La logique de l’athéisme

L’athéisme peut être flamboyant comme celui de Nietzsche, ou plutôt bien défendu aujourd’hui avec Sam Harris, Christopher Hitchens, Michel Onfray ou encore Richard Dawkins, mais il faut bien reconnaître que la plupart du temps il est lié à la médiocrité intellectuelle. Celle-ci, pour être parfaitement honnête, est d’ailleurs le miroir de la médiocrité intellectuelle de certains croyants, qui semblent s’accorder à rendre la religion détestable à ceux qui l’observent au travers d’eux. La médiocrité intellectuelle est toujours nichée dans une réflexion sans ampleur, sans assise et sans méthode. Je voudrais montrer ce qu’il en est de certaines assertions logiques assénées par certains athées, et le problème que posent ces assertions à la logique, qui mérite d’être respectée, à partir du moment où on la conjure.

Saint Justin Martyr avait imaginé un dialogue fictif avec un juif imaginaire, dans son « dialogue avec Tryphon ». Je reprends le principe avec un athée stupide imaginaire.

« Il n’y a pas de vérité » sera sa première déclaration. Ceci est typique de l’athée qui ne respecte pas la logique, et qui dessert sa cause. Il est probable qu’il aurait désespéré Nietzsche, son illustre prédécesseur. Car toute assertion logique doit pouvoir être examinée par rapport à elle-même pour pouvoir être viable. Est-il vrai qu’il n’y a pas de vérité ? Reformulée ainsi, cette phrase devient équivalente à « mes parents n’ont pas eu d’enfant » ou « je ne sais pas parler français ».



« toute vérité est relative » sera la deuxième tentative maladroite de notre athée débutant. Appliquons la déclaration à elle-même : ceci est-il une vérité relative ? On voit bien que l’on peut jouer à ce petit jeu longtemps, si le propos ne se précise pas sur les dimensions scientifiques, émotionnelles, psychologiques, etc. Dans une perspective athée respectable, nous avons à faire à des vérités qui ne sont pas relatives, mais bel et bien objectives, pour tout le monde : Dieu existe-t-il ? Jésus est-il ressuscité des morts ? Moïse a-t-il reçu la Loi sur le Sinaï ? La confiance que l’on a dans une vérité objective ne change rien vis-à-vis de notre relation à cette vérité objective. Quelqu’un pourrait choisir de ne pas croire à la force de gravité, qu’il ne décollerait pas pour autant. Vous ne croyez pas en Dieu et dans le Christ ? Vous serez tout de même jugé à la fin des temps…

« C’est vrai pour vous » méritera davantage d’attention. Sommes-nous en face de quelqu’un qui balaie tout d’un revers du bras en quelques secondes et qui retourne à sa vie, ou bien un athée qui lutte avec l’idée de Dieu toute sa vie, et qui déploie toute son intelligence à cela, comme Nietzsche ou Sartre ? La vérité qu’il exprime concernera donc les conclusions qu’on pourra tirer de notre réflexion, et cela sera respectable, ou bien le fait qu’il se refuse à l’exercice de la réflexion, et cela est la marque des médiocres.

« il n’y a pas de vérité en religion, mais seulement en science ». Notre athée a fait des progrès, mais réalise des confusions de domaines intellectuels. En effet son assertion est du domaine philosophique et non pas scientifique. On ne peut pas prendre sa phrase, la mettre dans un laboratoire et la soumettre à l’expérience. La vérité religieuse et la vérité scientifique ne sont pas de même ordre, et ne peuvent donc être comparées. Par contre, la vérité scientifique peut venir éclairer la vérité théologique, car tout théologien sérieux devra prendre en compte ce que dit la vérité scientifique. Par exemple, le théologien travaillant sur les problématiques liées à la création du monde ou sur le texte de la Genèse, devra prendre en compte la théorie du Big Bang. Il devra par contre agir avec discernement et laisser de côté celle de l’évolution, qui est loin d’être une théorie, car appuyée par rien dans le domaine de l’expérimentation scientifique. Aucun accélérateur de particules n’a fait se transformer un lapin en tyrannosaure…

« rien n’a de sens » : on pourra aussi se méfier des tirades quelque peu nihilistes en les soumettant au même principe logique. Quel est le sens du fait que rien n’ait de sens ? La personne peut-elle vivre honnêtement en appliquant froidement son idée ? Peut-on appeler à la relativisation du bien et du mal en faisant appel à la justice lorsque l’on subit un préjudice ? C’est pour cela que Nietzsche est une personne remarquable : il a vécu en philosophe en appliquant ce qu’il pensait.



« on doit douter de tout ». Cette phrase ne résiste pas non plus à l’auto-examen. Dois-je douter du doute ? Les sceptiques doutent-ils du doute ? j’en doute…

« vous n’avez pas le droit de me juger ». L’athée retourne parfois l’Evangile contre le chrétien. Y-a-t-il quoi que ce soit de plus malhonnête que cela ? Cela consiste d’ailleurs en un jugement quand on y réfléchit bien. Soit l’Evangile est effectif et l’on s’y soumet, soit il ne l’est pas, et il ne faut pas le convoquer, car l’on se met dans une position qui n’est ni logique ni moralement honnête.

En conclusion, j’appelle les orthodoxes à ne pas relativiser le commandement du Christ, à la fin de Matthieu. Nous sommes appelés à faire non pas des croyants, mais des disciples. Nous sommes appelés à baptiser. Ceci s’effectue dans un monde profondément athée, et il est donc de notre devoir de montrer le manque de cohérence, de profondeur et de solidité des positions athées qui sont le plus souvent liées à de la paresse intellectuelle, plus qu’à une véritable réflexion.