Bienvenue pour ce billet de Bible dédié au quatrième jour de la création. Comme vous le savez, ce jour voit la création du soleil, de la lune et des étoiles. Il permet de voir que la création suit une forme de logique et met en évidence les correspondances entre les jours 1 et 4, 2 et 5, 3 et 6. Pour le premier jour, Dieu a créé la lumière, et dans le quatrième jour, nous avons la création de corps célestes liés à la lumière. Lors du jour 2, il avait séparé les eaux, et le jour 5 voit l’apparition de la vie dans ou au-dessus de l’eau. Enfin, le troisième jour montrait l’apparition de la vie sur la terre émergée, et le sixième jour voit l’apparition de la vie animale et humaine sur cette même terre émergée.

Traduction standard française :

14 Dieu dit: Qu’il y ait des luminaires dans l’étendue du ciel, pour séparer le jour d’avec la nuit; que ce soient des signes pour marquer les époques, les jours et les années;
15 et qu’ils servent de luminaires dans l’étendue du ciel, pour éclairer la terre. Et cela fut ainsi.
16 Dieu fit les deux grands luminaires, le plus grand luminaire pour présider au jour, et le plus petit luminaire pour présider à la nuit; il fit aussi les étoiles.
17 Dieu les plaça dans l’étendue du ciel, pour éclairer la terre,
18 pour présider au jour et à la nuit, et pour séparer la lumière d’avec les ténèbres. Dieu vit que cela était bon.
19 Ainsi, il y eut un soir, et il y eut un matin: ce fut le quatrième jour.

l’hébreu littéral :

14 וַיֹּ֣אמֶר אֱלֹהִ֗ים יְהִ֤י מְאֹרֹת֙ בִּרְקִ֣יעַ הַשָּׁמַ֔יִם לְהַבְדִּ֕יל בֵּ֥ין הַיּ֖וֹם וּבֵ֣ין הַלָּ֑יְלָה וְהָי֤וּ לְאֹתֹת֙ וּלְמ֣וֹעֲדִ֔ים וּלְיָמִ֖ים וְשָׁנִֽים׃
15 וְהָי֤וּ לִמְאוֹרֹת֙ בִּרְקִ֣יעַ הַשָּׁמַ֔יִם לְהָאִ֖יר עַל־הָאָ֑רֶץ וַֽיְהִי־כֵֽן׃
16 וַיַּ֣עַשׂ אֱלֹהִ֔ים אֶת־שְׁנֵ֥י הַמְּאֹרֹ֖ת הַגְּדֹלִ֑ים אֶת־הַמָּא֤וֹר הַגָּדֹל֙ לְמֶמְשֶׁ֣לֶת הַיּ֔וֹם וְאֶת־הַמָּא֤וֹר הַקָּטֹן֙ לְמֶמְשֶׁ֣לֶת הַלַּ֔יְלָה וְאֵ֖ת הַכּוֹכָבִֽים׃
17 וַיִּתֵּ֥ן אֹתָ֛ם אֱלֹהִ֖ים בִּרְקִ֣יעַ הַשָּׁמָ֑יִם לְהָאִ֖יר עַל־הָאָֽרֶץ׃
18 וְלִמְשֹׁל֙ בַּיּ֣וֹם וּבַלַּ֔יְלָה וּֽלֲהַבְדִּ֔יל בֵּ֥ין הָא֖וֹר וּבֵ֣ין הַחֹ֑שֶׁךְ וַיַּ֥רְא אֱלֹהִ֖ים כִּי־טֽוֹב׃
19 וַֽיְהִי־עֶ֥רֶב וַֽיְהִי־בֹ֖קֶר י֥וֹם רְבִיעִֽי׃


Traduction littérale proposée :

14 : Et dit Elohim : que soient des luminaires dans le raquia des cieux pour séparer entre le jour et entre la nuit. Ils seront pour signes et pour les époques et pour les jours et les années.
15 : ils seront pour luminaires dans le raquia des cieux pour illuminer sur la terre. Il fut ainsi.
16 : Et il fit Elohim les deux luminaires grands : le luminaire grand pour la domination du jour, et le luminaire petit pour la domination de la nuit, et les étoiles.
17 : Il plaça eux Elohim dans raquia des cieux pour illuminer sur la terre.
18 : Et pour dominer dans le jour et dans la nuit, et pour séparer entre la lumière et entre la ténèbre. Et il vit Elohim que bon.
19 : Il fut soir et il fut matin, jour quatrième.

Il y a une chose à noter en hébreu. Entre les versets 14 et 15, le mot luminaire n’est pas écrit de la même façon. En hébreu, cela s’appelle la forme défective. Sans entrer trop profondément dans les arcanes de la langue hébraïque, tout n’est que consonne, et ce sont les petits signes au dessus ou au dessous qui indiquent comment vocaliser, c’est à dire quelle voyelle employer. Comme expliqué dans un billet précédent, c’est comme si en français on n’écrivait que les consonnes. Riche, ruche et roche s’écriraient alors de la même façon : RCH. Et on pourrait choisir, selon le contexte de lire riche, ruche ou roche. En hébreu, il existe certaines lettres qui vous indique quelle consonne utiliser. Le yod indique le i, le wav indique le o. Mais en leur absence, tout est permis, si ce n’est le signe de vocalisation massorétique qui date du 10ème siècle après le Christ.

Donc au verset 14, luminaires est écrit ainsi מְאֹרֹת֙
Par contre au verset 15, luminaires est écrit ainsi מְאוֹרֹת֙

On voit qu’il y a un wav supplémentaire (la lettre au centre). Quelle importance ? Et bien, le mot qui est écrit au verset 14 se lit davantage « fléaux » au pluriel que « luminaires ». Évidemment, dans la littéralité, c’est un peu absurde, et on voit bien qu’il est question de luminaires. Alors pourquoi, Moïse a-t-il choisi de nous mettre un mot qui signifie aussi fléaux ? Les rabbins du Talmud disent que le mercredi les jeunes enfants peuvent attraper la diphtérie. Je ne vois aucune logique dans ce commentaire. Par contre, on peut constater dans l’histoire que les luminaires, soleil, lune ou étoiles ont été de terribles support d’idolâtrie. Et ceci constitue un véritable fléau pour l’humanité : prendre pour Dieu, ce qui n’est que du domaine du créé. On pourra aussi se souvenir que le Christ fut trahi un mercredi par Judas, et qu’il y a peut-être ici une annonce prophétique très ténue, puisque le Christ, soleil de justice, sera éclipsé trois jours par cette trahison.



Pour poursuivre sur l’idolâtrie, on peut également ajouter la chose suivante : souvent, les exégètes et spécialistes du biblique se plaisent à vous dire que la Bible ressemble énormément à des textes sumériens, babyloniens, etc. Si ces textes sont authentiques, ils décrivent certes une cosmologie, mais qui met des étoiles en avant. Ici, au contraire, dans le biblique, les étoiles, la lune et le soleil, viennent comme un élément constitutif mais non central. C’est Dieu qui les crée. C’est Dieu qui fixe leur place. C’est Dieu qui règle leur mouvement. Et tout est vu depuis une place où la terre est centrale, et ces corps célestes servent d’indication précisément pour toute l’organisation temporelle sur la terre. Nous sommes donc bien loin des étoiles qui régissent tout, telles que Sin, Shamash et Ishtar dans la cosmologie babylonienne. Ce verset est terriblement anti-idolâtre, rien que de ce fait. Dieu sait bien que ce texte de la Genèse est donné à un peuple dont les racines peuvent par certains aspects être considérés idolâtres : Jos 24:2 2 « Josué dit à tout le peuple: Ainsi parle l’Éternel, le Dieu d’Israël: Vos pères, Térach, père d’Abraham et père de Nachor, habitaient anciennement de l’autre côté du fleuve, et ils servaient d’autres dieux. ». Mais ce texte va donner tous les fondements d’un monothéisme pur, absolu. Le châtiment pour revenir aux anciennes pratiques babyloniennes et polythéistes était sans appel : Dt:2-5 « Il se trouvera peut-être au milieu de toi dans l’une des villes que l’Éternel, ton Dieu, te donne, un homme ou une femme faisant ce qui est mal aux yeux de l’Éternel, ton Dieu, et transgressant son alliance; allant après d’autres dieux pour les servir et se prosterner devant eux, après le soleil, la lune, ou toute l’armée des cieux. Ce n’est point là ce que j’ai commandé. Dès que tu en auras connaissance, dès que tu l’auras appris, tu feras avec soin des recherches. La chose est-elle vraie, le fait est-il établi, cette abomination a-t-elle été commise en Israël, alors tu feras venir à tes portes l’homme ou la femme qui sera coupable de cette mauvaise action, et tu lapideras ou puniras de mort cet homme ou cette femme. »

De même, Moïse, dans Dt 4:15-20 rappelle l’importance de ne pas confondre le créé et le divin : « 15 Puisque vous n’avez vu aucune figure le jour où l’Éternel vous parla du milieu du feu, à Horeb, veillez attentivement sur vos âmes, 16 de peur que vous ne vous corrompiez et que vous ne vous fassiez une image taillée, une représentation de quelque idole, la figure d’un homme ou d’une femme, 17 la figure d’un animal qui soit sur la terre, la figure d’un oiseau qui vole dans les cieux, 18 la figure d’une bête qui rampe sur le sol, la figure d’un poisson qui vive dans les eaux au-dessous de la terre. 19 Veille sur ton âme, de peur que, levant tes yeux vers le ciel, et voyant le soleil, la lune et les étoiles, toute l’armée des cieux, tu ne sois entraîné à te prosterner en leur présence et à leur rendre un culte: ce sont des choses que l’Éternel, ton Dieu, a données en partage à tous les peuples, sous le ciel tout entier. 20 Mais vous, l’Éternel vous a pris, et vous a fait sortir de la fournaise de fer de l’Égypte, afin que vous fussiez un peuple qui lui appartînt en propre, comme vous l’êtes aujourd’hui. »

Continuons à nous laver de la vulgate scientiste, et laissons le texte nous parler, pour ce qu’il a à nous dire. Vous vous souvenez que la Bible a une conception du monde bien éloignée de celle imprimées dans nos esprit par toute la science physique depuis Copernic : une terre plate, recouverte d’un raqia, un dôme, un firmament solide. Le texte nous dit que le soleil, la lune et les étoiles sont dans le raqia, dans le firmament. Ainsi, les étoiles ne sont pas à des millions ou des milliards d’années lumières. Elles sont dans ce dôme. Le soleil et la lune sont caractérisés comme luminaires. La science moderne nous dit que la lune reflète la lumière du soleil. La Bible nous dit au contraire que les deux luminaires projettent leur propre lumière. L’expression « birqia » hébraïque du verset 14 doit donc être regardée relativement à ce que nous voyons du réel : le soleil et la lune sont « dans » le firmament, dans le sens « à l’intérieur », tandis que l’expression « birquia » du verset 17, qui traite plus spécifiquement des étoiles doit être comprise comme « dans le dôme », comme incrustées dedans, comme projetées dessus sans que cette projection ne provienne de l’intérieur. Ainsi, il faut se représenter le soleil et la lune, comme beaucoup plus petits et plus proches que ce qui nous a été dit par les menteurs prétendants avoir marché sur la lune. Soleil, lune et étoiles, en dehors de leur incomparables beauté et utilité, telle que la chaleur du soleil, Moïse nous indique que ces créations divines sont avant toute chose conçues pour marquer les temps, les époques. Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie que nous allons nous servir de toutes ces choses apparues le quatrième jour pour marquer le temps. Et cela nous renvoie à la gestion du temps par l’Église. L’église a choisi d’un point de vue conciliaire le calendrier julien, celui en vigueur dans l’empire romain, à l’époque du Concile de Nicée, en 325. Et l’Église dans sa sagesse s’est souvenue, que le temps est fixé par ces éléments soleil, lune et étoiles. Le Christ est très probablement mort le 3 avril 33 du calendrier julien. Ainsi, dans une logique moderne, scientiste et athée, Pâque, devrait être chaque année le 3 avril. Mais la résurrection du Christ est un évènement cosmique et l’Église s’y réfère de façon liturgique et non pas de façon scientifique. Qu’est-ce que cela signifie ?

Le Christ est ressuscité un dimanche. Comme vous le savez peut-être, la date liturgique de Pâque est calculée comme suit :

1) Après l’équinoxe de printemps
2) Après le premier mois complet après cet équinoxe de printemps
3) Le premier dimanche après ce mois complet
4) Jamais avant ou le même jour que la Pâque juive. Si jamais cela tombe ainsi, on reporte au dimanche suivant.

C’est à dire que l’on recherche le même ciel, et pas la même date. C’est l’exactitude du ciel qui nous intéresse, ainsi que le positionnement des jours dans la semaine. Le dimanche est plus important que le 3 avril. Parce que le Dimanche, c’est le premier jour de la création. Ici, dans ce quatrième jour, nous sommes mercredi.

Autour de cette date de Pâque, fête des fêtes, l’Église a organisé 12 autres fêtes, qui sont les douze évènements les plus importants à revivre liturgiquement après Pâque. Voici ces douze fêtes, ainsi que leurs dates respectives :

8 septembre, la Naissance de la Mère de Dieu
14 septembre, Exaltation de la Sainte Croix
21 Novembre, Entrée au Temple de la Mère de Dieu
25 Décembre, Naissance du Christ
6 Janvier, Baptême du Christ dans le Jourdain
2 Février, Présentation au Temple du Christ, 40 jours après sa naissance et Sainte Rencontre avec le juste Syméon
25 Mars Annonciation de l’Ange Gabriel à la Mère de Dieu
Dimanche avant Pâque : les Rameaux pour l’entrée messianique du Christ à Jérusalem
40 jours après Pâques : ascension aux Cieux du Christ
50 jours après Pâques : Pentecôte, çad descente de l’Esprit Saint sur les Apôtres
6 août : transfiguration du Christ devant les Saints Apôtres Pierre, Jacques et Jean
15 août : dormition de la Mère De Dieu.

Voilà pour le cycle liturgique le plus important de l’Église. Lorsque le texte de la Genèse déclare que soleil, lune et étoile marquent les temps, il faut bien comprendre qu’ils nous servent avant toute chose à l’organisation liturgique de notre vie.

Passons, maintenant aux commentaires patristiques. Ils répondent à des questions majeures de l’exégèse littérale du texte.

Commençons par Saint Jean Chrysostome. Il exprime d’abord l’immense beauté du soleil, pour aussitôt aborder le problème de l’idolâtrie que le soleil a pu susciter au cours de l’histoire humaine. Il explique comment le texte de la Genèse est soucieux d’éviter toute idolâtrie à ceux qui le lisent avec attention : « C’est pourquoi l’Esprit-Saint, qui savait combien l’homme est enclin à l’erreur, vous enseigne que le soleil n’a été créé qu’après le troisième jour; mais déjà la terre avait fait germer ses diverses productions et s’était revêtue de ses riches ornements : et Dieu l’avait ordonné, afin qu’on ne pût dire plus tard que les moissons et les fruits ne sauraient mûrir sans le soleil. Ainsi l’Écriture vous apprend qu’avant la création du soleil, les plantes et les fruits existaient, de peur que vous ne lui attribuiez cette heureuse fécondité; elle appartient tout entière au divin Ouvrier qui, dès le commencement, prononça cette parole : Que la terre produise les plantes verdoyantes. Direz-vous que la coopération du soleil favorise la maturité des fruits et des moissons? je ne le nie point. Car, quoique le laboureur aide à la fécondité de la terre, il ne s’ensuit pas qu’il soit l’auteur de cette fécondité; tout au contraire, quand il multiplierait même ses soins et ses travaux, il se fatiguerait inutilement, si le Seigneur, dont la parole rendit dès le commencement la terre propre à produire les fruits, ne lui continuait cette merveilleuse disposition; oui, ni les travaux du laboureur, ni l’influence du soleil et de la lune, ni le concours des saisons ne nous seraient d’aucune utilité si la main du Seigneur ne leur prêtait son puissant secours. Mais lorsque Dieu leur donne sa bénédiction, les éléments eux-mêmes contribuent beaucoup à la fertilité de la terre. Imprimez donc profondément ces vérités dans votre mémoire, et en retenant ceux qui voudraient encore s’égarer, ne leur permettez pas de rendre aux créatures l’honneur qui n’appartient qu’au Créateur. ». Ce sont des choses que nous avions vu lors du troisième jour, je n’y reviens pas. Mais il faut bien écouter ce que dit la patristique : le récit de la Genèse n’est pas invalidé parce que le soleil vient après la végétation dans l’ordre de la création. C’est l’idolâtrie qui est invalidée.

Ensuite, Saint Jean Chrysostome, va répondre de façon absolue, définitive sur ce problème : comment donc ont fait les plantes pour vivre sans lumière, et même, pour que nous ayons une succession de jours et de nuit lors des trois premiers jours ? Comment tout ceci est donc possible sans soleil ? Ecoutez la réponse : « Observez, en effet, que la sainte Écriture, qui nous dépeint la beauté du soleil, sa grandeur et son utilité sous cette belle image : Semblable à un époux, il s’élance comme un géant dans sa carrière, nous parle aussi de sa faiblesse et de ses défaillances : Quoi de plus brillant que le soleil, dit-elle, et cependant le soleil s’éteindra. (Eccli. XVII, 30.) C’est comme si elle nous disait : Ne vous laissez point séduire par cet admirable spectacle; car si le Créateur l’ordonnait, cet astre si beau disparaîtrait à l’instant et rentrerait dans le néant. La connaissance de ces vérités eût préservé les païens de leurs monstrueuses erreurs, et ils eussent compris que la vue des créatures devait les élever jusqu’au Créateur. Le soleil ne fut aussi créé que le quatrième jour, afin que l’homme ne le considérât point comme l’auteur et le principe de la lumière. Car, ce que j’ai dit de la production des plantes, je puis bien le redire de la lumière, savoir que trois jours ont précédé la création du soleil. Le Seigneur a voulu seulement que cet astre augmentât la clarté du jour; il faut en dire autant de la lune, qui est un corps lumineux moins grand, car trois nuits s’écoulèrent avant sa création. Ce n’est pas qu’elle ne nous soit merveilleusement utile; puisqu’elle dissipe les ténèbres de la nuit et remplit, presque les mêmes fonctions que le soleil : celui-ci a été créé pour présider au jour et la lune, pour présider à la nuit. Or que signifie, cette expression : présider au jour et présider à la nuit? elle marque, selon l’Écriture , que le soleil illumine le jour du feu de ses clartés, et que la lune, en dissipant les ténèbres de la nuit, aide les hommes par sa douce lumière dans l’accomplissement de leurs travaux. Et en effet le voyageur poursuit sa route avec plus de confiance, le pilote dirige mieux son navire sur l’immensité des mers, et chacun vaque sans crainte à ses travaux et ses occupations. Après vous avoir fait ainsi connaître l’utilité de ces deux grands luminaires, l’écrivain sacré ajoute que Dieu fit aussi les étoiles et qu’il les plaça dans le ciel pour luire sur la terre, pour présider au jour et à la nuit, et pour séparer la lumière d’avec les ténèbres. ». C’était pourtant simple. Et nous savions pourtant que la lumière existait depuis le premier jour. Ainsi, il faisait déjà jour et déjà nuit. Mais cela n’était pas dû au soleil. La réponse est aussi géniale que stupéfiante. Elle cloue le bec à toutes les réticences que le texte peut susciter. Le soleil augmente la clarté du jour dit Chrysostome. Il n’est pas l’auteur du jour, mais celui qui lui donne sa plus grande clarté. Le soleil n’est pas l’auteur de la lumière. Il en est une des sources.

Pour terminer avec Saint Jean Chrysostome, je vous invite à écouter ceci dans une logique platiste, où les étoiles sont dans le dôme et leur lumière voyage dans ce dôme. Je vous laisse juge de voir si Chrysostome est plutôt platiste ou plutôt partisan d’un espace infini avec les étoiles éloignées à l’infini… « . Ces paroles nous font connaître quel a été le dessein de Dieu en créant les étoiles. Il les a placées, dit Moïse, dans le firmament du ciel. Qu’est-ce à dire ? Est-ce qu’il les y a clouées ? Non certes ; puisque nous les voyons franchir en un instant des espaces immenses, et accomplir par un mouvement incessant les diverses révolutions que le Seigneur leur a tracées. Quel est donc le sens de cette expression : il les plaça ? Elle signifie qu’il leur assigna le ciel pour demeure. — C’est ainsi que l’Écriture nous dira également que Dieu plaça Adam dans le paradis terrestre. Il ne l’y fixa pas immuablement, mais il l’y plaça pour qu’il l’habitât ; et de même nous disons que le Seigneur a voulu que les étoiles fussent comme attachées à la voûte du firmament, afin que du haut du ciel elles pussent éclairer la terre. Or, je vous le demande, mon cher frère, l’émail de nos prairies, et les fleurs de nos jardins sont-ils aussi beaux que le ciel , lorsque au milieu de la nuit il scintille du feu des étoiles. La brillante variété de ces astres l’embellit et le parsème de fleurs étincelantes qui nous envoient une abondante lumière. Car les étoiles ont été créées pour éclairer la terre , et pour présider au jour et à la nuit. Déjà cette observation a été faite spécialement au sujet du soleil et de la lune; mais ici Moïse, après nous avoir révélé la création de ces deux grands corps de lumière, et celle des étoiles, ajoute, en parlant de tous, que Dieu les fit pour présider au jour et à la nuit, et pour séparer la lumière d’avec les ténèbres. Si les étoiles ne paraissent point pendant le jour, c’est que l’éclat du soleil les voile à nos regards; et de même le soleil ne brille point pendant la nuit, parce que la lumière de la lune suffit pour dissiper les ténèbres. Au reste tous les astres demeurent dans les limites qui leur sont tracées; ils ne s’en écartent point, et chacun d’eux obéit docilement aux ordres du Seigneur, et remplit son ministère. »

Passons à Saint Basile de Césarée. Il exprime d’emblée son intention de rester dans la littéralité des choses. Il déclare en préambule « nous nous proposons d’examiner le bel ordre de l’univers et de contempler le monde, non d’après les principes de la sagesse du siècle, mais d’après les instructions que Dieu a données à Moïse son serviteur, lui parlant lui-même en personne , et non par des figures ». Basile écrit « Et Dieu dit: Que des corps lumineux soient faits dans le firmament du ciel , pour éclairer la terre , pour séparer le jour de la nuit. Le ciel et la terre avaient précédé; après eux avait été créée la lumière; le jour et la nuit étaient distingués, la terre et le firmament étaient découverts ; l’eau avait été rassemblée en un même lieu , dans le réservoir qui lui était destiné; la terre était couverte des productions qui lui sont propres, et offrait de toutes parts une infinité d’espèces d’herbes, de plantes et d’arbres: le soleil et la lune n’existaient pas encore , afin que ceux qui ignorent le vrai Dieu, ne regardassent pas le soleil comme le père et l’auteur de la lumière, comme le générateur des productions terrestres. C’est pour cela qu’au quatrième jour Dieu dit : Que des corps lumineux soient faits dans le firmament du ciel. Lorsqu’on vous montre celui qui parle, pensez aussitôt en vous-même à celui qui entend. Dieu dit que des corps lumineux soient faits…. et Dieu fit deux corps lumineux. Qui est-ce qui a dit et qui est-ce qui a fait ? Dans ces paroles, ne voyez-vous pas une double personne ? dans toutes les histoires de l’Écriture est répandu , d’une manière mystique , le dogme des personnes divines. Moïse ajoute la cause pour laquelle les corps lumineux ont été créés, pour éclairer la terre, dit-il. Si la création de la lumière a précédé, pourquoi dit-on maintenant que le soleil a été créé pour éclairer la terre ? Ici , m’adressant aux infidèles, je leur dis d’abord : Que la simplicité de l’Écriture ne vous inspire pas de mépris pour elle. Nous n’étudions pas , comme chez vous , le choix des mots; nous ne cherchons pas à les arranger avec art ; nous sommes moins jaloux de belles expressions et de discours harmonieux que de paroles simples qui énoncent clairement ce que nous voulons faire comprendre. Or il n’est rien ici qui contredise ce qui a déjà été dit de la lumière. Dieu a créé d’abord la substance de la lumière, et il produit maintenant le corps du soleil pour servir de véhicule à la lumière créée avant lui. Et de même que le feu est distingué de la lampe , que l’un a la vertu d’éclairer, et que l’autre est faite pour communiquer la lumière à ceux qui en ont besoin : ainsi des corps lumineux reçoivent l’être maintenant pour servir de véhicule à une lumière pure, simple et immatérielle. L’apôtre parle de corps lumineux dans le monde, distingués de cette lumière véritable du monde , par la participation de laquelle les saints sont devenus des corps lumineux pour les âmes qu’ils instruisaient , en les délivrant des ténèbres de l’erreur. C’est ainsi que le Créateur de l’univers fait paraître maintenant dans le monde le soleil après l’éclatante lumière que cet astre doit nous communiquer. »

On voit donc Basile qui rejoint ici Chrysostome dans cette féconde distinction entre lumière et soleil. La lumière existait avant le soleil. Elle se pense volontiers sans lui. J’ai évoqué les fêtes liturgiques, rythmées par le ballet des étoiles, de la lune et du soleil. Basile nous rappelle qu’elles doivent agir d’une certaine façon à la fin des temps : «Le Seigneur nous a prédit que le soleil, la lune et les étoiles donneront des signes de la dissolution de l’univers. Et quels seront ces signes ? Le soleil sera changé en sang, et la lune ne donnera pas sa lumière»

Regardons ce que disait l’Evangile, puisque Basile nous y invite.

En Mt 24 :29 Aussitôt après ces jours de détresse, le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel, et les puissances des cieux seront ébranlées.
Et en Mc 13:24-25 Mais dans ces jours, après cette détresse, le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel, et les puissances qui sont dans les cieux seront ébranlées.
Avec un Dieu maître de la lune et du soleil, et qui incruste la lumière des étoiles sur le dôme au dessus de nous, tout ceci est très cohérent. Dans un monde d’astrophysiciens de la NASA, même si Dieu est tout puissant, c’est un peu plus compliqué à conceptualiser ; pour nous. Vous aurez aussi noté que Jésus considère que la lune produit sa propre lumière. A vous donc de déterminer si vous vous voulez croire le Christ, ou ceux qui disent que la lune reflète la lumière du soleil, même si on peut toujours vouloir relier l’obscurcissement du soleil et la perte de lumière lunaire, puisque les deux évènements sont annoncés de façon conjointe par le Christ.
Puis Basile se lance dans une longue démonstration de la non validité de l’astrologie, qui est une forme subtile d’idolâtrie. Il ne s’agit pas de considérer que les astres sont des dieux à adorer, mais plutôt qu’ils ont une influence sur notre vie. Je rapporte ici le début et la fin de sa démonstration qui me semblent les plus pertinents. « Ceux qui passent les bornes emploient les paroles de l’Écriture pour soutenir la science astrologique ; ils disent que notre vie dépend du mouvement des cieux, et qu’en conséquence les devins tirent, des astres , des pronostics pour ce qui doit nous arriver. Ces paroles fort simples de l’Écriture, qu’ils servent de signes, ils les entendent, non des vicissitudes dans l’air, ni des révolutions dans le temps ; mais ils les appliquent , d’après leur opinion, au sort destiné à tous les hommes. Que disent-ils donc ? sans doute que le rapport de telles planètes avec les astres du zodiaque, que tel concours entre eux produit telle naissance ; que de tel autre rapport et concours résulte une destinée contraire. Il n’est peut-être pas inutile de reprendre les choses d’un peu haut et de nous expliquer clairement. Je ne dirai rien de moi , mais je me servirai de leurs propres paroles pour les confondre. Je tâcherai de guérir ceux qui sont déjà prévenus de ces opinions dangereuses, et de prémunir les autres contre de pareilles erreurs….
… Et ces téméraires ne s’arrêtent pas là : mais une chose qui dépend de notre volonté, je veux dire la pratique du vice et de la vertu, ils en attribuent la cause aux mouvements célestes. Il serait ridicule de les combattre sérieusement ; mais il est peut-être nécessaire d’en faire quelque mention, parce qu’il en est beaucoup qui sont livrés à cette erreur. Demandons-leur d’abord si les positions des astres ne changent pas mille fois le jour. Ceux qu’on appelle planètes, qui ne sont jamais à la même place, dont les uns se rencontrent plus vite , les autres achèvent plus lentement leur course, ces astres se regardent souvent à la même heure et se cachent ; et c’est un grand point dans les naissances d’être regardé par un astre bienfaisant ou par un astre malfaisant, comme ils s’expriment eux-mêmes. Souvent , faute de connaître le moment précis où une naissance était présidée par un astre bienfaisant , parce qu’on ignore une des plus petites divisions du temps cette époque a été marquée de l’influence d’un astre malfaisant : je suis obligé de me servir de leurs propres expressions. Quelle folie dans de pareils discours, ou plutôt quelle impiété ! Les astres malfaisants rejettent la cause de leur malignité sur celui qui les a faits. Car si le mal vient de leur nature, celui qui les a créés sera fauteur du mal : s’ils sont mauvais par un choix libre de leur volonté, ce seront donc des animaux doués de la faculté de choisir, dont les actes seront libres et volontaires ; ce qu’on ne peut dire , sans extravagance, d’êtres inanimés. Ensuite quelle déraison de ne pas attribuer dans chacun le bien et le mal au choix d’une volonté bonne ou mauvaise ; mais de prétendre qu’un être est bienfaisant parce qu’il est dans telle place, qu’il devient malfaisant parce qu’il est dans telle autre, et qu’après encore , pour peu qu’il s’écarte, il oublie aussitôt sa malignité ? Sans nous arrêter à ces inepties, concluons et disons : Si les astres changent de position à chaque instant, et si, dans ces révolutions diverses, se rencontre plusieurs fois le jour, la position d’où résulte la naissance d’un prince, pourquoi ne naît-il pas des princes tous les jours ? ou pourquoi les trônes parmi eux sont-ils héréditaires ? Chaque prince, sans doute, n’adapte pas la naissance de son fils à une position d’astres propre à cette naissance : aucun homme n’en est le maître. Pourquoi donc Osias a-t-il engendré Joachim, Joathan Achas , et Ezéchias ? pourquoi aucun d’eux ne s’est-il rencontré au moment marqué pour la naissance d’un esclave ? Disons encore : Si le principe des actions vertueuses ou vicieuses n’est pas en nous ; s’il dépend nécessairement de telle naissance, c’est en vain que les législateurs nous marquent ce qu’il faut faire et ne pas faire ; c’est en vain que les juges honorent la vertu et punissent le vice. Ni le voleur, ni le meurtrier ne sont coupables, puisqu’ils ne pourraient retenir leurs mains quand ils le voudraient, s’ils sont poussés à agir par une nécessité inévitable. Il est fort inutile de cultiver les arts. Le laboureur aura abondance de fruits sans jeter de semence et sans aiguiser sa faux. Le commerçant, qu’il le veuille ou non, acquerra de grandes richesses qu’amassera pour lui le destin. Les grandes espérances des chrétiens s’évanouiront, parce que la justice ne peut être honorée ni le péché puni , si l’homme ne fait rien librement. Partout où dominent la nécessité et le destin, il ne peut y avoir place au mérite, qui est le fondement essentiel d’un jugement juste. En voilà assez sur cet article. Ceux d’entre vous qui pensent bien n’ont pas besoin de plus de paroles, et le temps ne permet pas de nous étendre pour attaquer les autres. »
Augustin de son côté avait réfuté l’astrologie en montrant combien Jacob et Esau, pourtant nés à quelques instants d’écarts avaient eu des vies si différentes, que cette science astrologique méritait en conséquence, bien peu d’attention. Il interroge le pourquoi de la création des astres, spécialement en ce quatrième jour. Il écrit « La première question qui se présente ici est de savoir quelle est la raison d’un ordre où la création de la terre et des eaux, leur séparation, les productions du sol précèdent l’apparition des astres dans le ciel. On ne saurait dire en effet que la succession des jours corresponde à la dignité des objets, et que la fin et le milieu y soient mis en relief. Sur une période de sept jours, le quatrième forme le milieu, et on sait que le septième ne fut marqué, par aucune création. Dira-t-on que la lumière du premier jour soit dans un juste rapport avec le repos du septième, et qu’on puisse former ainsi une série harmonieuse, où le commencement réponde à la fin, où le milieu se dégage et reluit de la clarté du ciel? Mais si le premier jour a une grandeur qui le rapproche du septième, il faut bien que le second corresponde au sixième. Or, quel rapport y a-t-il entre le firmament et l’homme fait à l’image de Dieu? Serait-ce que le ciel s’étend dans la région supérieure du monde et que l’homme a reçu le privilège de régner sur la région inférieure ? Mais que dire des animaux et des bêtes produits par la terre, selon leur espèce, le sixième jour? Peut-il y avoir quelque rapport entre les animaux et le ciel ? Voici peut-être l’explication de cet ordre. La créature intelligente ayant été formée au début, sous le nom de lumière, il était naturel que la nature physique, en d’autres termes, le monde visible fut formé. Cette création se fit en deux jours qui correspondent aux deux parties principales dont se compose l’univers, je veux dire le ciel et la terre, d’après cette analogie qui fait souvent désigner sous le nom de ciel et de terre les esprits et les corps. Ce globe fut le domaine assigné à la partie la plus bruyante et la plus grossière de l’air : il se condense en effet par les émanations de la terre; au contraire, la partie de l’air la plus paisible, celle que n’agitent jamais les vents ni les tempêtes, eut le ciel pour séjour. La création du monde physique achevée, à la place qui lui avait été assignée dans l’étendue, il fallait le remplir d’êtres organisés, capables de se transporter d’un lieu dans un autre. Les plantes et les arbres ne rentrent pas dans cette catégorie : ils tiennent à la terre par leurs racines, et quoique le mouvement qui les fait croître se passe en eux, ils n’en sont pas moins incapables de se mouvoir par un effort qui leur soit propre : ils se nourrissent et se développent aux lieux où ils sont enchaînés. Par conséquent ils ont un rapport plus étroit avec la terre qu’avec les êtres qui se meuvent sur la terre ou dans les eaux. Deux jours ont été consacrés à organiser la nature matérielle, je veux dire le ciel et la terre: il faut que les trois jours suivants soient consacrés aux êtres visibles et animés de mouvement, qui sont créés sur ce théâtre. Le ciel ayant été formé le premier, doit le premier recevoir les corps destinés à l’occuper. C’est donc le quatrième jour que sont formés les astres, qui luisent sur la terre, et qui en portant la lumière dans les plus basses régions de l’univers, permettent de ne pas introduire ses habitants futurs dans un séjour ténébreux. Comme les faibles organes des êtres d’ici-bas se renouvellent par le passage du mouvement au repos, la révolution du soleil a établi entre l’alternative du jour et de la nuit et le passage du repos à la veille, une juste correspondance; la nuit, loin d’être sans beautés, a offert, dans le doux éclat de la lune et des étoiles, une consolation aux hommes que la nécessité force souvent à travailler la nuit; cette paisible lumière convient d’ailleurs aux animaux qui ne peuvent soutenir l’éclat du soleil. »

Enfin, Saint Augustin va répondre à sa façon, plus elliptique, à cette énigme apparente : que sont les trois premiers jours en l’absence de lumière solaire ? : « Le passage où l’Écriture dit que « les luminaires du ciel servent à donner des signes, à marquer les temps, les jours, les années, » offre une grande difficulté. Si le cours du temps n’a commencé que le quatrième jour, les trois jours qui précèdent se sont donc passés en dehors du temps? Qui peut comprendre comment ces trois jours se sont écoulés avant le cours régulier du temps, puisqu’il ne date que du quatrième jour ? Se sont-ils même écoulés? Le jour et la nuit ne servent-ils ici qu’à désigner, l’un, la substance avec ses qualités distinctives, l’autre, la substance sans ses modifications? La nuit, dis-je, ne représenterait-elle que la matière encore informe dont les êtres devaient sortir avec leurs propriétés spéciales ? Même chez un être formé, la possibilité de changer implique l’imperfection du fond; or, cette imperfection ne se mesure ni par l’espace ni par le temps : elle n’implique ni distance ni antériorité. Serait-ce cette possibilité de changer, qui suppose celle d’être défectible, qu’on a appelée nuit même chez les créatures toutes formées, le changement étant possible chez les êtres, même quand ils ne changent pas ? Le soir et le matin, au lieu d’indiquer un écoulement et un retour périodique dans la durée, ne désigneraient-ils qu’une limite, celle où s’arrête le développement d’une substance et où recommence le développement d’une autre? Ne faut-il pas plutôt chercher dans un autre ordre d’idées le sens exact de ces mots ? Comment pénétrer ce secret et définir ce que l’Écriture appelle signes, lorsqu’elle dit des astres : « qu’ils servent de signes? » Elle entend par là, non les conjectures d’un art insensé, mais les pronostics si utiles dans la vie humaine, les observations qui guident le pilote sur les mers, les prédictions du temps selon les diverses saisons. Elle appelle, temps, non une durée quelconque, mais celle qui se règle sur le cours des astres et les mouvements périodiques du ciel. Supposons en effet qu’il ait existé un mouvement, soit physique soit intellectuel, antérieur à la disposition des astres dans le ciel, et que, par la pensée, ce mouvement ait été transporté de l’avenir dans le passé à travers le présent cet acte est impossible en dehors du temps; et comment prouver qu’un tel acte ne se soit produit qu’à dater de la création des astres? Quant aux divisions si connues du temps en heures, jours, années, elles ont nécessairement pour origine les mouvements des astres. En effet qu’entendons-nous par temps, par jours et par années? Le temps n’est pour nous que certaines divisions dans l’espace, marquées sur les cadrans ou sur la voûte du ciel; où le soleil s’élève de l’orient, atteint le méridien et s’abaisse vers l’occident; où on observe ensuite soit la lune soit une étoile monter à l’horizon après le coucher du soleil, au point culminant de son cours marquer minuit, et se coucher, avec le lever du soleil, pour marquer le matin. Le jour mesure la révolution totale du soleil d’orient en occident. Quant à l’année, elle comprend la révolution circulaire qui ramène le soleil, non à l’orient, comme chaque jour, mais au même point du ciel par rapport aux autres astres : cette révolution s’achève en 365 jours 6 heures ou le quart d’un jour, puis, au bout de quatre ans, produit un jour intercalaire, appelé bissextile dans l’année Romaine, afin de faire concorder le calendrier avec la marche du soleil. On nomme aussi années des cycles plus longs et moins connus : une grande année commence au retour de tous les astres au même point du ciel. Si donc nous entendons dans ce sens le temps, les jours et les années, il est incontestable qu’ils sont déterminés par les mouvements des astres et des grands luminaires, car on ne saurait trop décider si dans ces paroles de l’Écriture. : « Qu’ils servent de signes et marquent les temps, les jours et les années, » les jours et les années ont rapport au soleil, les temps et les signes, au reste des astres. ». On voit donc que pour Augustin, il y a séparation conceptuelle entre la durée de temps et les signes donnés par soleil, la lune ou les étoiles. Les trois premiers jours se sont écoulés sans les signes qui existent depuis le quatrième jour. Mais il n’est bien évidemment pas question de considérer que les trois premiers jours n’ont pas eu la durée qui fut ensuite marquée par les astres depuis lors. Tous ceux qui pensent que sans soleil il n’y a pas de jours, sont-ils d’accord pour dire, que si par malheur on les enfermait des jours durant dans un sombre cachot, l’absence de lumière marquerait le fait qu’ils n’ont passé qu’une seule nuit dans leur cellule ? C’est bien évidemment absurde. C’est ce qu’expose ici Augustin, mais de façon beaucoup plus élevée.

Nous voici arrivés au terme de notre étude sur le quatrième jour. J’espère que les difficultés sont surmontées. Je vous donne rendez vous pour le cinquième jour.