Spinoza (court traité analyse du chapitre 2 point 1) : le problème de l'infini et de la limite
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La grande différence de Spinoza avec la théologie orthodoxe est bien évidemment sa vision de Dieu. Il base sa réflexion sur quatre axiomes. Avant d'étudier ces axiomes, nous noterons que Spinoza est dogmatique à sa façon. De la même façon que le chrétien base toute sa réflexion sur les bases issues de la révélation et de l'enseignement du Christ, Spinoza base toute sa réflexion sur certains axiomes. Dogmatique est un terme qui est vu aujourd'hui négativement, mais les bases, quelles qu'elles soient, sont indispensables à la réflexion. Il ne saurait y avoir de pensée sans postulat. Les dogmes de l'Église ne sont ni plus ni moins que les bases sur lesquelles tout bâtir. Au contraire des limitations qu'on y voit souvent, les saints dogmes sont les garanties d'une réflexion plus élevée. Car les postulats de Spinoza sont issus de son intellect, aussi brillant soit-il. Ils ne permettent donc pas de parvenir aux mêmes conclusions.
Premier postulat : aucune substance n'est finie. Même une substance créée ne peut être finie, car une substance ne pourrait avoir choisi de s'auto-limiter et Dieu qui est infiniment bon ne saurait avoir limité la substance en question. Il y a ici une méconnaissance de la façon dont la bonté divine se manifeste. La limitation est ainsi connue de la tradition juive avec un des Noms de Dieu : El Shaddaï (אל שׁדי) qui signifie celui qui pose une limitation (littéralement, et d'après le TB Hag 12A : qui dit à son monde : assez !). Spinoza en tant que talmudiste connaissait très probablement ce Nom divin. Il est donné par Dieu à Moïse en Ex 6:2-3 : וַיְדַבֵּ֥ר אֱלֹהִ֖ים אֶל־מֹשֶׁ֑ה וַיֹּ֥אמֶר אֵלָ֖יו אֲנִ֥י יְהוָֽה (Elohim parla à Moïse, Il lui dit : Je YHVH) וָאֵרָ֗א אֶל־אַבְרָהָ֛ם אֶל־יִצְחָ֥ק וְאֶֽל־יַעֲקֹ֖ב בְּאֵ֣ל שַׁדָּ֑י וּשְׁמִ֣י יְהוָ֔ה לֹ֥א נוֹדַ֖עְתִּי לָהֶֽם (Je suis apparu à Avraham, à Yits'haq et à Ya'aqov, en El Shaddaï, et mon Nom YHVH je ne me suis pas fait connaître à eux.) Le biblique postule donc, que Dieu donne l'être à des substances limitées, sans que ce soit en contradiction avec Sa bonté.
Second postulat : les substances ne peuvent être égales. La christologie le démontre, même si bien évidemment, Spinoza parvient à le démontrer en partant de son premier postulat.
Troisième postulat : une substance ne peut produire une autre substance. Je n'ai pas de commentaire à faire sinon une éventuelle question facétieuse à poser aux darwiniens…
Quatrième postulat : «L'intellect divin ne contient aucune substance qui n'existe formellement dans la nature ». Ceci revient à dire que tout est Dieu. Au-delà de l'erreur manifeste de son assertion, Spinoza a ici une intuition qui rejoint un des développements les plus importants de la théologie orthodoxe : les énergies divines incréées. Cette conceptualisation dont on doit la formalisation finale à Saint Grégoire Palamas, postule que toute la création est soutenue en permanence par les énergies divines, qui sont à Dieu ce que les rayons du soleil sont au soleil. Ainsi, là où Spinoza imagine un panthéïsme en fusionnant nature divine et manifestation divine, la théologie orthodoxe répond par une différenciation stricte mais qui rejoint cette ivresse mystique panthéiste : Dieu, le tout autre absolu, est en même temps toujours présent au travers de sa lumière que le saint qui s'élève à un niveau prophétique peut contempler ou relayer.
Différence entre création et engendrement : dans une note d'explication à sa vision panthéiste, Spinoza aborde un point essentiel à la compréhension de la théologie trinitaire. Il écrit « une chose ne peut avoir de nature avant d'exister. Mais, direz-vous, on peut bien voir ce qui appartient à la nature d'une chose : Oui, quant à ce qui concerne l'existence, mais non quant à ce qui concerne l'essence. Et ici il y a une différence entre créer et engendrer. Créer, c'est poser une chose à la fois par l’existence et par l’essence ; engendrer c'est seulement faire qu'une chose naisse, quant à l'existence ; c'est pourquoi aujourd'hui, dans la nature, il n y a que génération, et non création. Si Dieu crée, il crée la nature de la chose avec la chose même. ». On voit ici que Spinoza reprend une terminologie typiquement chrétienne (issu du credo de Nicée-Constantinople) puisque le Fils est éternellement engendré (τὸν ἐκ τοῦ Πατρὸς γεννηθέντα). Ce terme philosophique garantit la parfaite égalité de nature (ὁμοούσιον τῷ Πατρί). Le christianisme postule ceci lors du Credo en postulant le Fils unique engendré du Père et de même nature. Point intéressant où la théologie chrétienne va plus loin : l'Esprit Saint est de même nature, mais il n'est pas engendré. Il procède du Père : τὸ ἐκ τοῦ Πατρὸς ἐκπορευόμενον.
La grande différence de Spinoza avec la théologie orthodoxe est bien évidemment sa vision de Dieu. Il base sa réflexion sur quatre axiomes. Avant d'étudier ces axiomes, nous noterons que Spinoza est dogmatique à sa façon. De la même façon que le chrétien base toute sa réflexion sur les bases issues de la révélation et de l'enseignement du Christ, Spinoza base toute sa réflexion sur certains axiomes. Dogmatique est un terme qui est vu aujourd'hui négativement, mais les bases, quelles qu'elles soient, sont indispensables à la réflexion. Il ne saurait y avoir de pensée sans postulat. Les dogmes de l'Église ne sont ni plus ni moins que les bases sur lesquelles tout bâtir. Au contraire des limitations qu'on y voit souvent, les saints dogmes sont les garanties d'une réflexion plus élevée. Car les postulats de Spinoza sont issus de son intellect, aussi brillant soit-il. Ils ne permettent donc pas de parvenir aux mêmes conclusions.
Premier postulat : aucune substance n'est finie. Même une substance créée ne peut être finie, car une substance ne pourrait avoir choisi de s'auto-limiter et Dieu qui est infiniment bon ne saurait avoir limité la substance en question. Il y a ici une méconnaissance de la façon dont la bonté divine se manifeste. La limitation est ainsi connue de la tradition juive avec un des Noms de Dieu : El Shaddaï (אל שׁדי) qui signifie celui qui pose une limitation (littéralement, et d'après le TB Hag 12A : qui dit à son monde : assez !). Spinoza en tant que talmudiste connaissait très probablement ce Nom divin. Il est donné par Dieu à Moïse en Ex 6:2-3 : וַיְדַבֵּ֥ר אֱלֹהִ֖ים אֶל־מֹשֶׁ֑ה וַיֹּ֥אמֶר אֵלָ֖יו אֲנִ֥י יְהוָֽה (Elohim parla à Moïse, Il lui dit : Je YHVH) וָאֵרָ֗א אֶל־אַבְרָהָ֛ם אֶל־יִצְחָ֥ק וְאֶֽל־יַעֲקֹ֖ב בְּאֵ֣ל שַׁדָּ֑י וּשְׁמִ֣י יְהוָ֔ה לֹ֥א נוֹדַ֖עְתִּי לָהֶֽם (Je suis apparu à Avraham, à Yits'haq et à Ya'aqov, en El Shaddaï, et mon Nom YHVH je ne me suis pas fait connaître à eux.) Le biblique postule donc, que Dieu donne l'être à des substances limitées, sans que ce soit en contradiction avec Sa bonté.
Second postulat : les substances ne peuvent être égales. La christologie le démontre, même si bien évidemment, Spinoza parvient à le démontrer en partant de son premier postulat.
Troisième postulat : une substance ne peut produire une autre substance. Je n'ai pas de commentaire à faire sinon une éventuelle question facétieuse à poser aux darwiniens…
Quatrième postulat : «L'intellect divin ne contient aucune substance qui n'existe formellement dans la nature ». Ceci revient à dire que tout est Dieu. Au-delà de l'erreur manifeste de son assertion, Spinoza a ici une intuition qui rejoint un des développements les plus importants de la théologie orthodoxe : les énergies divines incréées. Cette conceptualisation dont on doit la formalisation finale à Saint Grégoire Palamas, postule que toute la création est soutenue en permanence par les énergies divines, qui sont à Dieu ce que les rayons du soleil sont au soleil. Ainsi, là où Spinoza imagine un panthéïsme en fusionnant nature divine et manifestation divine, la théologie orthodoxe répond par une différenciation stricte mais qui rejoint cette ivresse mystique panthéiste : Dieu, le tout autre absolu, est en même temps toujours présent au travers de sa lumière que le saint qui s'élève à un niveau prophétique peut contempler ou relayer.
Différence entre création et engendrement : dans une note d'explication à sa vision panthéiste, Spinoza aborde un point essentiel à la compréhension de la théologie trinitaire. Il écrit « une chose ne peut avoir de nature avant d'exister. Mais, direz-vous, on peut bien voir ce qui appartient à la nature d'une chose : Oui, quant à ce qui concerne l'existence, mais non quant à ce qui concerne l'essence. Et ici il y a une différence entre créer et engendrer. Créer, c'est poser une chose à la fois par l’existence et par l’essence ; engendrer c'est seulement faire qu'une chose naisse, quant à l'existence ; c'est pourquoi aujourd'hui, dans la nature, il n y a que génération, et non création. Si Dieu crée, il crée la nature de la chose avec la chose même. ». On voit ici que Spinoza reprend une terminologie typiquement chrétienne (issu du credo de Nicée-Constantinople) puisque le Fils est éternellement engendré (τὸν ἐκ τοῦ Πατρὸς γεννηθέντα). Ce terme philosophique garantit la parfaite égalité de nature (ὁμοούσιον τῷ Πατρί). Le christianisme postule ceci lors du Credo en postulant le Fils unique engendré du Père et de même nature. Point intéressant où la théologie chrétienne va plus loin : l'Esprit Saint est de même nature, mais il n'est pas engendré. Il procède du Père : τὸ ἐκ τοῦ Πατρὸς ἐκπορευόμενον.