La révélation naturelle comme base de la croyance naturelle et d’un sens de l’existence

section 8 (p14-16)

texte original roumain

Potrivit credinței noastre, ordinea sensurilor nu poate fi insă nesocotită. Sensurile sunt reale și omul nu poate trăi fără ele. El nu poate suporta să trăiască fără o conștiință a sensurilor și fără urmărirea lor, căci ele culminează intr-un sens final, pe care a convins că îl va atinge dincolo de moarte. Dacă omul ar contesta sensurile, ar fi cea mai nefericită existență. Animalul ni stie de sensuri, și nici nu poate să le conteste. Omul, prin conștiința sa, nu se mulțumește să fie o ființă al cărei sens e să servească unei trepte superioare, fără să-și dea seama, în care el să- și înceteze existență. El urmărește în mod conștient sensurile sale și, în ultimă analiză, un sens final, care e menținerea și desăvârșirea lui în eternitate. El e un scop în sine pentru eternitate. El e făcut pentru eternitate, având în sine un fel de caracter absolut, adică o valoare netrecătoare, care nu sfârșește niciodată să se îmbogățească. Omul e deschis unor sensuri superioare lumii și, prin el, și lumea. Prin înțelegere, prin libertate, prin acțiune, prin aspirație el e deschis unei ordini superioare celei a naturii, deși se folosește de ea ca să-și poată realiza sensul său de ființă chemată la o desăvârșire eternă. Ființă noastră este o existență acomodată acelei ordini și posibilități de continuă deșăvârșire spirituală, neaservită naturii și repetiției. Acea ordine nu e produsă de natura care se repetă, ci mai degrabă ea organizează întregul cosmos pentru a-i sluji omului, ca acesta să lucreze în vederea scopului său supraterestru. Noi credem că pentru ființa noastră sensurile existenței nu-și pot găsi încoronarea într-o viață spirituală imanentă ; căci relativa ei varietate se mișcă în fond tot într-un cadru monoton, și sfârșește cu moartea trupului, ca fenomen de repetiție naturală. Sensul existenței nu poate fi încoronat decât în lumina nelimitată și eternă a unei vieți transcendente libere de orice monotonie a repetiției și de orice relativitate. Numai în acel plan viața noastră se poate dezvolta la infinit, într-o nesfârșită noutate, care este în același timp o continuă plenitudine. Noi tindem spre ordine dincolo de noi, dar aflată pe o linie asemănătoare existenței noastre personale, nu spre confundarea într-un plan impersonal aflat pentru o vreme la dispoziția noastră limitată, ca apoi să dispărem în el. Omul tinde spre o realitate personală infinită, superioară lui, din care să se poată hrăni la infinit, fără să poată dispune de ea, date fiind posibilitățile lui limitate, dar și fără să dispară apoi în ea.

traduction proposée (et corrigée par les soins d'Allan T., grand merci encore pour son aide)

Selon notre foi, l’ordre des sens ne peut pas être non considéré. Les sens sont réels et l’homme ne peut pas vivre sans eux. Il ne peut supporter de vivre sans une conscience des sens et sans leur recherche, car ils culminent en un sens final, qu’il est convaincu qu’il atteindra au-delà de la mort. Si l’homme contestait les sens, son existence serait des plus malheureuses. L’animal n’a pas conscience de ses sens, et ne peut pas les contester. L’homme, par sa conscience, ne se contente pas d’être un être pour lequel les sens servent un niveau supérieur, sans s’en rendre compte, dans lequel il cesse son existence. Il suit ses sens de façon consciente et, en dernière analyse, un sens final, qui est son maintien et son accomplissement dans l’éternité. Il est une fin en soi pour l’éternité. Il est fait pour l’éternité, ayant en lui-même une forme de caractère absolu, c’est-à-dire une valeur éternelle, qui ne se cesse jamais de s’enrichir. L’homme est ouvert aux sens supérieurs du monde, et par lui, le monde aussi. Par la compréhension, la liberté, l’action, l’aspiration, il est ouvert aux ordres supérieurs de la nature, bien qu’il l’utilise afin de pouvoir réaliser le sens de son être appelé à l’accomplissement éternel. Notre être est une existence accommodée à ces ordres et à la possibilité d’accomplissement  spirituel continu, non asservie à la nature et à la répétition. Cet ordre n’est pas un produit de la nature qui se répète, mais plutôt il organise le cosmos entier pour le service de l’homme, afin qu’il travaille en vue de son but supraterrestre. Nous croyons que pour notre être les sens de l’existence ne peuvent trouver le couronnement dans une vie spirituelle immanente ; car sa variété relative se déplace finalement dans un cadre monotone, et se termine avec la mort du corps, comme phénomène de répétition naturelle. Le sens de l’existence ne peut être couronné que dans la lumière illimitée et éternelle d’une vie transcendante libre de toute monotonie de répétition et de toute relativité. C’est seulement dans ce plan que notre vie peut se développer à l’infini, dans une nouveauté infinie, qui est En même temps une plénitude continue. Nous tendons vers un ordre au-delà de nous, mais qui se trouve sur une ligne similaire à notre existence propre, et non pas vers la fusion dans un plan impersonnel qui se trouve pour un temps à notre disposition limitée, pour ensuite disparaître en lui. L’homme tend vers une réalité personnelle infinie, supérieure à lui, dont il peut se nourrir à l’infini, sans pouvoir disposer d’elle, étant données ses possibilités limitées, et sans disparaître ensuite en elle.


Commentaire/Analyse





Il s’agit ici d’un passage d’une grande richesse, qui aborde le problème des sens, la distinction animale, la particularité humaine, la relation de l’homme au monde et enfin le problème des spiritualités immanentes. Commençons par les sens. Le Père Dumitru exprime l’importance majeure des sens dans l’existence humaine. L’homme est un être de sensations, de ressenti. Ses sens sont des voix de communication au monde. Ils sont à la fois une grande richesse et un grand problème. Leur richesse énonce également l’impossibilité pour l’homme de s’en affranchir. Ce serait selon le Père Staniloae la cause d’un grand malheur. La vie se doit d’expérimenter des sensations. Le problème des sensations, et la littérature patristique abonde à ce propos, surgit lorsque la sensation devient l’alpha et oméga de l’homme. Lorsque la recherche du plaisir (on recherche rarement des sensations désagréables, sauf pour des cas très particuliers) devient le but unique de la vie. Ceci devient une forme d’esclavage subtil et très pernicieux, car il sera plus simple de rechercher à s’affranchir d’une souffrance que de rechercher la même chose pour un plaisir. Ainsi la vie sans sens n’aurait pas de signification, mais la vie avec les sens pour seul horizon serait une profonde erreur.

Le Père Staniloae utilise ensuite une assertion concernant les animaux qui pourra sembler artificielle ou hasardeuse : que savons-nous de ce que pensent les animaux ? Il leur prête une incapacité à savoir prendre du recul vis-à-vis des sens. Plusieurs expériences scientifiques viennent corroborer cette intuition.

Mais cette intrusion des animaux ici n’a qu’un objectif pour le théologien roumain : mettre en avant ce qui fonde l’homme, sa particularité absolue. La question du propre de l’homme fut maintes fois posées, et a trouvé de nombreuses propositions, qui ne peuvent être des réponses satisfaisantes du point de vue théologique : le propre de l’homme est d’accéder à l’éternité. Il s’agit, et on ne le répétera jamais assez de la plus haute définition jamais faite concernant l’homme. L’humanisme, censé représenter les cimes de l’amour humain fait bien pale figure à côté de cette vision immense de l’homme : être ayant comme capacité et comme but de réaliser une jonction avec le divin, avec l’infini, avec l’éternel. Et le Père Dumitru rappelle ce qu’il a exposé déjà plusieurs fois dans les passages précédents : cette jonction se réalise dans le monde. Le monde fini, au moyen des sens limités, est l’endroit où se réalise cette jonction avec l’infini, avec l’illimité. La question va alors être : l’homme va-t-il prendre le monde comme une fin ou comme un moyen ? Le Père Dumitru utilise des expressions très complexes, pour une idée, qui sans être simple, reste néanmoins accessible : le monde est tellement riche, et tellement porteur de cette jonction à l’infini, qu’il peut lui-même devenir un obstacle, alors qu’il était censé être le moyen de parvenir à l’éternité. Prenons l’exemple des idolâtries sur le soleil. Le soleil est un astre créé par le Seigneur. Il a pour fonction de nous fournir chaleur, lumière. Sans lui aucune vie n’est possible. Aucune éternité ne pourrait être envisagée car il n’y aurait même pas de vie possible. Pour autant, adorer le soleil comme plusieurs civilisations l’ont fait, est une façon de rester dans le monde, d’être immanent. L’immanence est au final une transcendance qui ne s’articule pas avec l’infini. C’est une fausse transcendance. C’est en cela que toute immanence est un piège, et que le monde qui peut permettre à l’homme de réaliser son salut, peut devenir en même temps un obstacle.