Réfutation du Torahisme : partie 1 sur 4 (présentation et non éternité de la Loi de Moïse)

Introduction
Je voudrais traiter aujourd’hui d’une nouvelle hérésie, enfin pas si nouvelle que cela, mais tout de même d’une hérésie qui prend de l’ampleur depuis quelques années. C’est un mouvement qui n’a pas de nom officiel, qui n’a pas une doctrine unique mais qui se divise en plusieurs groupes se disputant ici ou là sur tel point de doctrine. Mais disons qu’ils se rejoignent sur ces grands points fondamentaux : ils considèrent que la Loi de Moïse n’a pas été abolie et qu’elle s’applique encore aujourd’hui, et pas seulement aux juifs mais à toute l’humanité. Ils affirment haut et fort que, pour être un vrai disciple de Jésus, il faut entre autres garder la Loi de Moïse. Mener la vie de saint Seraphim de Sarov tout en ne respectant pas la Loi de Moïse vous disqualifie de pouvoir prétendre au titre de chrétien. Comme ils sont tous d’accord là-dessus, je vais me permettre de les désigner sous le nom de torahistes, pour la clarté de mon exposé. C’est moi ici qui invente ce néologisme et il ne se veut pas péjoratif, pour ceux qui écouteraient cette vidéo et seraient en accord avec tel ou tel groupe de ce mouvement.
Je ne les appelle pas judaïsants, pour ne pas les confondre avec ce groupe, les « judaïsants », qui émergea en Russie à la fin du XVème siècle, groupe qui, probablement sous l’influence d’une communauté juive voisine, a fini par rejeter la Trinité, la divinité du Christ, les icônes et les sacrements, l’autorité de l’Eglise et s’est mis à observer certaines pratiques rituelles juives. Je ne trace pas le signe d’égalité entre les deux, justement pour ne pas amener de confusion entre les deux phénomènes. Il est important de bien les différencier, même si évidemment on pourra constater une certaine parenté idéologique. Les torahistes actuels ne seront pas tous d’accord avec les judaïsants de Russie sur certains points. Certains affirment la divinité du Christ par exemple. Mais il faudrait voir, au-delà de cette affirmation, si leur christologie suit les paradigmes de la christologie byzantine qui est celle de l’Eglise orthodoxe véritable.
Dans ce vaste mouvement torahiste, très présent aux USA, il y a un mouvement appelé « les nazaréens » qui semble plutôt basé sur la Belgique. Ils ont un site web qui montre un manifeste doctrinal avec plusieurs points. Bien évidemment, comme dans toute hérésie, certains points sont corrects. Je vais ici me baser sur les points les plus problématiques du point de vue orthodoxe et je vais tâcher d’y répondre. Plaise à Dieu que cela permette à certains torahistes de comprendre l’impasse dans laquelle ils sont.
Simon le magicien, père de l’hérésie, et son disciple, Ménandre d’Antioche
Mais avant de répondre, je voudrais faire un balayage des hérésies du tout début de l’Eglise et voir comment les torahistes se rapprochent d’elles ou pas. Quelle est la nécessité de ce recours à l’histoire ? Lorsque l’on constate un phénomène hérétique face à l’Eglise, il est toujours instructif de se référer à l’histoire et de voir combien, dans l’écrasante majorité des cas, les adversaires de l’Eglise, resservent sans cesse les mêmes plats empoisonnés. Dans cet adage qui enseigne que celui qui ne connait pas son histoire est condamné à la revivre, adage attribué à tort à Karl Marx, je pourrais paraphraser que celui qui ne connait pas l’histoire des hérésies est condamné à ne pas les reconnaître et donc les identifier comme telles. En voyant tel ou tel phénomène hérétique à première vue, on pourrait être paralysé en se disant qu’il faut attendre un peu, qu’il faut vérifier, vérifier encore, ne pas juger hâtivement. Mais lorsque vous voyez quelqu’un affirmer quelque chose qui a justement été condamné par l’Eglise, que ce soit dans ses conciles ou dans son consensus patristique, et bien la situation devient tout de suite plus simple. Et c’est le pourquoi de ce détour. La tradition de l’Eglise considère assez unanimement que l’hérésie a un père : Simon le magicien, cet énigmatique personnage des actes des apôtres. C’est affirmé par Irénée de Lyon, Eusèbe de Césarée, Tertullien et Théodoret de Cyr. Origène l’affirme également. On voit donc qu’il s’agit de quelque chose de très ancien, de probablement apostolique. Simon était samaritain. Simon est mentionné dans le Livre des Actes (Actes 8:9-24) comme un magicien de Samarie qui aurait impressionné les gens avec ses pouvoirs et qui aurait été converti au christianisme par l’apôtre Philippe. Cependant, il aurait ensuite tenté d’acheter le pouvoir des apôtres afin de réaliser des miracles lui-même. Selon les Pères de l’Église, Simon le Magicien est souvent considéré comme le fondateur de l’hérésie gnostique. Il est souvent associé à des idées gnostiques et à une forme de dualisme, où il professait une connaissance secrète et réservée à une élite. Il aurait prétendu être l’incarnation de Dieu ou de Christ, ce qui aura suffi à le placer là où il est dans l’histoire de l’Eglise.
Son plus grand disciple fut Ménandre, samaritain également, à ne pas confondre avec l’auteur comique grec. Notre Ménandre est qualifié de Ménandre d’Antioche par les pères de l’Eglise. Ménandre, est souvent décrit comme ayant continué et amplifié les enseignements hérétiques de son maître. Il est parfois identifié comme un gnostique qui aurait également revendiqué une connaissance cachée et ésotérique. Ménandre aurait professé des idées similaires à celles de Simon, et ses enseignements auraient souvent été centrés autour d’un dualisme radical et d’une forme de mysticisme gnostique. Il est dit qu’il se serait prétendu le sauveur ou un envoyé divin, continuant la tradition de revendications messianiques de Simon.
Cette partie gnostique de l’hérésie connaitra ses développements les plus durables avec saturnins et basilides, des écoles gnostiques du deuxième siècle. Il n’y a plus eu de traces de disciples immédiats de Simon et Ménandre qui furent vaincus par les apôtres en personnes. De plus saturnins et basilides ont pu se développer plus facilement à cause des terribles persécutions qu’endurait l’Eglise.
Cérinthe, et les premières tendances au Torahisme
Après Ménandre, c’est Cérinthe qui vient inscrire son nom dans le panthéon des hérésiarques. Cérinthe est plus intéressant pour notre propos car c’est historiquement le premier à montrer des tendances torahistes. C’est un gnostique assez classique, mais pour la première fois dans la galaxie gnostique, quelqu’un affirme que certaines observances de la Torah sont maintenues. Tandis que les autres hérésies gnostiques de cette époque avaient tendance à rejeter la loi juive comme obsolète ou inférieure, Cérinthe a maintenu une forme d’observance de la loi juive. Il semble avoir cherché à concilier certains aspects de la tradition juive avec ses vues gnostiques, ce qui le distingue des autres hérétiques de son temps. De façon assez étonnante, Cérinthe concilie cela avec une vision très négative de Dieu dans l’AT, vu comme un démiurge méchant et cruel. Nos torahistes actuels ne disent pas cela. Deux anecdotes intéressantes à son propos. Pour soutenir son point de vue, Cérinthe ne gardait que Matthieu et rejetait les autres récits qui constituent le NT. C’est une sorte de Marcion inversé, et avant Marcion bien entendu. Marcion rejetait l’AT et ne gardait que les passages de Paul les plus explicites pour le rejet de la Loi. Cérinthe fait l’opposé. Il garde tout l’AT, et ne prend que l’Evangile de Matthieu. Et surtout, et c’est un enseignement de plusieurs pères dont saint Jérôme, saint Jean aurait écrit son évangile pour réfuter Cérinthe. Vous rendez vous compte de ce que serait notre foi et notre Eglise sans l’Evangile de Jean ? J’ai presque envie de remercier ce bon Cérinthe. Une autre anecdote pour les amateurs de tolérance œcuménique et de guimauve théologique : à propos de saint Jean l’apôtre et évangéliste « étant allé aux bains à Éphèse, aperçut Cérinthe à l’intérieur ; il bondit alors hors des thermes sans s’être baigné, en s’écriant : « Sauvons-nous, de peur que les thermes ne s’écroulent, car à l’intérieur se trouve Cérinthe, l’ennemi de la vérité ! » écrit saint Irénée dans son traité contre les hérésies. On ne côtoie pas les hérétiques. On ne prie pas avec eux pour manifester l’amour absolu auquel Dieu nous appelle. On les combat par la joute spirituelle et intellectuelle. On défend le troupeau. Il ne s’agit pas ici de haïr les personnes, mais de ne pas confondre l’amour du prochain avec la compromission doctrinale. Aimer quelqu’un, c’est aussi lui dire la vérité, et pas le conforter dans l’erreur.
Ebionites et Nazaréens
Passons aux ébionites qui semblent apparaître ensuite. Sont-ils une accentuation des idées de Cerinthe ou une authentique continuation de l’Eglise primitive dans sa version juive qui n’a pas voulu abandonner la loi, le débat est encore ouvert aujourd’hui. Le plus probable est tout de même une parenté ou une continuation de Cérinthe, tout en rejetant la partie gnostique qui n’existaient pas chez eux, car les ébionites voient Jésus comme un homme ordinaire, adopté comme Messie à son baptême dans le jourdain. Difficile de les classer dans le christianisme avec pareille croyance. Les ébionites sont souvent vu comme les premiers judéo chrétiens. Si un groupe peut légitimement revendiquer ce positionnement, c’est plutôt celui que les pères et spécialistes de la patrologie nomment les nazaréens, groupe distinct des ébionites. Les nazaréens sont décrits de cette façon par saint Jérôme : « ils croient que le Christ, fils de Dieu, est né de la Vierge Marie, et le tiennent pour celui qui a souffert sous Ponce Pilate et est monté au ciel, et en qui nous croyons aussi. Mais alors qu’ils prétendent être à la fois juifs et chrétiens, ils ne sont ni l’un ni l’autre ». Son témoignage est très intéressant, car à son époque, on commence à y voir plus clair entre juifs et chrétiens, et Jérôme voit bien que vouloir être ce groupe de jonction centrale, entre juifs et chrétiens est une illusion. Illusion qui nous renvoie encore une fois au terme de judéo-chrétien, qui est un concept fallacieux du point de vue théologique. Dans la pratique chrétienne, juif est devenu une identité familiale, mais sans plus. Dans la pratique rabbinique, juif est devenu consubstantiel de l’obligation de l’observance mosaïque. Ainsi les juifs s’accomplissant dans l’alliance en Christ pouvaient simplement et spontanément se mélanger, au travers d’unions matrimoniales auparavant peu ou pas acceptées au sein du peuple d’Israël. Ainsi, les juifs n’ont pas disparu à la faveur de massacres ou autres actes violents, mais ils ont disparu dans la vision rabbinique à la faveur d’une assimilation simple et naturelle. Il ne pouvait donc pas y avoir trois groupes historiques, mais simplement deux. Cette volonté nazaréenne de perdurer ne peut pas s’inscrire dans la durée. Dans le cadre du christianisme primitif, les juifs devenus disciples du Christ se sont fondus naturellement dans l’Église universelle.

Canon 29 du concile de Laodicée et condamnation de la pratique mosaïque
Du côté de l’Eglise, plusieurs signaux tout à fait clairs ont été envoyés à ceux tentés par le torahisme sous toutes ses variantes. Par exemple, au quatrième siècle, le concile de Laodicée proclame dans son canon 29 : « Les chrétiens ne doivent pas judaïser et garder le repos du sabbat, mais travailler ce jour-là; ils préféreront garder le repos, si possible, le jour du Seigneur, en leur qualité de chrétiens. S’ils persistent à judaïser, qu’ils soient anathème auprès du Christ. ». Cette condamnation de la loi mosaïque est très intéressante historiquement et théologiquement, car dans l’absolu, si un chrétien tient à se reposer deux fois plus, au final, quel mal y a-t-il à cela ? Et bien ici, ce que font les pères de Laodicée est de première importance : ils essaient de préserver toute personne d’une fausse idée du salut. Souvent ceux qui vont judaïser vont entrer, comme les juifs, dans une vision transactionnelle du salut. Je fais mon shabbat donc Dieu doit me sauver. Elle est inconsciente bien sûr, la plupart du temps, mais si on réfléchit à la chose, c’est ça. Or, c’est le Christ, en croix, gratuitement qui nous offre le salut. Et rien d’autre. C’est un canon très paulinien au final. Si le Christ a tout fait mais que je doive encore faire quelque chose, est-ce que le Christ a tout fait ? pourquoi devrais-je ajouter quoi que ce soit à l’œuvre de salut du Christ ? Ainsi, de façon très forte et très solennelle, le canon enseigne que la croix suffit. Certains vont arguer simplement qu’ils n’y vont pas pour le salut, mais par obéissance. Nous allons voir ça plus loin dans le développement de ce billet. Voilà donc pour les premiers torahistes de l’histoire. Les torahistes vont souvent s’imaginer une parenté avec eux, mais cette parenté n’est qu’intellectuelle dans l’hérésie. Il n’y a aucune continuité historique des mouvements nazaréens, ébionites, ou issus de Cérinthe aujourd’hui. Juste des égarés qui tombent dans les mêmes ornières. Juste des gens, qui tout au long de l’histoire, font les mêmes erreurs parce qu’ils n’écoutent pas l’enseignement de l’Eglise. Ces groupes ne sont pas des descendants directs mais des reproductions modernes de modèles anciens d’hérésie, avec des ressemblances frappantes.
Qu’est-ce que la Torah ?
Comme cela est le plus grand point de divergence, il me faut commencer à répondre à cette question : qu’est-ce que la Torah ? Lorsque l’Ecriture parle d’elle-même, elle nous dit ceci :
« Or, tout ce qui a été écrit d’avance l’a été pour notre instruction, afin que, par la patience, et par la consolation que donnent les Écritures, nous possédions l’espérance. » (Rm 15:4) et
« Toute Écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit accompli et propre à toute bonne œuvre. » (2 Tm 3:16-17).
La jewish encyclopedia consultable en ligne, déclare à propos de la Torah : « La Torah tire son nom de son contenu, le nom lui-même ayant une connotation de « doctrine ». Les Juifs hellénistiques, cependant, la traduisirent par νόμος = « loi » (par exemple, dans la LXX, le prologue d’Ecclésiaste, chez Philon, Josèphe et dans le Nouveau Testament), d’où le terme « livre de lois » ; cela a donné lieu à l’impression erronée que la religion juive est purement légaliste, de sorte qu’elle est encore souvent désignée comme la religion de la loi. En réalité, cependant, la Torah contient des enseignements aussi bien que des lois, ces dernières étant même données sous une forme éthique et contenues dans des récits historiques à caractère éthique. ». La puissante communauté chabad américaine précise sur ses pages d’explications, je cite « traduire Torah par « loi » est une erreur, même si la Bible peut être considérée comme un livre contenant des lois et des instructions morales pour la vie. D’un autre côté, cet aspect de l’instruction – l’enseignement – est certainement fondamental dans la Torah ; sans lui, la Torah ne serait qu’une œuvre littéraire monumentale. ». On voit donc que le terme Torah lui-même est déjà piégé, car multiforme et polysémique. Les juifs hellénistiques ont eu bien raison d’introduire le terme pentateuque pour désigner les 5 livres de Moïse. En tout cas, la traduction actuelle qui me semble la plus intéressante est « instruction ». Les juifs l’utilisent parfois pour désigner toute la Bible juive, l’AT chrétien, et il faut avoir ceci à l’esprit lorsque l’on écoute quelqu’un utiliser le mot « torah ». Souvent « Torah » et « Loi de Moïse » sont interchangeables, même si techniquement, la Torah c’est le pentateuque, et la Loi de Moïse, ce sont l’ensemble des commandements, 613 selon les rabbins, issus de la Torah. Si vous entendez un torahiste parler, souvent il va dire « il faut garder la torah ». C’est un raccourci, pour lui, pour dire « il faut observer la Loi de Moïse ».
Paul écrit dans Gal 3:17 : « Voici ce que j’entends: une disposition, que Dieu a confirmée antérieurement, ne peut pas être annulée, et ainsi la promesse rendue vaine, par la loi survenue quatre cents trente ans plus tard. »
et nous invite donc à faire cette distinction subtile entre Torah et Loi de Moïse. La Loi de Moïse est une partie de la Torah, elle-même partie des Ecritures. Le but des Ecritures est de nous amener au Messie, Jésus de Nazareth. La Torah a été donnée par Dieu à l’homme, et elle est parfaite. On pourra tous se retrouver sur ce postulat car il est biblique : « Vous sondez les Écritures, parce que vous pensez avoir en elles la vie éternelle : ce sont elles qui rendent témoignage de moi. » (Jn 5:39)
Si on regarde les grands reproches que font les torahistes aux chrétiens sur l’observance, il y en a quatre : le respect du shabbat, le respect de la cacheroute, les fêtes bibliques et la circoncision. Nous ne sommes pas scrutés sur la partie morale ou sexuelle des lois. Bizarrement, les torahistes ne reprochent pas aux chrétiens de ne pas observer la torah sur les dispositions comme l’héritage, la peine de mort, la propriété, etc. Probablement considèrent-ils ces lois comme spécifiques à Israël, dans un espace et un temps donné, pour une période historique bien précise. C’est donc une distinction dont ils sont capables.

Tentative de résumé de la position torahiste
Lorsque vous écoutez un torahiste, généralement sa démonstration est la suivante : Dieu nous a donné sa Loi par l’intermédiaire de Moïse et a déclaré qu’elle est éternelle et ne changera jamais. Personne ne peut ajouter ou retrancher à ses commandements. Rien dans la Bible ne dit que la Loi mosaïque a pris fin. En fait, Yeshua a enseigné qu’aucun iota ou trait de lettre ne disparaîtrait de la Loi jusqu’à ce que le ciel et la terre disparaissent. Par conséquent, tous les chrétiens, qu’ils soient juifs ou non, sont « sous » ou « soumis » à toutes les lois que Dieu a données au Sinaï. Les chrétiens ne respectent pas cette Loi aujourd’hui parce que leur théologie a été corrompue dans les premiers siècles après Jésus-Christ. L’antisémitisme rampant a motivé les premiers dirigeants chrétiens, y compris l’empereur romain Constantin, à créer une fausse théologie destinée à séparer les croyants en Yeshua de la Torah. Lui et d’autres de son époque ont conspiré pour supprimer la « judéité » de la foi. En conséquence, la théologie héritée par les chrétiens d’aujourd’hui est fausse et a été construite sur une idéologie corrompue et raciste. Le christianisme qui observe la Torah gagne en popularité parce que les taux d’alphabétisation et l’accès à la Bible ont grimpé en flèche au cours des deux derniers siècles. Cela nous a permis de lire la vérité par nous-mêmes plutôt que de croire aveuglément ce que l’Église enseigne. Nous avons pris conscience de cette corruption historique et y réagissons en rejetant les faux enseignements gréco-romains de l’Église chrétienne et en revenant à ce que la Bible enseigne réellement. À savoir que Yéshoua, en tant que Machia’h, n’a pas changé la norme de l’obéissance divine. Au contraire, Il a confirmé les questions les plus importantes et les moins importantes de la Loi pour ceux qui ont mis leur foi en Lui. Quant à l’avenir, la Loi mosaïque gagnera en suprématie et en beauté à mesure que la fin des temps approche. Le livre de l’Apocalypse enseigne que ceux qui s’attachent fermement à Yéshoua et à la Loi de Moïse seront récompensés à la fin.
Voilà le résumé de l’argumentaire torahiste de base. Je le prends à l’ouvrage de Solberg « torahism : are christians required to keep the law of Moses ? », qui est l’auteur chrétien le plus avancé et averti sur le sujet. Je lui dois beaucoup pour cette vidéo, et qu’il en soit ici remercié.
Le Torahisme n’est pas biblique
Premièrement, l’approche torahiste n’est pas biblique. Nulle part, l’Ecriture postule que le chrétien est tenu à respecter la Loi de Moïse. L’Ecriture au contraire stipule bien que Dieu s’adresse au peuple issu de Jacob : « Le troisième mois après leur sortie du pays d’Égypte, les enfants d’Israël arrivèrent ce jour-là au désert de Sinaï. Étant partis de Rephidim, ils arrivèrent au désert de Sinaï, et ils campèrent dans le désert; Israël campa là, vis-à-vis de la montagne. Moïse monta vers Dieu: et l’Éternel l’appela du haut de la montagne, en disant: Tu parleras ainsi à la maison de Jacob, et tu diras aux enfants d’Israël: Vous avez vu ce que j’ai fait à l’Égypte, et comment je vous ai portés sur des ailes d’aigle et amenés vers moi. Maintenant, si vous écoutez ma voix, et si vous gardez mon alliance, vous m’appartiendrez entre tous les peuples, car toute la terre est à moi; vous serez pour moi un royaume de sacrificateurs et une nation sainte. Voilà les paroles que tu diras aux enfants d’Israël. » (Ex 19:1-6). Même en s’adressant aux enfants de Jacob, Paul dans son épître déclare : « En disant: une alliance nouvelle, il a déclaré la première ancienne; or, ce qui est ancien, ce qui a vieilli, est près de disparaître. » (Heb 8:13). Cette loi a joué un rôle transitoire jusque Christ : « Ainsi la loi a été comme un pédagogue pour nous conduire à Christ, afin que nous fussions justifiés par la foi. La foi étant venue, nous ne sommes plus sous ce pédagogue. » (Gal 3:24-25). Elle n’était que l’ombre des choses à venir : « Que personne donc ne vous juge au sujet du manger ou du boire, ou au sujet d’une fête, d’une nouvelle lune, ou des sabbats: c’était l’ombre des choses à venir, mais le corps est en Christ. » (Col 2:16-17).
Le Torahisme est un facteur de division
Deuxièmement, et bien qu’il pense bien faire, il est un facteur de division et de chaos. Alors que les torahistes ne cessent de répéter que les chrétiens vivent dans le péché parce qu’ils n’observent pas la loi, pourquoi n’ont-ils pas à l’esprit Pierre déclarant « Maintenant donc, pourquoi tentez-vous Dieu, en mettant sur le cou des disciples un joug que ni nos pères ni nous n’avons pu porter? » (Act 15:10). Alors que Paul enseigne que « le royaume de Dieu, ce n’est pas le manger et le boire, mais la justice, la paix et la joie, par le Saint Esprit. Ainsi donc, recherchons ce qui contribue à la paix et à l’édification mutuelle. » (Rm 14:17 et 19) les torahistes sont un danger pour les chrétiens peu ou pas formés qui vont venir apporter une division supplémentaire, dans un monde déjà suffisamment compliqué.
Le Torahisme amoindrit la Croix
Troisièmement, il porte atteinte à ce que Jésus a accompli. Et c’est peut-être ça le plus grave en terme de conséquences pour la personne. Si on remet le focus sur Moïse, c’est bien évidemment au détriment de notre Seigneur. Que devient ce que décrit Paul ici : « Si par l’offense d’un seul la mort a régné par lui seul, à plus forte raison ceux qui reçoivent l’abondance de la grâce et du don de la justice régneront-ils dans la vie par Jésus Christ lui seul. » (Rm 5:17). Demandez donc aux torahistes : si la Loi de Moïse demeure, mais concrètement, qu’est-ce qu’a accompli Jésus ? une question vieille comme l’Eglise : quel était le but de sa mort et de sa résurrection ? Il s’agit d’une question débattue dès les débuts de l’Église, notamment par Paul, Jacques et les Pères.

La Loi de Moïse n’est pas éternelle : réalité anthropologique et historique
Si l’on considère la Bible comme un ensemble, il y a quelque chose d’assez déroutant. D’un côté des passages qui laissent entendre que la Loi de Moïse est là pour toujours, du genre
« Et ces commandements, que je te donne aujourd’hui, seront dans ton cœur. Tu les inculqueras à tes enfants, et tu en parleras quand tu seras dans ta maison, quand tu iras en voyage, quand tu te coucheras et quand tu te lèveras. Tu les lieras comme un signe sur tes mains, et ils seront comme des fronteaux entre tes yeux. Tu les écriras sur les poteaux de ta maison et sur tes portes. » (Dt 6:6-9)
et en même temps Paul écrit que Jésus
« ayant anéanti par sa chair la loi des ordonnances dans ses prescriptions, afin de créer en lui-même avec les deux un seul homme nouveau, en établissant la paix, » (Eph 2:15) on se rend compte que cette loi n’est pas si éternelle que cela et que maintenant
« le péché n’aura point de pouvoir sur vous, puisque vous êtes, non sous la loi, mais sous la grâce. » (Rm 6:14).
Répondre au pourquoi de cette tension et l’expliciter clairement, demande un long détour explicatif. Tout d’abord on pourra tous facilement admettre que la Loi de Moïse est l’expression particulière, donnée à un moment de l’histoire humaine, en un lieu particulier à des gens particuliers, l’expression particulière donc d’un ensemble de principes qui eux ne sont jamais clairement explicités. Par exemple, le code pénal français prohibe et condamne le meurtre mais ne dit jamais que le meurtre est mauvais. Le principe est connu universellement, et il sous-tend les lois de toutes les civilisations humaines. Lorsque Dieu parle à Caïn et après le meurtre de son frère Abel, il n’y a d’argumentaire chez Caïn consistant à dire que Dieu n’a jamais expliqué que le meurtre était mauvais ou interdit. Ce principe était déjà inscrit dans le cœur des hommes. La Loi de Moïse est une déclinaison particulière de principes qui ne sont pas exprimés mais qui sont connus : il n’est pas bon de tuer, il n’est pas bon de voler, de mentir, de convoiter, etc. Tout le monde est bien conscient que les hébreux dans le désert n’avaient pas besoin qu’on le leur explique. Ils le savaient parfaitement. Les philosophes grecs ou les penseurs de l’extrême orient avaient énoncés les mêmes évidences dans les paradigmes de leur culture et de leur civilisation. Et c’est cela le point principal de la Loi de Moïse. Il faut la voir avant toute chose comme le code qui définit un peuple. Ce peuple ne se définit pas uniquement par son ancêtre Jacob-Israël, mais il se définit aussi et surtout par cette façon de vivre : les mâles sont circoncis, du vendredi au samedi soir la vie est organisée autour de Dieu et de la famille, le code alimentaire est très strict, etc. Il est difficile de donner une définition des éléments constitutifs d’un peuple. Généralement on parle de langue, de religion, de coutumes et pratiques, de territoire, de mémoire collective et d’histoire commune et acceptée, de lois et de normes sociales. Il y a quelque chose de très structurant et de beaucoup négligé dans la définition d’un peuple ; c’est la structuration familiale. Qui a autorité dans la cellule familiale, comment est gérée la transmission des biens familiaux, comment sont organisés et encadrés le mariage et la sexualité, quels mécanismes de solidarité familiale et de protection des plus faibles existent. Si vous considérez précisément la Loi de Moïse, elle structure et encadre le fonctionnement de la cellule familiale de façon très profonde. Dieu, par cette loi, a créé un peuple. C’est une évidence. Et il a créé ce peuple un peu de façon artificielle et autoritaire, en tout cas de façon très différente des autres peuples qui ont eu beaucoup plus de latitude pour s’organiser en tant que peuples. Donc, dans un monde comportant une multitude de peuples, Dieu a créé un peuple, distinct des autres peuples. La démarche des torahistes, de vouloir observer la Loi de Moïse aujourd’hui doit donc se comprendre comme quelque chose de potentiellement contradictoire avec leur propre identité nationale, et surtout aura pour conséquence de faire d’eux, des pseudos juifs, des cryptos juifs en fonction du degré de respect de cet engagement.
Dans la loi de Moïse, il y a le respect des grands principes universels, connus de tous les peuples, plus ou moins respectés selon les temps et les lieux, et il y a des choses très particulières. Ne pas tuer son prochain découle du respect d’un grand principe universel non exprimé mais connu. Ne pas manger tel ou tel aliment est d’une autre catégorie. Abraham ou Noé pouvaient manger ce qu’ils voulaient. Dieu n’avait pas fixé d’interdits alimentaires pour eux. Lorsqu’Abraham et Sarah reçoivent les anges qui leur annoncent la naissance d’Isaac, ils font un repas qui est interdit par la Loi de Moïse. Noé a déjà connaissance de catégories d’impureté et de pureté pour les animaux. Ainsi, l’on peut conclure qu’il y a une loi divine en terme de principes, et il y a ensuite, au cours de l’histoire diverses manifestations de cette loi divine première. Lorsque Paul écrit aux galates
« Ainsi la loi a été comme un pédagogue pour nous conduire à Christ, afin que nous fussions justifiés par la foi. La foi étant venue, nous ne sommes plus sous ce pédagogue. » (Gal 3:24-25) on peut paraphraser à propos de la Loi de Moïse : « L’expression mosaïque de la Loi de Dieu était notre gardienne jusqu’à la venue du Christ. Et maintenant que le Christ est venu, nous ne vivons plus selon cette expression, mais plutôt selon une Nouvelle Expression de la même Loi de Dieu. ». (Torahism – R.L. Solberg p 58).
La première grande disjonction avec les torahistes est ici. Ils considèrent que c’est l’expression transitoire de la loi qui est éternelle. C’est faux. C’est l’ensemble des principes de la Loi qui sont éternels. Dieu ne veut pas de meurtres ou de vols. C’est ensuite conjoncturel la façon dont il veut châtier ceux qui s’écartent de ces principes. Le chrétien ici va considérer qu’effectivement les principes soutenant la loi de Moïse sont divins et inchangés, mais qu’ils ont trouvé une expression nouvelle en Christ et que c’est cette expression nouvelle qu’il convient de suivre.

Prenons le principe de l’expiation. L’expiation se passe par du sang. C’est le principe divin, éternel, immuable. Lorsqu’Adam et Eve désobéissent et tombent dans la nudité spirituelle et physique, Dieu les recouvre de peaux d’animaux. Le sang des animaux a été versé pour compenser le péché humain. C’est la première expiation de la Bible. Lorsque les hébreux quittent l’Egypte, la nuit de Pâque, ils versent le sang d’un agneau, et ce sang les protège. L’agneau fournit le sang nécessaire au mécanisme universel d’expiation qui est dans cette loi divine immuable. Puis les juifs ont eu un aperçu plus précis du mécanisme d’expiation dans le Lévitique :
« Car l’âme de la chair est dans le sang. Je vous l’ai donné sur l’autel, afin qu’il servît d’expiation pour vos âmes, car c’est par l’âme que le sang fait l’expiation. » (Lev 17:11).
Les juifs vont donc devoir tuer des animaux pour expier leurs fautes. Et enfin, bien sûr, l’expiation ultime, absolue : le sang du Christ.
« Car si le sang des taureaux et des boucs, et la cendre d’une vache, répandue sur ceux qui sont souillés, sanctifient et procurent la pureté de la chair, combien plus le sang de Christ, qui, par un esprit éternel, s’est offert lui-même sans tache à Dieu, purifiera-t-il votre conscience des œuvres mortes, afin que vous serviez le Dieu vivant! » (Heb 9:13-14)
Que constate-t-on ici ? le mécanisme d’expiation est présent depuis toujours. Il s’est manifesté de façon différente au cours de l’histoire. Loi divine immuable et loi divine transitoire. Et on voit bien qu’à chaque fois il y a un progrès, une précision, une évolution qui est clairement une amélioration.
Démonstration philologique de la non éternité de la Loi de Moïse
Les torahistes me répondront que la Bible dit clairement que certains commandements de la Loi de Moïse sont déclarés éternels. Ainsi mes petits jeux avec les principes et les applications transitoires de ces principes peuvent s’entendre, mais jusqu’à un certain point. Si Moïse déclare un commandement comme éternel, cela devrait clore le débat. Ainsi Moïse, parle d’une loi perpétuelle :
« Ce sera pour vous une loi perpétuelle: il se fera une fois chaque année l’expiation pour les enfants d’Israël, à cause de leurs péchés. On fit ce que l’Éternel avait ordonné à Moïse. » (Lev 16:34).
Le mot qui est rendu par perpétuel dans cette traduction de Louis Segond est olam. C’est le mot strong 5769 : עוֹלָם. De nombreuses fois, olam veut dire éternel. Mais beaucoup de fois il ne veut pas dire éternel. Par exemple ici
« Moïse répondit au peuple: Ne craignez rien, restez en place, et regardez la délivrance que l’Éternel va vous accorder en ce jour; car les Égyptiens que vous voyez aujourd’hui, vous ne les verrez plus jamais. » (Ex 14:13).
Ici il n’y a pas de notion d’éternité puisque l’on parle du temps de vie fini des hébreux qui traversent la mer rouge. Il y a de nombreux versets où le mot est utilisé pour dire toujours ou jamais le temps d’une vie humaine, ce qui n’est pas l’éternité. Nous savons grâce au NT que la loi de Moïse a été abolie. Ainsi nous savons que ce olam signifie non pas « éternellement » mais plutôt « un temps très long ». Le grec de la LXX est en phase car le olam de ce verset est rendu par αἰώνιον qui peut signifier selon les cas « éternellement » mais aussi « pour un temps très long ». Vous pourrez relire Platon (dans le Timée) ou Saint Paul (Rm 16:25) qui l’utilise pour des périodes de temps très longs, mais pas éternelles. Ainsi on peut répondre aux torahistes que les textes ne sont pas si clairs, pas si évidents, pas si simples que cela.
Il faut d’ailleurs faire attention avec ces proclamations un peu hasardeuses d’éternité. Prenez ce verset : « et tu les oindras comme tu auras oint leur père, pour qu’ils soient à mon service dans le sacerdoce. Cette onction leur assurera à perpétuité le sacerdoce parmi leurs descendants. » (Ex 40:15). Louis Segond traduit de façon un peu imprudente que la prêtrise issue d’Aaron est éternelle. Encore le mot olam. Nous sommes bien placés, nous dans la modernité, pour savoir que la prêtrise aaronique s’est arrêtée brutalement en 70 de notre ère, lorsque l’empire romain en a décidé ainsi. Si vraiment, olam veut toujours dire « éternel », alors la Bible est fausse. Et donc tout le christianisme s’effondre. Le torahisme veut évidemment bien faire. Mais le torahisme est dangereux, car il donne du grain à moudre aux adversaires de Dieu.
Ainsi cette proclamation de l’éternité de la Loi est surtout péremptoire et philologiquement bancale. Les apôtres en Actes 15 avaient bien compris eux, emplis de l’Esprit Saint, et instruits par le Christ en personne pendant des mois, que la Loi de Moïse n’était pas éternelle, et qu’il était absurde d’en appliquer l’intégralité aux païens entrant dans l’Eglise.
Relisons un instant ce que Paul écrivait aux corinthiens qui étaient déjà soumis aux mensonges des torahistes de l’époque apostolique :
« Or, si le ministère de la mort, gravé avec des lettres sur des pierres, a été glorieux, au point que les fils d’Israël ne pouvaient fixer les regards sur le visage de Moïse, à cause de la gloire de son visage, bien que cette gloire fût passagère, combien le ministère de l’esprit ne sera-t-il pas plus glorieux! Si le ministère de la condamnation a été glorieux, le ministère de la justice est de beaucoup supérieur en gloire. Et, sous ce rapport, ce qui a été glorieux ne l’a point été, à cause de cette gloire qui lui est supérieure. En effet, si ce qui était passager a été glorieux, ce qui est permanent est bien plus glorieux. » (2 Co 3:7-11)
Ici Paul dit que la loi a été révoquée par quelque chose de supérieur. Il comprenait donc olam de façon un peu plus précise et exacte que les torahistes. Pour Paul la torah n’était pas éternelle. Lisons ce que Paul écrivait aux éphésiens :
« Mais maintenant, en Jésus Christ, vous qui étiez jadis éloignés, vous avez été rapprochés par le sang de Christ. Car il est notre paix, lui qui des deux n’en a fait qu’un, et qui a renversé le mur de séparation, l’inimitié, ayant anéanti par sa chair la loi des ordonnances dans ses prescriptions, afin de créer en lui-même avec les deux un seul homme nouveau, en établissant la paix, et de les réconcilier, l’un et l’autre en un seul corps, avec Dieu par la croix, en détruisant par elle l’inimitié. » (Eph 2:13-16).
Cette inimitié, cette séparation avait été voulue par Dieu de façon temporaire. Dieu a constitué Israël comme peuple saint à travers cette loi. Le but du christianisme n’était certainement pas de faire de toutes les nations des juifs qui observent la loi. Nulle part il n’est écrit cette ambition dans le NT. La Loi avait créé un mur symbolique entre les nations et Israël. Ce mur symbolique était même devenu physique dans le Temple de Jérusalem. Il y avait un espace réservé aux païens, séparé des autres par un mur. Paul fait vraisemblablement référence à ce mur. Ce mur, que le Christ est venu abattre, est aujourd’hui en partie rebâti, non sans zèle sincère, mais néanmoins mal orienté. Qui amène des divisions dans les familles chrétiennes en déclarant ne plus vouloir fêter Noël ou Pâques ? Qui amène des divisions dans des paroisses établies en disant que nous vivons dans le péché parce que nous n’observons pas la Loi de Moïse ???
Le Christianisme et la Loi de Moïse : nouveaux commandements, nouvelle alliance
Il y a une dynamique biblique que les torahistes ont bien saisi par contre, c’est le respect de Jésus pour la Torah. Souvent, les chrétiens mal catéchisés imaginent que Jésus a violé la Loi de Moïse, manifestant ainsi une ère de liberté centrée uniquement sur l’amour. Cette vision naïve, en plus d’être fausse, est très dangereuse théologiquement : si jamais Jésus n’a pas respecté toute la loi, alors il est techniquement pécheur. Et s’il est pécheur, il ne peut pas être Messie. Du fait que Jésus n’a jamais violé la loi, les torahistes déduisent que Jésus n’a jamais ajouté un commandement à celle-ci. En effet, la loi elle-même déclare ceci impossible :
« Vous n’ajouterez rien à ce que je vous prescris, et vous n’en retrancherez rien; mais vous observerez les commandements de l’Éternel, votre Dieu, tels que je vous les prescris. » (Dt 4:2).
Et comme Jésus déclare apporter de nouveaux commandements, cela démontre avec la plus grande certitude que ces commandements nouveaux font partie d’une alliance nouvelle. Nouvelle actualisation des immuables principes que Dieu veut insuffler à l’humanité. Prenons un exemple célèbre :
« Je vous donne un commandement nouveau: Aimez-vous les uns les autres; comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. » (Jn 13:34).
Ce nouveau commandement pourra sonner tout de même très ancien, puisque le Lévitique l’avait déjà : « Tu ne te vengeras point, et tu ne garderas point de rancune contre les enfants de ton peuple. Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Je suis l’Éternel. » (Lv 19:18).
En quoi donc ce commandement est-il nouveau ? Et bien c’est l’intensité qui est nouvelle. Il nous est demandé d’aimer comme le Christ nous a aimé. De façon absolue et sacrificielle si besoin est. Ce contraste entre l’ancien de la Loi et la nouveauté de l’alliance en Christ est particulièrement apparent dans le sermon sur la montagne : « Vous avez appris qu’il a été dit: œil pour œil, et dent pour dent. Mais moi, je vous dis de ne pas résister au méchant. Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l’autre. Si quelqu’un veut plaider contre toi, et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau. Si quelqu’un te force à faire un mille, fais-en deux avec lui. Donne à celui qui te demande, et ne te détourne pas de celui qui veut emprunter de toi. ». Le fait de baptiser toutes les nations, et qui plus est de les baptiser au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit est indubitablement nouveau. Nulle part la Loi de Moïse ne demande une immersion rituelle dans le monde entier. Cette ouverture aux païens est bien différente de la Loi tournée exclusivement vers les enfants de Jacob.
Cette fausse doctrine de l’éternité de la Torah se heurte donc à un autre problème de taille : les nouveaux commandements de Jésus sont l’éclatante preuve qu’une nouvelle alliance se met en place.