le paradis, le buisson ardent et la couronne d’épines

original anglais

The seven seas according to the talmudists, and the four rivers compassing the land.

Seven seas and four rivers compass the land of Israël. 1 ימא רבא The great sea, or the Mediterranean. 2 ימא דטבריא The sea of Tiberias. 3 ימא דמלחא The sea of Sodom. 4 ימא דסמכו the lake of Sachomo. 5 ימא דחולתא o. 6 ימא דשליית o. 7 ימא דאפמיא o. These four last are otherwise writ in the Jerusalem Talmud : to wit, thus, 4 ימא דכובבו o . 5 דחילתא o . 6 ימה דשלחת o . 7 ימה דאפמיא . In the Babylonian Talmud thus : 4 ימה של סימכו o . 5 ימה של חילת o . 6 ימה של חילתא o. 7 ימה דאפמיא o. The three first named among the seven are sufficiently known, and there is no doubt of the fourth :only the three names of it are not to be passed by.

4. 1 The sibbichaean. The word seems to be derived from סבכו a bush. 2. כובבו, which seems to sound the same thing : for קוצים thorns, among the targumists, are כובין; because that lake, having no great depth, but very much dried in the summer time, was grown over with thorns and bushes. 3 סמכו, from whence the common name samochonitis, the letter (mem) and (beth) being changed in סבכו and סמכו.

5 ימא דחולתא perhaps the sandy sea. Which fits very well to the lake of Sirbon, joining the commentary of Diodorus Siculus. For he relates, that that lake; for the most part; is so covered with sand, that it hath often deceived and supplanted travelers, yea, whole armies, thinking it to be firm land.

6 ימא דשלחת We have nothing to say of this, besides this observation, that since it is called by the same gemarists דשליית, the guttural (‘heth) seems to be melted into (yod); which is not unusual to the dialect of the nation, so to smooth and soften guttural letters. It is also called, by the Babylonians, תילתא, which, among the talmudists, does sometimes signify rushy or sedgy : but what the sea is, we know not. However, we do not forget the cendevian lake : but whether that be to be numbered among our catalogue, we doubt upon this reason, because on the same coast lies the great sea.

7 ימא דאפמיא “the sea of Apamia”. The Jerusalem writers, in both places, when they speak of that sea, add these words ימא etc. The sea of Apamia is the same with the sea of Chamatz דיקליטינס etc. “Dicletinus caused it to be made by rivers gathered together”. It was, therefore, of a later date. Concerning it, see the sixty-eight chapter.

After these seas, mentioned by the talmudists, hear also no lean story of theirs concerning the fish : “R. Chaninah Bar Abhu said, seven hundred kinds of clean fish, and eight hundred kinds of clean locusts, and of birds an infinite number, travelled with Israel into Babylone, and returned when Israel returned, except the fish שיבוטא. But how did the fish travel ? R. Houna bar Joseph saith, דרך תהום גדל they travelled by the way of the deep, and by the deep they came back.” Surely it requires a jewish invention (which is able to frame any thing out of any thing), to trace a way, either by any sea, or by any river, through which fish might swim out of Palestine into Babylon. By the same art they bring Jonah in the belly of the whale, out of the Phoenician sea, into the red sea.

That, indeed, is somewhat hard, yet no be doubted of, what is said, 2 Ch 8:18, concerning Hiram sending ships to Solomon into the red sea. What ! ships to come from Tyre into the red sea ? Which way sailed they ? it is answered, he sent such tyrian ships, which had much and long traded before in the red sea, to accompany Solomon’s fleet. To this belongs that, that it is said there likewise (and in 1 Ro 9:27), that “he sent seamen, that had knowledge of the sea;” that is, knowledge of that sea : and they probably not such, who had never yet adventured themselves into the red sea, but had experience of it before, and were not ignorantof the Ophir voyage.

The four rivers for the compassing of the land (they say) 1 ירדן Jordan; that is sufficiently known. 2 ירמוך Jarmoch. In Pliny, ‘Hieramax’ : “Gaddara (saith he), Hieramax flowing before it”. 3 קרמיון Kirmion. 4 פיגה Pigah. Concerning which the Aruch : “kirmion is a river in the way to Damascus, and is the same with Amanah. Pigah is Pharphar. And Jarmoch is also a river in the way to Damascus.” And the talmudists : “the waters of Kirmion and Pigah are not fit” (to sprinkle the unclean), “because they are muddy waters. The waters also of Jordan, and the waters of Jarmoch, are not fit, because they are mixed waters:” that is, as the gloss speaks, mixed with the waters of other rivers, which they receive within themselves.

To the seven seas, concerning which we have spoken, those things which are said by Midras Tillim, do refer : “I have created seven seas, said the Lord, but out of them all I have chosen none, but the sea of Gennesaret”. And of the river of Amanah, of which the Aruch speaks, mention is made in the Targum upon Can 4/8 : “they that dwell upon the river Amanah, shall offer thee a gift” etc.

traduction : La division de la terre

Les sept mers selon les talmudistes, et les quatre rivières traversant la terre.

Sept mers et quatre rivières entoure la terre d’Israël. 1 ימא רבא la grande mer, ou la méditerranée. 2 ימא דטבריא la mer de Tibériade. 3 ימא דמלחא La mer de Sodome. 4 ימא דסמכו Le lac de Sachomo. 5 ימא דחולתא o. 6 ימא דשליית o. 7 ימא דאפמיא o. Ces quatre derniers sont par ailleurs écrits ainsi dans le Talmud de Jérusalem : 4 ימא דכובבו o . 5 דחילתא o . 6 ימה דשלחת o . 7 ימה דאפמיא . Et dans le Talmud de Babylone : 4 ימה של סימכו o . 5 ימה של חילת o . 6 ימה של חילתא o. 7 ימה דאפמיא o. Les trois premiers parmi les sept sont suffisamment connus, et il n’y a pas de doute sur le quatrième : seuls les trois derniers sont à prendre avec prudence.

4.1 le sibbichaéen. Le mot semble dérivé de סבכו arbuste. 2 כובבו qui semble sonner de la même façon : pour קוצים épines, parmi les targoumistes donne כובין ; car ce lac, n’ayant pas une grande profondeur , et très asséché pendant la période estivale, était rempli d’épines et d’arbustes. 3 סמכו, d’où l’on trouve le nom commun samochonitis, la lettre (mem) et (beth) étant échangées dans סבכו et סמכו.

5 ימא דחולתא peut-être la mer sableuse. Ce qui correspond très bien au lac de Sirbon, rejoignant le commentaire de Diodorus Siculus. Il relate que ce lac, pour sa plus grande partie, est recouvert de sable, ce qui avait souvent trompé et enterré des voyageurs, et parfois des armées entières pensant qu’il s’agissait de terre ferme.

6 ימא דשלחת Nous n’avons rien à dire de cela , à part cette observation, qu’il a une fois été appelé par les guémaristes דשליית, la gutturale (‘heth) semble être mélangée avec yod ; ceci n’est pas inhabituel dans le dialecte de la nation, d’adoucir et d’aplanir les gutturales. Cela est nommé, par les babyloniens, תילתא, ce qui, parmi les talmudistes, signifie parfois jonc ou énervé : mais ce qu’est cette mer, nous ne le savons pas. Quoi qu’il en soit, n’oublions pas le lac cendevien : qu’il soit compté parmi notre catalogue, nous en doutons, car il se trouve sur la même côté que la grande mer.

7 ימא דאפמיא « la mer d’Apamia ». Les écrivains irésosalomitains (de Jérusalem), à deux endroits, lorsqu’ils évoquent cette mer, ajoutent les mots ימא etc. La mer d’Apamia est la même que la mer de Chamatz דיקליטינס etc. « Dicletinus a fait se rejoindre les rivières ». Cela était donc d’une date ultérieure. Concernant ce point, voir le chapitre 68.

Après ces mers mentionnées par les talmudistes, écoutons aussi leurs histoires importantes concernant le poisson : “R. Chaninah bar Abhu disait, sept cent types de poissons purs, et huit cent types de sauterelles pures, et des oiseaux en nombre infini, sont partis avec Israël à Babylone et sont revenus lors qu’Israël est revenu, à l’exception du poisson שיבוטא. Mais comment voyagèrent les poissons ? R. Houna bar Joseph disait, דרך תהום גדל ils voyagèrent par le chemin de profondeur et par la profondeur ils revinrent. Assurément cela demande une invention juive (qui est capable de tirer n’importe quoi de n’importe quoi), pour imaginer un chemin, par n’importe quelle mer, ou n’importe quelle rivière, pour qu’un poisson puisse nager de Palestine jusque Babylone. Par la même imagination ils transportent Jonas du ventre de la baleine, hors de la mer de Phénicie, vers la mer rouge.

Ceci, véritablement, est quelque peu compliqué, de ne pas douter de ce qui est dit en 2 Chr 8:18, concernant Hiram envoyant des vaisseaux à Salomon par la mer rouge. Quoi ! des navires passant de Tyr à la mer rouge ? par où sont-ils passés ? Il est répondu qu’il a envoyé des navires tyriens, qu’il avait acquis il y a longtemps avant dans la mer rouge, afin d’accompagner la flotte de Salomon. A ceci appartient, qu’il fut dit également (dans 1 Ro 9:27) qu’ «il a envoyé des marins, qui avait connaissance de la mer » ; c’est-à-dire qui avait une connaissance de cette mer : c’est-à-dire non pas des gens n’ayant jamais navigué sur cette mer, mais des marins ayant déjà eu cette expérience et qui connaissaient le voyage d’Ophir.

Les quatre rivières qui traversent la terre (disent-ils) 1 ירדן le Jourdain ; ceci est suffisamment connu. 2. ירמוך Jarmoch. Chez Pline, ‘Hieramax’ : « Gaddara » (disait-il), Hieramax coule devant lui ». 3 קרמיון Kirmion. 4 פיגה Pigah. Concernant lequel avec le Aruch : “kirmion est une rivière dans la direction de Damas, et est la même qu’Amanah. Pigah est Pharphar. Et Jarmoch est aussi une rivière en direction de Damas.” Et les talmudistes : « les eaux de Kirmion et de Pigah ne sont pas autorisées » (pour l’aspersion de l’impur), « car ce sont des eaux boueuses. Les eaux du Jourdain, et les eaux du Jarmoch ne sont pas autorisées non plus, car ce sont des eaux mélangées ». C’est ainsi que parle [XXX gloss XXX], mélangées avec les eaux des autres rivières, qu’elles reçoivent en elles.

Concernant les sept mers dont nous avons parlé, ces choses sont rapportés dans le midrahs Tehilim : « j’ai créé sept mers, dit le Seigneur, mais parmi elles je n’en ai choisi aucune sinon la mer de Gennesaret ». Et la rivière d’Amanah, dont parle le Aruch, il en est fait mention dans le Targoum sur Can 4:8 « ceux qui passent sur la rivière Amanah doivent t’offrir un cadeau ».




Commentaire/Analyse

Lightfoot ne commente pas ici la richesse théologique qu’on peut ressortir de son inventaire rabbinico-géographique. Pourtant il y aurait matière. Mais cela n’était peut-être pas son ambition ici. On nous rapporte que la terre sainte est traversée par quatre rivières. C’est exactement la description que la Genèse fait du jardin d’Eden, traversé par quatre fleuves. Ainsi, on peut dire qu’il y a une forme d’identité géographique entre le jardin d’Eden et la terre d’Israël. L’identité a néanmoins ses limites, puisque le jardin du texte de Moïse n’était pas entouré de sept mers (en tout cas il n’en est pas fait mention, ce qui ne signifiait pas qu’il ne l’était pas, bien entendu).

Plus intéressant encore, la rivière qui fait penser phonétiquement aux épines ou aux arbustes selon comment on joue avec les lettres. Ceci peut sembler un peu artificiel ou étrange ou alambiqué au néophyte dans l’exégèse rabbinique, mais ceci est finalement assez classique de l’exercice herméneutique lié à la souplesse de la langue hébraïque. Il est courant chez les rabbins de changer une lettre (généralement une sonorité liée à une voyelle) pour passer d’un mot à l’autre. Ainsi en français on passera facilement de ruche à riche, et de riche à roche, etc. La particularité et la richesse de l’hébreu, c’est qu’il n’y a d’écrit que rch. C’est au lecteur selon le contexte de comprendre s’il s’agit de ruche, de riche, ou de roche. Une phrase « un riche a trouvé une ruche sur une roche » serait donc un enfer herméneutique pour un fonctionnement théorique de la langue française sur un mode hébraïque. C’est la vocalisation massorétique qui permet de s’assurer de la bonne vocalisation (de la bonne « voyellisation » devrait-on dire) sur le texte biblique. Mais il faut se souvenir que Moïse n’a donné venant de Dieu que RCH. C’est le son transmis par oral qui permet de dire RiCHe ou RoCHe ou RuCHe. Massorétique est l’adjectif pour désigner le travail des massorètes, ceux qui ont mis les signes de vocalisation au dessus et au dessous des lettres afin de définr les voyelles à insérer entre les consonnes, d’après la récitation orale traditionnelle héritée de Moïse.

Revenons à l’arbuste/épine. En fonction de la vocalisation et de toutes les techniques liées à la souplesse de la langue, une des rivières est soit arbuste soit épines. Dieu est soit dans les épines (avec sa couronne lors de la Passion) soit dans un arbuste (au buisson ardent dans le livre de l’Exode). C’est déjà saisissant. Mais le mieux est de se souvenir qu’il s’agit ici d’une rivière qui traverse la terre d’Israël. On peut réaliser une identification entre le Christ et la terre d’Israël : l’un est la projection de l’autre. Ainsi, dans la géographie de la terre sainte, se retrouve l’épisode du buisson ardent, qui par les règles de lecture traditionnelles des rabbins permet de voir que ce buisson (moment de rencontre entre Dieu et l’homme) va devenir épines (autre moment de rencontre entre Dieu et l’homme).