbe ; il y a des gens bien dans ces « églises », et nous avons besoin d’eux.