Le troisième concile oecuménique

Le concile de Carthage entérine l’appel à Rome édicté à Sardique

Pendant que la controverse pélagienne faisait rage, un problème canonique intéressant historiquement eut lieu en Afrique. On se souvient comment le concile de Sardique avait considéré la possibilité d’appels canoniques à Rome, en terme d’arbitrage. L’Afrique voyait les choses bien différemment, puisqu’en concile, les évêques africains avaient interdit aux diacres et aux prêtres de faire un appel à un arbitrage étranger « dans un tribunal d’outre-mer ». Ceci est mentionné dans le canon 17 du concile de 418. Précisons d’ailleurs pour la technicité canonique, que le canon ne disait rien des évêques. Ainsi, il s’agissait pour les diacres et prêtres africains de régler leurs problèmes avec les évêques proches. On pourra également remarquer, que ce canon à lui seul, sert à désamorcer tous les discours papistes.

C’est en prenant connaissance de l’existence de ce canon qu’a éclaté l’affaire du prêtre Apiarius de Sicca. Celui-ci avait été déposé par son évêque, Urbain de Sicca, un disciple de saint Augustin. Apiarius avait fait appel de cette déposition auprès du pape Zosime à Rome, et Zosime avait donné raison à Apiarius. Il avait même menacé l’évêque Urbain de le déposer s’il ne réintégrait pas Apiarius. Les évêques africains réagirent très négativement à ce qu’ils ont dû considérer comme une intrusion canonique.

Zosime envoya des légats à Carthage et fit état des canons du concile de Sardique, qui montrait que le pape pouvait être pris pour arbitrer un sujet comme celui de ce prêtre. Fait intéressant : les évêques africains géraient leurs églises avec les canons de Nicée mais ne possédaient aucun recueil canonique qui montrait un quelconque canon de Sardique. Zosime mourut brusquement à la fin de 418 et c’est Boniface qui lui succéda. Les légats du pape étaient restés tout l’hiver, et un courrier de Boniface fait état de relations tout à fait cordiales. Les évêques africains se réunirent à Carthage en 419 pour le 16ème concile de Carthage. Ils établirent une enquête à propos de ces canons inconnus. La conclusion a dû être bonne puisque le fameux canon 17 fut modifié de façon à ne plus interdire la possibilité d’appel au pape. Et pour l’anecdote, Urbain avait pardonné à Apiarius repentant et levé l’excommunication, mais celui-ci ne pouvait plus exercer à Sicca. Il pouvait exercer partout mais pas là-bas. C’est à Alexandrie, que Carthage demandera une copie complète des recueils canoniques afin de se mettre à jour. Saint Cyrille, patriarche d’Alexandrie à cette époque leur envoya une copie complète de tous ses recueils.

Cyrille, un patriarche d’Alexandrie sans concessions

Puisque nous évoquons saint Cyrille d’Alexandrie, il nous faut rapporter les conditions de son accession au trône patriarcal d’Alexandrie. Théophile, celui qui avait réussi à exiler saint Jean Chrysostome, était mort en 412. Cyrille est en fait le neveu de Théophile. Il est soutenu par le pouvoir civil dans cette élection. A peine nommé patriarche, il profite de ce support civil pour fermer les églises des novatiens et saisit leurs biens. Cyrille avait assisté comme prêtre au pseudo concile ourdi par son oncle pour perdre Chrysostome. Il s’y tiendra longtemps, refusant de réintégrer Chrysostome dans les dyptiques, mais il citera l’immense docteur à Nestorius, dans les exemples passés sur son trône, exemples qui auraient dû l’inspirer. Ses premiers adversaires furent les juifs d’Alexandrie. On se souvient que la communauté juive d’Alexandrie était nombreuse et puissante avant le Christ. Certaines personnes du quartier juif s’abandonnèrent à des provocations de façon régulière, dans leurs fêtes principales. En 415, il y eut des affrontements physiques entre juifs et chrétiens, à l’instigation des juifs. Cyrille organisa la riposte et le quartier juif fut attaqué par les chrétiens. On peut dénombrer pillage et incendie d’après les récits historiques. Le récit qui avait échauffé le parti chrétien était le crime d’Immestar en Syrie, où pour figurer un ennemi des juifs (probablement lors de la fête de Pourim et donc le récit du livre d’Esther où l’ennemi n’est bien évidemment pas chrétien), les juifs avaient placé un enfant chrétien sur une croix et celui-ci était mort à cause de mauvais traitements. Jusqu’ici, les empereurs romains leur avait laissé une liberté de culte absolue. Lorsque les empereurs étaient païens et hostiles aux chrétiens, les juifs n’étaient pas neutres, et les historiens de l’Eglise ont de nombreux exemples de juifs persécuteurs. Le Père Guettée écrit « sous les empereurs païens, ils se trouvaient toujours mêlés aux plus féroces persécuteurs du christianisme ». Les juifs aujourd’hui, qui estiment souvent avoir incarné le rôle de la victime pendant 2000 ans, en miroir d’un christianisme persécuteur, doivent apprendre à considérer ce temps long, et cette histoire, si nous voulons parler en dehors des fantasmes et des représentations archétypales. Revenons-en à Cyrille. Le préfet Oreste condamna son attitude et de nombreux chrétiens crurent que le préfet en voulait à la vie du patriarche. Ammonius, un moine égyptien conduisit une attaque bien maladroite et naïve contre Oreste qui le fit arrêter et torturer pour avoir le nom de ses complices. Il espérait probablement qu’Ammonius prononça le nom de Cyrille. Mais Ammonius mourut sans rien dire et Cyrille fit son éloge funèbre comme à un martyr de la foi.

Puis le trône de Constantinople devint vacant et c’est le fameux Nestorius, prêtre antiochien qui fut élu patriarche. L’arianisme ne pouvait plus être défendu ouvertement comme auparavant. Ceux qui voulaient se distancier avec les dogmes chrétiens devaient utiliser de nouvelles approches. Déjà Julien l’apostat presque 50 auparavant se moquait des chrétiens car ils nommaiznt Marie « Mère de Dieu ». Donc cette appellation de Theotokos était bien antérieure au concile d’Ephèse qui lui donnera solennellement ce titre. Le Père Guettée rappelle : « Les chrétiens ne donnaient pas à ce titre le sens que Julien critiquait; ils ne croyaient pas que la Vierge eût été mère de la divinité. Ils entendaient seulement que la personne du Christ étant divine, et les deux natures étant unies dans une même personnalité, on devait appeler Marie, mère de la personne divine du Christ, puisqu’elle était mère de la nature humaine, unie hypostatiquement ou personnellement à la nature divine. Tel était le sens du titre de mère de Dieu. » (p 309). Ce titre de Theotokos posait en fait la question suivante : comment donc étaient unies les natures divines et humaines dans la personne du Christ ? La condamnation des docètes (et donc la défense de l’humanité du Christ) et la condamnation des ébionites ou des ariens (et donc la défense de sa divinité) n’était pas une explication en soi. C’était une indication de ce que la vérité n’était pas. Pas une indication de ce qu’elle était. Les formulations patristiques étaient vagues. Saint Ignace avait dit σαρχοφόρος (porteur de corps si on décompose le mot littéralement). Tertullien en latin expliquait qu’il avait revêtu l’humanité (carne est indutus) et non pas caro factus, pour ne pas faire croire à une transformation. Origène, Irénée ou Méthode parlent de mélange. Avant que l’Eglise ne se prononce officiellement, Appolinaire avait proposé une réponse qui sera jugée hérétique. Il avait appliqué des principes trinitaires sur le plan christologique. Il affirmait que si l’homme est corps-âme-esprit, alors on peut appliquer cela au Christ de la façon suivante : corps – âme – Logos, le logos remplaçant le pneuma, l’esprit humain. Il disait, si jamais le Christ avait eu un esprit humain, alors il aurait été libre ce qui hypothèquerait théoriquement notre rédemption. En effet, Appolinaire voyait l’être humain très changeant, et il était sotériologique pour lui de nier au Christ l’existence de son pneuma d’homme. Appolinaire avait été condamné par saint Athanase, saint Grégoire de Nysse, saint Grégoire de Nazianze et saint Epiphane. Il était donc clair qu’en Christ résidaient les deux natures, de façon inaltérées. Mais c’est leur mode d’être en Christ qui commença à faire débat. Est-ce que le Christ était une seule personne, ou bien deux personnes distinctes ? S’il n’était qu’une personne, Christ était le vrai fils de Dieu, et il n’y avait pas de débat. Mais s’il y avait deux personnes en Christ, seule la personne divine était le Fils de Dieu.

Historiquement, le premier à s’être élevé contre cette appellation de Theotokos (Déipare dans une dénomination plus latine) semble être Théodore de Mopsueste. Puisqu’il résolvait le problème de la coexistence des deux natures en Christ en y conceptualisant deux personnes, il était évident que Marie devenait Mère uniquement de la personne humaine du Christ, réceptacle de la nature humaine intégrale. Il écrivait par exemple : « ce n’est pas Dieu, mais bien le temple dans lequel Dieu a habité, qui est né de Marie ». Nestorius fut un disciple de Théodore de Mopsueste. Il était le responsable en chef de la catéchèse à Antioche, et donc connu de nombreuses personnes, et renommé pour son éloquence. Constantinople en l’élisant imaginait probablement un nouveau Chrysostome aux prêches flamboyants. Dans une de ses première homélies, il invective ainsi Théodose II : « Donne-moi, ô Empereur, la terre délivrée des hérétiques et en retour je te donnerai le ciel ; aide-moi à combattre les hérétiques et je t’aiderai à combattre les perses ». Et effectivement, à peine monté sur le trône en 428, il réprime durement les ariens, les novatiens, les macédoniens, les quarto-décimains. Première chose qui a dû mettre la puce à l’oreille des orthodoxes : il se veut accueillant avec les pélagiens. Il donna asile à Célestius et Julien d’Eclane, deux pélagiens notoires et importants pour cette hérésie. Marius Mercator, fin connaisseur du pélagianisme, dont j’ai parlé précédemment, protesta, lorsqu’il découvrit la situation de bienveillance à Constantinople. L’empereur lui fit quitter la ville. Nestorius n’avait pas cédé ici à une amitié personnelle, mais il avait de plus, très probablement, une doctrine pélagienne de la grâce.

Nestorius monte sur le trône de Constantinople

Puis vint le scandale qui allait faire entrer Nestorius dans l’histoire. Anastase, un prêtre antiochien, venu avec Nestorius à Constantinople tint ce discours, devant le peuple médusé : « gardez-vous bien de donner à la Sainte Vierge le titre de Theotokos. Marie était une créature humaine et le créateur n’a pas pu naître de la créature ». Le Père Guettée précise : « Cette doctrine était diamétralement opposée à la foi des fidèles et a l’enseignement ancien qu’on leur avait donné. On ne croyait pas, dans l’ancienne Église, que la créature eût donné naissance au créateur; mais on croyait que le Christ était une personne divine, que Marie, en donnant naissance au Christ, était mère de la personne divine et qu’en ce sens, on pouvait l’appeler, non pas mère de la Divinité, mais mère de Dieu. L’assertion d’Anastase excita une grande rumeur dans l’auditoire, au point que Nestorius se crut obligé de prendre la parole. Il affirma que son Syncèle avait raison, et que Marie devait être appelée Anthropotokos (mère de l’homme) et non pas mère de Dieu. » (p 311). Il exprima son hérésie dans une lettre à Jean d’Antioche, expliquant qu’il avait trouvé une partie des gens voulant nommer Marie « Mère de Dieu » et les autres « Mère de l’homme ». Il avait donc proposé « Mère du Christ » pour favoriser la paix. Il commence alors tout un cycle d’homélies, où il accuse ses prédécesseurs de ne pas avoir bien catéchisé le peuple à ce propos. Le trouble se répandit dans toute la ville. Il prit de nouveau la parole à ce sujet, lors de la fête de Noël 429 et déclara : « J’ai été informé, dit-il, que plusieurs d’entre vous désirent apprendre de moi s’il faut appeler Marie, mère de Dieu ou mère de l’homme. Voici ma réponse : c’est renouveler l’erreur des païens que de donner une mère à Dieu ; la Vierge Marie a enfanté l’homme auquel le Verbe s’est uni ; l’homme a été le vase dans lequel la divinité s’est renfermée ; a été le vêtement dont elle s’est couverte. J’adore le vase pour ce qu’il contient; le vêtement pour ce qu’il couvre ; j’adore ce qui paraît à cause du Dieu caché que je n’en sépare pas. ». La confusion entre divinité et personne divine est ici assez évidente.

Il commence à répandre son hérésie

Des moines et des prêtres commencèrent à protester. Nestorius les fit fouetter et emprisonner. La providence avait voulu que Proclus, évêque de Cyzique résidait à Constantinople quand éclata cette crise. Le clergé de la ville se tourna vers lui pour qu’il réfute les erreurs du patriarche. Proclus tint un discours en présence de Nestorius, soulevant les applaudissements de l’auditoire. Les arguments de Proclus étaient orthodoxes. Il mettait l’accent sur plusieurs points de bon sens : s’il y a un Christ homme et un Christ Dieu, lequel est mort ? lequel donne la vie par-delà la résurrection ? Nestorius ne pouvant répondre sur le fond, commença une persécution plus importante. Il était aidé en cela par une cour impériale, manipulée par ses sophismes qui était devenue nestorienne. Mais à l’intérieur de la cour, celles qu’on appelle les Vierges-Reines, les sœurs de l’empereur, bien formées théologiquement, considéraient à juste titre Nestorius comme un hérétique. Sa plus grande ennemie serait certainement Sainte Pulchérie, très influente sœur de l’empereur Théodose II. Elle est la fille de la fameuse Eudoxie qui avait affronté saint Jean Chrysostome. Nestorius, fort de ce soutien impérial, fit publier ses sermons partout, et donc en Egypte, et c’est là que Cyrille d’Alexandrie prit connaissance de sa doctrine hérétique. En tant que patriarche d’Alexandrie, il était chargé, selon les canons et les usages, d’annoncer la date de Pâque à toutes les églises. Il accompagnait toujours cette date d’un discours pascal. La lettre pascale de Cyrille fit une forte impression sur Nestorius, car il était réfuté sans être nommé. Puis dans un second temps, Cyrille envoya une lettre à Nestorius directement de façon à demander une explication officielle. Il utilisait le procédé rhétorique suivant assez classique : je ne peux pas croire ce que l’on dit de vous, je ne peux pas croire que vous êtes à l’origine de cette doctrine dont on vous accuse, etc.

Rome condamne officiellement Nestorius et charge Cyrille de la lutte pour l’Orthodoxie



Rome également, ayant reçu quelques sermons de Nestorius était troublée. Célestin, qui avait succédé à Boniface voulait s’assurer que Constantinople professait l’hérésie et voulut se coordonner avec Alexandrie dans cette démarche. Cyrille se sentait probablement visé directement car Nestorius avait envoyé des émissaires jusque dans le désert égyptien pour convertir les moines à sa doctrine. Cyrille prend la plume et rappelle aux moines qu’Athanase, le champion de l’orthodoxie du siècle précédent avait utilisé l’expression « Mère de Dieu ». C’est la fameuse « lettre aux solitaires ». Nestorius envoie une lettre à Célestin où il étale sa doctrine. Ceci conduira Célestin, malgré les réserves qu’il pouvait avoir sur la personnalité de Cyrille, à ne pas s’unir avec Nestorius. Cyrille, endosse alors un rôle qui sied à son caractère : il devient le champion de l’orthodoxie, comme Athanase en son temps. Nestorius et Cyrille s’affrontent par lettres, où chacun déploie ses arguments. Cyrille décide alors de s’adresser à l’empereur et aux deux princesses de la famille impériale, Eudoxie et Pulchérie, la femme et la sœur de l’empereur. Cyrille adressa également des courriers à nombre d’évêques. Nestorius avait l’empereur de son côté. Cyrille avait Eudoxie et Pulchérie, ainsi que nombre d’évêques.

Rome ne resta pas les bras croisé. En 430, Célestin fit traduire toutes les homélies de Nestorius qui étaient à sa disposition, par le diacre Léon, qui deviendrait plus tard évêque, et par Jean Cassien, versé dans le grec et le latin. Jean Cassien était un ancien disciple de Chrysostome. Rome fit donc condamner Nestorius par un concile local en date du 11 août. La décision fut envoyée à Cyrille bien entendu, mais aussi à Jean d’Antioche, Juvénal de Jérusalem, ainsi qu’à d’autres évêques. La décision de Rome était la suivante : Nestorius avait un délai de 10 jours pour se rétracter après notification du jugement. Rome assurait tous les gens excommuniés par Nestorius de la pleine communion avec le grand siège d’occident. De plus Célestin chargeait Cyrille de le représenter à Constantinople, auprès de l’empereur et de Nestorius. Jean d’Antioche, ami d’enfance de Nestorius, essaya de trouver une conciliation bien fragile, en proposant d’utiliser le terme Theotokos, puisqu’il était traditionnel. Mais Nestorius refusa.


Les 12 anathèmes de Cyrille contre Nestorius

Cyrille organisa également un concile à Alexandrie, peut-être pour prévenir le cas où la sanction romaine ne serait pas suivie d’exécution. Cyrille y réitère la demande d’abjuration de Célestin. Il précise que signer le symbole de Nicée ne serait pas suffisant, mais qu’il était attendu de lui une confession manuscrite qui précise sans ambiguïté les points de doctrine abandonnés. C’est lors de ce concile que furent rédigés les fameux 12 anathèmes de Cyrille contre Nestorius. Les voici :

  • Anathème 1 : quiconque ne reconnait pas que l’Emmanuel est véritablement Dieu et que, par suite, la sainte Vierge est Mère de Dieu, parce qu’elle a donné naissance, selon la chair, au Logos incarné de Dieu le Père, qu’il soit anathème.
  • Anathème 2 : quiconque ne confesse pas que le Logos de Dieu le Père est uni hypostatiquement avec la chair et est un seul Christ avec sa propre chair lui-même homme et Dieu tout ensemble, qu’il soit anathème.
  • Anathème 3 : si quelqu’un dans le Christ un, divise les hypostases après l’union, les associant par une simple association de dignité ou d’autorité et de puissance au lieu d’admettre entre elles une union physique, qu’il soit anathème.
  • Anathème 4 : si quelqu’un divise entre deux personnes ou hypostases les expressions employées au sujet du Christ dans les écrits évangéliques et apostoliques ou par les saints ou par le Christ lui-même, attribuant les unes à l’homme considéré à part du Logos de Dieu le Père et les autres au seul Logos de Dieu le Père, qu’il soit anathème.
  • Anathème 5 : quiconque ose dire que le Christ est un homme théophore, au lieu de dire qu’il est vrai Dieu, qu’il est Fils un et par nature même en tant que Logos fait chair et participant comme nous au sang et à la chair, qu’il soit anathème.
  • Anathème 6 : quiconque ose dire que le Logos de Dieu le Père est le Dieu et le maître au lieu de reconnaître que le Christ lui-même est tout à la fois Dieu et homme, puisque, conformément à la Sainte Ecriture, le Logos s’est fait chair, qu’il soit anathème.
  • Anathème 7 : quiconque affirme que Jésus est mû comme un homme distinct par Dieu le Logos et que la gloire du Fils unique lui a été surajoutée comme à quelqu’un distinct du Fils unique, qu’il soit anathème.
  • Anathème 8 : si quelqu’un ose dire que l’homme pris par le Verbe doit être coadoré et coglorifié et conommé Dieu avec le Dieu Logos, comme un autre avec un autre, au lieu d’honorer l’Emmanuel d’une seule adoration et de lui accorder une seule glorification en tant que Logos fait chair, qu’il soit anathème.
  • Anathème 9 : quiconque dit que l’unique Seigneur Jésus-Christ est glorifié par l’Esprit, que se servant de la puissance du Saint-Esprit il se sert d’une puissance étrangère et qu’il a reçu de l’Esprit la puissance sur les mauvais démons et celle de faire des miracles en faveur des hommes, au lieu de reconnaître son propre esprit dans celui qui a fait des miracles, qu’il soit anathème.
  • Anathème 10 : la Sainte Ecriture dit que le Christ est devenu le pontife et l’apôtre de notre confession, et qu’il s’est offert pour nous en odeur de suavité à Dieu le Père. Si donc quelqu’un dit que notre pontife et notre apôtre n’est pas le Logos de Dieu lui-même, fait chair et homme comme nous ; mais un autre distinct de Lui, homme né de la femme ; ou bien si quelqu’un dit qu’Il offre le sacrifice pour lui-même et non pas pour nous seuls (celui-là n’a pas besoin d’offrir le sacrifice, qui n’a pas connu le péché), qu’il soit anathème.
  • Anathème 11 : quiconque ne confesse pas que la chair du Seigneur donne la vie et qu’elle est la propre chair du Logos divin, mais prétend qu’elle appartient à un autre que lui, qui ne lui est uni que par la divinité et qui a servi de demeure à la divinité ; au lieu de déclarer, ainsi que nous le faisons, que cette chair donne la vie, parce qu’elle est la propre chair du Logos qui a la puissance de donner la vie à tout, qu’il soit anathème.
  • Anathème 12 : quiconque ne confesse pas que le Logos de Dieu a souffert dans sa chair, a été crucifié dans sa chair, a dans sa chair goûté la mort, et est devenu le premier né d’entre les morts ; lui qui est en vie et qui donne la vie comme Dieu, qu’il soit anathème.

La réaction de Nestorius

La délégation de Cyrille remit le document à Nestorius le 7 décembre 430. Le 13 décembre Nestorius prit la parole en ces termes : « pourquoi donc, moi qui n’aime que la paix, suis-je assailli dans le sanctuaire de ma basilique par un ennemi implacable ? Oui, l’égyptien me met au défi jusqu’au milieu de mes prêtres, jusqu’à la face de mon troupeau. Il répand la calomnie, il sème la discorde et m’attaque avec des flèches d’or. L’union, la prospérité de cette église le blessent ; ce spectacle lui arrache de cruels rugissements ; Il le hait car il a besoin de trouble, il a besoin de division pour dominer. L’égyptien n’est-il pas un éternel ennemi d’Antioche et de Constantinople ? On me fait un procès sur le seul mot Theotokos. Et bien ce mot, je suis prêt à le concéder pour le seul amour de la paix ; je l’admettrai à condition qu’on ne voudra faire de moi ni un arien, ni un appolinariste ; un arien en me faisant rabaisser le Verbe divin jusqu’à n’être qu’une créature, un appolinariste en me forçant à nier l’humanité du fils de Marie. Il y a cependant une qualification qui couperait court à tous les malentendus et que je propose d’adopter : celle de Christotokos ; ce serait le remède à toutes nos discordes. Oh ! que l’égyptien en personne vienne en ce lieu. Je ne le crains pas ; qu’il vienne discuter avec moi en présence de l’empereur et des impératrices et je saurai mettre à néant sa témérité. C’est la maladie des égyptiens de porter la maladie en tous lieux ; mais qu’ils sachent qu’on ne les redoute pas, et que leur violence ne s’étalera pas impunément dans la cité illustre, protégée par la majesté des princes. ». Le peuple lui demanda plus de clarté. Il ajouta donc à son sermon dominical : « oui, je reconnais que la vierge Marie est la Mère de Dieu et mère de l’homme. Elle est mère de Dieu parce que le temple de Dieu qui est son Fils Jésus, a été uni avec la divinité. On peut donc à mon avis lui attribuer légitimement le titre de Theotokos ». Cette souplesse de Nestorius dura peu. Il publia 12 anathèmes contre Cyrille, le proclamant hérétique. Ses anathèmes répondaient point par point aux anathème de Cyrille. Nestorius ne fut pas le seul à lutter contre les anathèmes de Cyrille. Théodoret de Cyr et André, l’évêque de Samosate considérèrent que Cyrille était appolinarien et l’attaquèrent sous cet angle. Jean, le patriarche d’Antioche attaqua spécifiquement le troisième anathème. On reprochait à Cyrille de ne considérer en Christ qu’une seule nature. Mais il reprenait ici une expression déjà présente chez saint Athanase.