Allégorie et littéralité dans l’herméneutique orthodoxe.

original anglais

Kadesh. Rekam, and that Double. Inquiry is Made, Whether the Doubling it in the Maps is Well Done

I. Of Kadesh, or Rekam, in the south part, there is no doubt.

II. Of it, in the eastern part, there is this mention: "From Rekam to the east, and Rekam is as the east": that is, R. Nissim interpreting, "Rekam itself is reckoned for the east of the world" (that is, for the land of the heathen), "not for the land of Israel." Behold! a Rekam, or a Kadesh, also, on the east. But the maps have feigned to themselves another Kadesh, besides Barnea, and this eastern Rekam; whither, they think, the people of Israel came in the fortieth year of their travel, Numbers 20. These, we suppose, were some of the reasons, whereby the authors of them were drawn to it.

I. Because Kadesh-barnea was in the desert of Paran, Numbers 12:16, 14:1. But the Kadesh, whither they came the fortieth year, was in the desert of Zin, Numbers 20:1. -- I answer, The searchers of the land, departing from Kadesh-barnea, are said, also, to go out of the deserts of Zin, Number 13:21. Paran was the general name of that dreadful desert; Zin only one part of it.

II. In Kadesh-barnea they encamped many days, Deuteronomy 1:46. But in that Kadesh, concerning which mention is made, Numbers 20, there was not provision sufficient, whereby they might be sustained one day. For they complain, that it was a place altogether destitute of seed, figs, vines, and pomegranates, Numbers 20:5: which they did not at all complain of, while they remained in Kadesh-barnea. -- I answer, Omitting, that wheresoever they encamped, they were fed by manna; the complaint arose among them, not so much of the place itself, as of the ill boding and prejudice, as I may so say, of the place; because, from the barrenness of this place, they prejudged of the like barrenness of that land, into which they were to enter, -- and the porch, as it were, of which, was Kadesh-barnea. When they came hither first, now thirty-eight years before, "Ye came to the mountain of the Amorites (saith Moses) which the Lord giveth you," Deuteronomy 1:20,21. 'Is it so?' (think they with themselves) 'Does the first entrance of the land of promise, promise no better? There is little hope of the land itself, if the beginnings of it are such. It is convenient, therefore, that we send before us spies, who may bring us word, whether it is of so great account, that we should tire and hazard ourselves by going to that soil, whose first appearance is so horrid and desperate.' -- And hence was that unhappy argument before their eyes, by the inducement of which the whole multitude, by so unanimous a vote, concluded and resolved against the land. And since now, after so much time passed, they are come back to the same place, they think, distrust, and complain of the same things.

III. In Kadesh-barnea, they had a supply of water; in Kadesh, whither they came the fortieth year, there was no water, Numbers 20, &c. -- I answer, They drank, when they first came to Kadesh-barnea, of the rock, which followed them (1 Cor 10:2), which dried up, when they were now ready to enter into the land. If you ask, Why had those rivers that followed them, dried up, as soon as they came at Kadesh-barnea, which before had not dried up when they came thither; -- then I ask also, Why had they dried up, when they came to another Kadesh?

IV. Concerning the Kadesh, whither they came the last year of their travel, it is said, that the city was in the utmost bounds of the land of Edom: and therefore, they desire leave of the king to pass through the land of Edom, Numbers 20:16,17. -- I answer, Nothing at all hinders, but these things may be spoke of Kadesh-barnea, which lying contiguous to the mountain of the Amorites, that is, to mountainous Judea, showed so great an army an access, and promised it; only that access was winding, and very difficult to be passed. They desire, therefore, a more level way of the king of Edom, but obtain it not.

V. Perhaps that which chiefly moved them, was this; that supposing one Kadesh only, to wit, Barnea, -- it will be scarce possible not to confound the encampings of Israel in the wilderness, and their movings from place to place. -- I answer, There will be the same easiness of ordering them, if you do but reduce the sixth and seventh verses of Deuteronomy 10, into a true sense, and into agreement with Numbers 33 from verses 31 to 41; which is not hard to do. But let these things suffice, for the present, to have spoke besides our scope. That that Kadesh, to which they came in the fortieth year (which is called Meribah, Numbers 20:13), is the same with Kadesh-barnea, is clear enough from hence, -- that Meribah in Kadesh is assigned for the southern border of the land, Ezekiel 47:19; which border of old was Kadesh-barnea, Numbers 34:4; Joshua 15:3.

traduction

Kadesh. Rekam, et ce double. L’enquête est faite pour savoir si le double des cartes est bien fait

I. Sur Kadesh, ou Rekam, dans la partie sud, il n’y a pas de doute.

II. De cela, dans la partie orientale, il y a cette mention : “de Rekam jusqu’à l’est, et Rekam est comme l’est” ce que R. Nissim interprète comme « Rekam elle-même est compté comme est du monde » (çad pour la terre des païens), « pas pour la terre d’Israël ». Attention ! Un rekam, ou un Kadesh, aussi à l’est. Mais les cartes ont simulé un autre Kadesh, à côté de Barnea, et ceci est le Rekam oriental. Dans quel but, pensent-ils, le peuple d’Israël est-il venu dans la quarantième année de son périple, Nb 20. Nous supposons que celles-ci comptaient au nombre des raisons, qui font que les auteurs ont dessiné ainsi.

I. Parce que Kadesh-Barnea était dans le desert de Paran, Nb 12:16, 14:1. Mais le Kadesh pour lequel ils vinrent dans la quarantième année, était dans le désert de Zin (Nb 20 :1) – je réponds que les explorateurs, partant de Kardesh-Barnea, ont dit, aussi, de chercher dans le désert de Zin, Nb 13:21. Paran était le nom général de cet exécrable désert. Zin, le nom d’une partie seulement.

II. Dans Kadesh-Barnea, ils campèrent de nombreux jours, Dt 1:46. Mais dans ce Kadesh, concernant la mention qui en est faite, Nb 20, il n’y avait pas assez de réserves, sinon pour tenir une seule journée. Ils se plaignirent du manque à la fois de semences, figues, vignes et grenades, Nb 20:5 : ils ne s’en plaignirent pas tout le temps qu’ils restèrent à Kadesh-Barnea – Je réponds, en omettant que là où ils campaient ils étaient nourris par la manne ; La complainte monta parmi eux, pas vraiment dans l’endroit lui-même, comme une liaison entre maladie et préjudice, comme je pourrais dire, de l’endroit. Parce que de la stérilité du lieu, ils ont préjugés de l’identique stérilité de la terre, où ils devaient entrer, -- et le porche, se trouvait être Kadesh-Barnea. Lorsqu’ils entrèrent ici en premier, trente-huit avant, « tu es venu à la montagne des Amorites (dit Moïse) que le Seigneur t’a donné » (Dt 1:20-21). ‘Est-ce ainsi’ pensèrent-ils en eux-même ‘Est-ce que la première entrée dans la terre promise ne saurait être meilleure ? Il y a peu d’espoir vis-à-vis de la terre elle-même, si le début est de la sorte. Il est propice, alors, d’envoyer avant nous des explorateurs, qui puissent nous rapporter un récit de première importance, à savoir si nous devons nous fatiguer et nous mettre en danger en allant sur cette terre, dont la première apparence est si horrible et désespérante. – et malheureusement, c’est avec ce mauvais argument en tête, que la multitude, via un vote unanime, décida de voter contre cette terre. Et depuis lors, après une si longue période de temps, ils reviennent au même endroit, constatent les mêmes choses, et se plaignent de la même façon.

III. Dans Kadesh-Barnea, ils avaient des réserves d’eau. Dans Kadesh, dans lequel ils vinrent volontairement dans la quarantième année, il n’y avait pas d’eau, Nb 20, etc. – je réponds qu’ils burent, lorsqu’ils vinrent la première fois à Kadesh-Barnea, à partir du rocher qui les suivait (1 Co 10:2), qui s’assécha lorsqu’ils s’apprêtèrent à entrer dans le pays. Si vous demandez, pourquoi ces rivières qui les avaient suivis s’étaient asséchées, aussitôt qu’ils arrivèrent à Kadesh-Barnea, alors qu’elles ne s’étaient pas asséchées auparavant —- alors je demande également, pourquoi se sont-elles asséchées lorsqu’ils vinrent dans l’autre Kadesh ?

IV. Concernant le Kadesh dans lequel ils vinrent la dernière année de leur voyage, il est dit, que la ville était aux plus grandes limites du territoire d’Edom : et ainsi, ils souhaitaient que le roi parte au travers du pays d’Edom Nb 20:16-17. Je réponds que rien ne l’empêche du tout, mais ces choses peuvent être dites sur Kadesh-Barnea, qui est contiguë à la montagne des Amorites, qui est par rapport à la Judée montagneuse, montrée si grande à l’armée un accès, et l’a promis ; Seulement cet accès était tortueux et très difficile à franchir. Ils désirent, donc, un chemin davantage pratiquable pour le roi d’Edom, mais ne l’obtinrent pas.

V. peut-être ce qui les a brièvement fait bouger, était ceci ; Qu’un seul supposé Kadesh, à savoir Barnea, -- il sera rarement possible de ne pas confondre les campements d’Israël, dans la région sauvage, et leurs mouvements d’un endroit à l’autre. – je réponds, il y aura la même facilité pour le mettre en ordre, si vous réduisez les versets 6 et 7 du Deutéronome 10, dans un sens véritable, en accord avec Nombres 33 des versets 31 à 41. Ce qui n’est pas compliqué à faire. Mais laissons ces choses pour l’instant, car elles sortent de notre sujet. Qui est que ce Kadesh, dans lequel ils sont venus dans la quarantième année (qui est appelé Meribah en Nombres 20:13), est le même que Kadesh-Barnea, et il est clair à partir de ceci, -- que Meribah dans Kadesh est attribué pour la frontière sud du pays, Ezekiel 47:19 ; Pour la frontière du vieux Kardesh-Barnea, Nb 34:4, Jos 15:3.




Commentaire/Analyse

Le point ici (pour Lightfoot) est de savoir si dans la Bible, lorsque le nom Kadesh est évoqué, il s’agit d’un seul et même lieu ou d’une pluralité de lieux (en l’occurrence ici deux). Ce qui est très intéressant ici est la méthode de travail de Lightfoot. En effet il ne relève pas que Kadesh s’écrit (même s’il se vocalise différemment avec la vocalisation des massorètes) comme prostitué (pour un homme) : qof daleth shin et comme sanctifier (en araméen). Le terme saint en hébreu s’écrit avec une lettre supplémentaire pour la vocalisation en « o » : quadosh : qof daleth waw shin. Il est d’ailleurs fascinant de voir la proximité linguistique et phonétique entre saint et prostitué, entre sanctifié et profané. Lorsque l’on lit « qadesh » il est difficile de ne pas penser à « prostitué », mais pas dans le sens moderne du gigolo qui gagne sa vie en vendant ses charmes aux vieilles dames fortunées et esseulées, mais bel et bien un homme accomplissant des actes sexuels dans le cadre d’un rituel païen. Il y avait dans l’antiquité tout un cadre de ce qui est communément appelé la « prostitution sacrée ». L’acte liturgique prenait place dans le cadre d’un acte sexuel, ce qui est assez étonnant pour nous autres modernes qui vivons dans la cadre d’une religiosité totalement déconnectée de la sexualité (bien que celle-ci puisse et doive avoir une dimension spirituelle dans le cadre de la vie d’une personne religieuse mariée).

Ainsi Lightfoot aurait été sur un terrain facile et propice pour dire que sainteté et profanation sont proches, que prostituée et sainte sont proches et qu’elles sont les deux faces d’une même médaille et que le trajet est plus proche qu’on ne le pense de l’un à l’autre. Mais non, il reste sur les considérations purement géographiques. Car il sait que l’allégorie n’est pas une preuve en soi. Et l’allégorie, pour faire partie d’une herméneutique orthodoxe doit offrir une base littérale rigoureuse. Sinon, il s’agit d’un simple amusement un peu facile où l’on virevolte de symbole en métaphores et disant que ceci représente cela, mais au final tout peut tout représenter lorsque l’on a pas de rigueur. Et on voit avec quelle rigueur travaille lightfoot. Il voit comment le texte par d’un Kadesh dans le désert de Paran, puis stipule qu’il est dans un autre endroit, puis encore dans un autre endroit. Il égrène les occurrences, les compare et travaille de façon très patristico-rabbinique : il imagine un interlocuteur imaginaire qui le contredirait. Cet interlocuteur imaginaire est celui qui manifeste la rigueur du travail. Car toute chose dans la Bible doit être prise de façon systématique, avec toutes ses occurrence, avec toutes ses possibilités, avant de pouvoir en tirer la moindre conclusion. Résolument, cela demande une gymnastique intellectuelle et une connaissance peu communes. C’est pourquoi malheureusement, de si nombreuses personnes racontent autant de bêtises sur les sujets bibliques.

En tout cas Lightfoot a bien raison, il existe deux Kadesh, car la géographie est le reflet de cette dualité humaine, de cette proximité du pire et du meilleur, et de la possibilité de passer de l’un à l’autre. Le fait qu’il y ait ces deux villes sur la carte de la terre sainte montre à tout un chacun la chose suivante : la prostituée peut devenir sainte, et la sainte peut chuter et devenir la pire des prostituées.