L’iconoclasme n’est pas seulement une opinion théologique hérétique, à savoir le fait qu’il est idolâtre de vénérer une icône. L’iconoclasme n’est pas seulement le phénomène historique qu’a connu l’empire byzantin aux 8ème et 9ème siècles. L’iconoclasme a aussi une facette active et violente. Et l’iconoclasme n’a pas touché que Byzance, mais aussi la France : la réforme protestante et la révolution française sont les deux phénomènes majeurs iconoclastes qui concernent la France.

En quoi l’iconoclasme n’est-il pas uniquement intellectuel et du domaine des idées ? Parce qu’une constante historique vaut d’être remarquée : l’iconoclasme s’accompagne toujours de destructions physiques, de violences contre les personnes vénérant des supports de sainteté, et contre ces supports de sainteté eux-mêmes. L’iconoclasme byzantin était surtout dirigé contre les icônes. Il ne me semble pas qu’il y ait de mention contre les reliques des saints. Nous dirons qu’il s’agit d’un iconoclasme éduqué et savant, là où le calvinisme est grossier et simpliste. Il n’en est pas moins violent. On peut distinguer deux phases dans l’iconoclasme byzantin. Le premier est dû à l’empereur Léon III et la crise va de 730 à 787, date du second concile de Nicée. Une seconde crise iconoclaste est due à l’empereur Léon V et la crise va de 813 à 843. La fin de cette seconde et dernière crise est aujourd’hui solennisée dans une des fêtes du cycle Pascal : le Dimanche de l’Orthodoxie, et ce triomphe est dû à l’impératrice Théodora. Le synaxaire byzantin comporte des récits de destructions d’icônes, de persécutions et d’exécutions à l’encontre des iconodules (partisans des icônes). Ainsi, l’iconoclasme n’est pas uniquement une spéculation erronée. C’est aussi une persécution.



Les deux iconoclasmes ayant touchés la France se distinguent également par cette violence. Les protestants lors des guerres de religion, et les révolutionnaires français (puisque le catholicisme français n’avait pas cette prépondérance iconographique comme l’orient chrétien), ne se rapproche pas de son ancêtre byzantin vis à vis des icônes. Il y a peu ou pas d’icônes à détruire. Mais les iconoclastes français vont s’en prendre aux reliques. Chez les protestants, ce sont les calvinistes qui vont se distinguer par cette action funeste. Les historiens énumèrent la basilique Saint Martin de Tours, la cathédrale Sainte Croix d’Orléans comme destructions quasi complètes. Ils ajoutent nombre d’abbaye et basiliques comme pillées et mises à sac. Les synaxaires catholiques français relatent les destructions qu’ont eu à subir les reliques de nombres de saints, à qui l’on doit une France chrétienne, à une époque où la plupart peuvent être vus comme orthodoxes, puisqu’il s’agit de saints antérieurs au grand schisme de 1054. On connaît chez les révolutionnaires le même genre de démarche. On connaît tous la façon dont les révolutionnaires ont fait brûler les ossements de la sainte patronne de Paris, le 21 novembre 1793, et ont jeté les cendres à la seine… Ceci peut être une surprise pour certains : si l’on tient une comptabilité macabre et hérétique, la France a finalement plus à souffrir du calvinisme que de la révolution dans cette destruction patrimoniale spirituelle. Il s’agit ni plus ni moins d’un mémoricide. C’est une mémoire que l’on veut effacer.

On pourra alors demander : si la dénomination d’iconoclasme se comprend très bien pour le calvinisme, comment peut-on qualifier la révolution française d’iconoclaste ? Et bien parce que l’iconoclasme est une position au sens large qui n’appartient pas à un christianisme déviant, doctrinalement malade, théologiquement corrompu. C’est à juste titre que l’on peut qualifier l’islam et le judaïsme de doctrines iconoclastes. Mais on dira : certes, mais ce sont des religions. La révolution française n’est pas une religion ! Ha bon ? Le culte de l’être suprême, l’assassinat des prêtres, la suprématie de la raison et la franc-maçonnerie sont les quatre choses qui permettent de voir dans la révolution française une religion de substitution au catholicisme. Elle a différents visages, tels que la laïcité, la république, la maçonnerie. Tout ceci se veut en lieu et place de la France et du catholicisme. Nous avons donc bien une religion, fausse et également iconoclaste (comme la plupart des fausses religions).

Concluons. La France aussi a subi deux crises iconoclastes : le calvinisme et la révolution française. En cela elle partage une communauté de destin avec Byzance. Mais Byzance s’est sorti de son iconoclasme. Plaise à Dieu que la France sorte de la nuit spirituelle qui nous enserre depuis plus de 200 ans maintenant. Comme notre ennemi est iconoclaste, n’oublions pas que le simple fait d’avoir une icône, ou de prier une icône est déjà quelque chose qui fait reculer la nuit…