Ce troisième chapitre introduit un personnage très important dans l’histoire biblique : le Diable. Cette étude lui sera intégralement dédiée car le sujet est d’importance. Nous verrons également la problématique des démons, puisque Diable et démons sont liés, comme vous pouvez l’imaginer. Nous allons étudier dans peu de temps le péché originel, et l’on voit bien si nous relisons ce chapitre 3, que nos ancêtres, Adam et Eve ont été dupé. Ils ont été induits en erreur par le Diable. Ainsi, bien qu’il soit téméraire de faire de la fiction dans ce genre de domaine, sans le Diable il est probable que les choses eurent été bien différentes.

Le Diable a ainsi inspiré abondamment la littérature, que ce soit l’Enfer de Dante, Le Paradis perdu de Milton, le Faust de Goethe, le grand écran où l’on peut voir plusieurs grands acteurs incarner l’adversaire ou traiter de ses méfaits. Une série lui est même dédiée sur le petit écran. Mais sous ce déluge culturel et médiatique, l’on a peut-être un peu oublié ce que dit précisément la théologie orthodoxe sur le Diable et les démons. Cette étude pourra être utile à tous ceux qui ont compris que la vie est une grande lutte spirituelle, et que dans toute guerre, il convient de bien connaître son ennemi. Le premier écueil serait bien sûr de considérer que le Diable n’existe pas. Charles Baudelaire disait que cela était sa plus grande ruse : faire croire qu’il n’existe pas. Le drame aujourd’hui dans toute cette église moderniste officielle, qu’elle soit soi-disant orthodoxe, ou même chez les catholiques romains, on entend certains étaler leur freudisme, leur psychologisme et disons-le clairement : leur sottise. Si votre prêtre le dimanche vous dit que le Diable n’existe pas vraiment, qu’il s’agit d’un concept, d’une image un peu archaïque, pastoralement efficace il y a plusieurs siècles, mais aujourd’hui un peu dépassée, un peu naïve, vous devez absolument fuir ce lieu non orthodoxe, sans théologie, sans doctrine, sans connaissance biblique, et sans intelligence spirituelle.

Le Diable dans la théologie dogmatique orthodoxe

Laissons donc la parole à Macaire Boulgakov, qui dans sa dogmatique enseigne : « La même parole de Dieu qui fait mention des bons esprits parle également des malins esprits (Luc VII 21), les appelant encore esprits impurs (Mat X 1), esprits de malice (Eph VI 12), diables ou démons (Luc VIII 30-35). En particulier elle distingue entre eux un chef qu’elle appelle le plus souvent le Diable (I Pi V 8), le Tentateur (Mat IV 3), Satan (Ap XX 2-7), quelquefois Beelzebul (Luc XI 15), Bélial (II Cor VI 15), le prince de ce monde (Jean XII 31), le prince des puissance de l’air (Eph II 2), le prince des démons (Mat IX 34), etc, et les autres esprits par rapport à lui, elles les nomme les Anges du Diable (Mat XXV 41), les Anges de Satan (Ap XII 7-9). » (Tome 1 p 486).

Macaire Boulgakov énumère ensuite les passages vétéro-testamentaires où le Diable intervient : lorsqu’il persécute Job avec la permission de Dieu (livre de Job), lorsque « Saül était agité du malin esprit lorsque l’Esprit du Seigneur se fut retiré de lui » (I Ro XVI 14), lorsqu’il s’élève contre Israël et invite David à faire le dénombrement décrit dans le premier livre des chroniques, dans la vision prophétique de Zacharie où il se tient comme accusateur à la droite de l’Ange du Seigneur. Le livre de la Sagesse rappelle que c’est par son œuvre que la mort est entrée dans le monde. Boulgakov rappelle qu’il s’agit donc pour l’Ecriture d’un être tout à fait réel. Le NT est riche en passages où il est évoqué : la parabole du bon grain et de l’ivraie. Lors d’une énième controverse avec les pharisiens, lorsque ceux-ci accusent Jésus de chasser les démons par Beelzebul, prince des démons, le Christ ne leur dit pas qu’il s’agit d’un être imaginaire, d’un conte pour enfants. Pour le Christ, le Diable est quelqu’un de parfaitement réel. L’Apôtre Jacques nous enseigne que les démons sont des êtres doués de raison et pensants : « Les démons croient aussi et tremblent » (Jac II 19). L’apôtre Jean exprime ainsi l’importance du Diable : « Celui qui connaît le péché est enfant du Diable, parce que le Diable pèche dès le commencement ; et c’est pour détruire les œuvres du Diable que le Fils de Dieu est venu au monde » (I Jn III 8). Saint Paul nous le décrit comme un être poursuivant son propre désir : « Que ceux qui résistent à la vérité sortent des pièges du diable, qui les tient captifs pour en faire ce qui lui plait » (2 Tim II 26). Du côté patristique, les choses sont également très claires. Justin Martyr, Tatien, Irénée, Athénagore ou encore Ambroise et Augustin abordent le sujet du Diable dans leurs traités et commentaires. Le rituel de baptême orthodoxe, lorsqu’il est fait normalement, a un passage où l’on demande au baptisé de renoncer à Satan et à toutes ses œuvres. La croyance en Dieu et dans les anges et dans la rébellion d’une partie des anges guidée par un ange très mauvais, se rencontre sous différentes formes dans beaucoup de religions et spiritualités, et ceci est une trace très probable des résidus de tradition primordiale. Nous entendons ici par tradition primordiale, la vraie religion originelle, enseignée par Dieu à Adam puis aux patriarches, qui a d’une façon ou d’une autre influencée toutes les croyances déviantes et idolâtres avec quelques petites traces de vérité, ici ou là.

Il est crucial de comprendre que le Diable et les anges qui l’ont suivi n’ont pas été créés mauvais. Dieu n’est pas l’auteur du mal. Il est l’auteur d’un monde où le mal est possible si les créatures libres et conscientes choisissent de faire le mal. L’apôtre Jude le rappelle dans sa courte et riche épitre, rappelant que Dieu « retient liés de chaines éternelles dans de profondes ténèbres et réserve pour le jugement du grand jour, les Anges qui n’ont pas conservés leur première dignité, mais qui ont quitté leur propre demeure » (Ju 6). C’est bien évidemment l’enseignement des Pères. Citons Saint Cyrille d’Alexandrie : « Avant le Diable, personne n’avait péché ; or, il a péché, non qu’il fut naturellement et nécessairement enclin au péché (autrement la cause du péché devrait retomber sur celui qui l’aurait créé comme tel) ; mais il a été créé bon, et c’est de son plein gré qu’il est devenu ce qu’il est » (dogmatique Macaire Boulgakov tome 1 p 490-91). Augustin précise « le Diable est un esprit impur. Il est bon comme esprit, mauvais comme impur. Il est esprit par sa nature, impur par le péché ; De ces deux qualités, la première vient de Dieu, la seconde du diable lui-même » (commentaire littéral sur la Genèse). Mais dire que les anges ont chutés librement ne répond pas à toutes les questions. Les Pères donnent des réponses avec opinion particulière aux questions suivantes. Avant d’énumérer les questions et les positions, voyons ce qu’est une opinion particulière. Il s’agit d’une opinion soutenue par un Père de l’Eglise lors d’un commentaire, d’une homélie, mais cette opinion n’a pas reçu l’approbation du consensus patristique de l’Eglise. Cela signifie donc que ce n’est pas une vérité dogmatique qui s’impose à tous. L’on peut donc y souscrire tout en étant orthodoxe, ou ne pas y souscrire tout en restant également orthodoxe. Ces questions sont recensées ainsi que les réponses patristiques dans le tome 1 de l’incontournable dogmatique de Macaire Boulgakov.

  • Première question : Les anges tombèrent-ils bientôt après avoir reçu l’existence ? Certains Pères pensent un peu après, d’autres aussitôt après, certains pensant les anges bien antérieurs à la création du monde visible voient les anges rester longtemps en état de grâce. Nous verrons que cette opinion est soutenue par une lecture possible d’une prophétie d’Ezechiel que nous étudierons plus loin.
  • Seconde question : comment tombèrent les esprits malins ? est-ce tous ensemble ? La plupart des Pères disent que non. D’abord ne tomba que leur chef, qui fut avant sa chute le plus grand de tous les anges précisent certains. Saint Grégoire le théologien enseignait « le premier des luminaires célestes, après avoir perdu par son orgueil la lumière et la gloire, poursuit de son implacable haine tout le genre humain. » (sermon VI). Pour d’autres docteurs il était au moins du nombre des esprits supérieurs et des anges inférieurs lui étaient subordonnés. Ce seraient ces anges subordonnés, qui l’auraient suivi dans sa chute.
  • Troisième question : quel fut le péché des anges déchus ? Certains docteurs rappellent les unions contre nature qu’ils auraient eu avec les filles des hommes, tel que rapporté dans le Genèse au chapitre 6. D’autres arguent du péché d’envie car l’Ecriture dit « la mort est entrée dans le monde par l’envie du Diable » (Sag III 24). Saint Grégoire commente « C’est par l’envie du Diable que la mort est entrée dans le monde terrestre ; lorsque notre adversaire, le malin esprit, eut perdu le ciel, il porta envie à l’homme créé pour le ciel. ». Le Siracide enseigne que « le principe de tout péché, c’est l’orgueil » (Sir X 15). Donc certains Pères y ont vu la racine du péché, l’origine du péché du diable : l’orgueil. Son orgueil fut d’avoir voulu égaler Dieu. Saint Grégoire disait « La première étoile du matin, s’étant élevée trop haut en portant ses vues, du sein de sa gloire transcendante, jusque sur l’honneur suprême du grand Dieu, perdit sa splendeur, tomba ignominieusement et pour avoir voulu être Dieu, ne devint que ténèbres ». (Sermon VI). Nous verrons plus loin comment ceci s’établit depuis une prophétie d’Isaïe. Cette position de saint Grégoire peut presque prétendre au consensus patristique car on la retrouve chez Saint Léon, Origène, Basile le Grand, Chrysostome, Cyrille d’Alexandrie, Théodoret, Jérôme, Augustin, Jean Damascène. Les Pères ont néanmoins quelques variations sur la nature de ce premier péché. L’égalité avec Dieu le partage avec d’autres formes d’orgueil. On parle de prétention à partager le trône divin avec Dieu, de se placer même au-dessus de Dieu, du refus d’adorer le Fils de Dieu, de jalousie des prérogatives de ce dernier. Saint Grégoire rapporte un doute du Diable avant sa chute sur une vision qu’il a eu de la souffrance du Fils et a douté de sa divinité et cela l’a conduit a refusé de l’adorer. Cette idée est vertigineuse quand on y pense car la souffrance du Fils n’avait pour but que de réparer les conséquences de cette rébellion diabolique, et l’on voit ici qu’elle fut aussi à l’origine des choses.
  • Quatrième question et dernière question : quelle fut la profondeur de la chute des esprits du mal ? Telle qu’ils ne s’en relèveront jamais, est la réponse classique patristique. La Bible nous dit que le feu éternel est leur destination. Mais l’on se demande alors pourquoi ils ne pourraient pas faire pénitence et échapper à cette sentence terrible ? De nombreux Pères enseignent que le fait qu’ils soient immatériels, purs esprits, montrent que leur chute n’est pas due à une tentation de la chair, mais bien à une froide et sombre détermination. Les Pères utilisent les expressions de rébellion opiniâtre et endurcie ». Jean Damascène explique que Dieu leur laissa un temps important pour revenir. Après leur réponse dédaigneuse à cette grâce divine, c’est là qu’ils furent précipités du haut du ciel, et ils sont considérés comme morts, au-delà du repentir, comme les hommes sont inaptes au repentir après leur mort (Exp foi orthodoxe, liv II ch 4).

L’interaction des esprits avec le vivant est assez mystérieuse. Ils n’ont pas de corps, mais peuvent résider à plusieurs dans un corps. On se souvient du démon légion, ou de Marie Madeleine possédée par sept démons. Ils peuvent également parasiter un corps animal. On se souviendra du troupeau de porcs dans lequel le démon légion trouve refuge avant de finir dans la mer de Galilée. Une minorité les voit avec des corps subtils, tandis que la majorité des Pères les voit en tant que puissances immatérielles. Leur action est bornée car ils ne peuvent rien faire sans un décret divin. On ne connait pas leur nombre mais il parait colossal.



L'éthymologie des mots qui désignent le Diable

Le Grec de la LXX

Le terme grec est Diabolos διάβολος tiré du verbe diabollo qui signifie diviser. Le diabolos est le diviseur. Mais cela est plus profond, quand on comprend la notion liturgique du symbole. Symballo en grec signifie réunir. Le symbole est le support de la liturgie, c’est ce qui permet à la liturgie d’être un moment non allégorique mais bien symbolique. Nous avons déjà expliqué ceci dans d’autres études, mais cette notion est essentielle à une compréhension de l’orthodoxie. La liturgie orthodoxe est le moment qui met le plus en jeu la notion de symbole comme réunion de deux réalités. Prenons l’exemple de l’autel sur lequel le prêtre réalise l’acte liturgique. Une vision inadéquate serait de considérer que cet autel est une allégorie de l’autel céleste sur lequel a lieu la liturgie divine céleste, celle dont Isaïe a eu la vision, où il a vu les séraphins se voiler la face devant la splendeur divine en chantant « saint saint saint ». Il y a une liturgie céleste hors du temps et de l’espace, et il y a, généralement pour nous le dimanche matin, une liturgie terrestre. Grâce à l’effectivité du symbole, l’autel du prêtre se réunit, par la symbole, symballo, à l’autel céleste, et la liturgie cosmique et notre liturgie terrestre ne font plus qu’un. Le Christ, grand prêtre dans les cieux est alors le prêtre de notre liturgie, et le prêtre sur terre est le symbole de son action. Le symbole, c’est cette réunion mystique entre deux réalités. Le diabole n’a de cesse que de casser, que de rendre inopérant ces réunions. Le diabole divise surtout entre le monde terrestre et le monde céleste. Ceci est la richesse du grec de la LXX.

L'hébreu du texte massorétique

Le texte hébreu recèle d’autres notions tout aussi profondes. On y trouve par exemple le terme de Satan : שָׂטָן. Il faut bien comprendre que Satan n’est pas un nom, mais un titre. C’est un titre qui correspond à une fonction. Le Satan est l’accusateur, l’adversaire. Dans ce jugement particulier qui attend chacun de nous, juste après notre mort, les anges bons et les anges mauvais passent en revue les bonnes actions pour les premiers et les mauvaises actions (pour les seconds). Il s’agit des actions de l’âme qui vient de quitter le corps juste après la mort. On voit donc très clairement que les mauvais esprits jouent le rôle de procureur, d’accusateur dans un procès. Ainsi le titre de Satan renvoie à cette fonction. Satan signifie adversaire mais aussi accusateur. Nous sommes ici dans le registre de la justice pure, froide et absolue, dans laquelle il n’existe pas de grâce. Pour reprendre cette notion de nom et de titre, par exemple Christ n’est pas un nom, mais un titre. Jésus, ou plutôt Yeshoua était le nom de notre Seigneur. Christ était son titre. Une remarque grammaticale importante : Satan, en tant qu’ange rebelle est toujours mentionné dans la Bible, que ce soit en hébreu ou en grec, avec l’article défini devant. Le texte dit de lui : « le satan », pas satan seul, mais bien « le satan ». Jésus le nomme « le satan ». Le texte utilise parfois le terme sans l’article, satan pour le mot « adversaire » sans la connotation diabolique. L’ange du Seigneur dans l’AT est même une fois satan de quelqu’un, simplement pour dire qu’il s’oppose à lui. Il faut donc prendre garde dans la lecture littérale à bien différencier « un adversaire » de « l’adversaire ». Donc, cela entraîne la question suivante : si Satan est son titre, si Diabolos est son ambition, alors quel est son nom ?

Le latin de la Vulgate

La réponse qui vient le plus à l’esprit est Lucifer. Pourtant Lucifer est un terme latin qui signifie « porteur de lumière ». Il a connu toute une évolution historique pour porter la signification d’ «étoile du matin » ou « astre brillant ». Il est devenu plus tardivement porteur de la signification actuelle luciférienne diabolique, comme en témoigne l’existence d’un évêque italien prénommé Lucifer au quatrième siècle (Lucifer de Cagliari, en Sardaigne). Son prénom était donc positif et il était même vu comme saint par certains de ses contemporains. Nous verrons tout ceci plus loin dans l’étude de la prophétie d’Isaïe. Nous devons donc acter que nous ne connaissons pas avec certitude le nom de cet ange, mais que nous connaissons en revanche son titre : c’est le Satan, l’adversaire, l’accusateur, et il est Diabolos, il sépare ce qui doit être réuni : Dieu et l’homme.

Le Na'hash du chapitre 3

Le premier nom que va lui donner la Bible est dans ce chapitre 3. Ceci est une règle exégétique majeure : la première occurrence d’une chose est fondamentale pour sa compréhension. Nous le voyons ici pour la première fois et il nous est présenté comme un serpent. Le terme utilisé est Na’hash נָחָשׁ.

Na’hash est un terme très riche car il ne signifie pas uniquement serpent. Si vous regardez dans les lexiques au niveau des racines de l’hébreu, vous avez en fait 4 significations. Le lexique qui fait référence est le Strong. Le Strong 5172 est le verb NaHash qui s’utilise pour la pratique de la divination, de la voyance. Ainsi en Gn 44:5 « N’avez-vous pas la coupe dans laquelle boit mon seigneur, et dont il se sert pour deviner ? Vous avez mal fait d’agir ainsi. ». Le Strong 5173 est le substantif du précédent : divination, enchantement. Ainsi en Nb 23:23 : « L’enchantement ne peut rien contre Jacob, Ni la divination contre Israël; Au temps marqué, il sera dit à Jacob et à Israël: Quelle est l’œuvre de Dieu. ». Le Strong 5174 se prononce différemment mais s’écrit exactement pareil sans les signes de vocalisation, et je rappelle que Moïse a donné une Torah sans signe de vocalisation. Cela se prononce Né’hash et non pas Na’hash. Cela se traduit par bronze ou cuivre et s’utilise parfois pour signifier ce qui brille. Ainsi en Dn 2:32 : « La tête de cette statue était d’or pur; sa poitrine et ses bras étaient d’argent; son ventre et ses cuisses étaient d’airain; » dit Daniel en racontant son rêve a Nabuchodonosor. Et enfin le mot Strong 5175 donne serpent comme ici en Gn 3:1 : « Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs, que l’Éternel Dieu avait faits. Il dit à la femme: Dieu a-t-il réellement dit: Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin? ». Un passage de l’écriture montre bien cette polysémie, c’est 2 Ro 18:4 : « Il fit disparaître les hauts lieux, brisa les statues, abattit les idoles, et mit en pièces le serpent d’airain que Moïse avait fait, car les enfants d’Israël avaient jusqu’alors brûlé des parfums devant lui: on l’appelait Nehuschtan. ». En hébreu on a Na’Hash haNé’hashet, et on peut lire un bronze de serpent ou un serpent de bronze dans l’absolu. Ceci montre que la même racine hébraïque sert pour serpent et pour brillant.

Le Na'ash comme un des Elohim

Les athées récusent la Bible parce qu’ils ne peuvent pas prendre au sérieux un livre où parle les serpents. Dans la profondeur du texte on pourrait lire « le brillant était le plus rusé de tous les animaux des champs ». C’est un peu étrange qu’un brillant soit compté parmi les animaux des champs mais cela éclaire d’un autre angle son côté « je suis doué de parole » et surtout le fait que Eve ne se méfie pas. N’oublions pas qu’il s’agit d’un ange, et probablement du plus grand de tous. Il n’est donc pas étonnant qu’il soit doué de parole. Il n’est pas étonnant que Eve n’ait pas peur de lui. Il n’est pas étonnant qu’elle discute avec lui. On est jamais trompé que par ceux qui nous semblent fiables et dignes de confiance. Cet ange était un peu comme le bras droit de Dieu. On pourra également se demander : pourquoi Dieu le laisse-t-il aller et venir tranquillement dans le jardin d’Eden ? Normalement, il a banni Satan aux enfers, et nous sommes donc surpris de le voir ici, converser tranquillement avec Eve ! Pour expliquer tout cela, je vais être obligé de faire tout un long détour. Commençons par les êtres spirituels. Jusqu’ici nous avons rencontré deux types d’êtres : Dieu et les hommes. Avant ce chapitre 3 et le Diable, il n’a jamais été question des anges. Et nous découvrons cette réalité de façon un peu abrupte ici, avec ce serpent qui va nous conduire à la mort. Au tout début, dans le récit de la création, nous avons vus la création d’un monde terrestre et d’un monde céleste. Le piège ici serait de croire que ces deux mondes ne seraient pas réels. On a tendance à voir le monde céleste comme une autre dimension, pour utiliser un vocable moderne. Mais le ciel ou les enfers sont des réalités concrètes. Simplement elles ne sont pas immédiatement accessibles. On se souvient que Dieu a séparé les deux réalités et le jardin d’Eden, situé sur une haute montagne était le point de jonction entre le monde matériel des hommes et le monde spirituel des créatures spirituelles. Avant la chute, les deux mondes étaient encore réunis. La science moderne a totalement éclipsé notre compréhension du ciel. Le soleil, la lune et les étoiles, étaient vus par toute l’antiquité et pas uniquement par les hébreux comme des créatures spirituelles. Lorsque Isaïe décrit Satan comme l’étoile du matin, nous ne sommes pas dans un registre astronomique, ni dans un registre poétique mais bien dans un registre spirituel. Le ciel montre tout un ensemble de créatures spirituelles, s’en fait le reflet. La grande particularité des hébreux est que la révélation mosaïque leur fait redécouvrir cette vérité enfouie dans les ténèbres des religions polythéistes idolâtres : ces créatures spirituelles ne sont pas Dieu. Elles sont le reflet de la gloire divine, mais pas Dieu. La deuxième incongruité de la révélation mosaïque est que ce ne sont pas les créatures spirituelles qui sont appelées à gouverner sur la création, aussi bien terrestre que céleste, mais les hommes, faits de la poussière de la terre. A priori donc, Dieu a choisi la créature la plus improbable de sa création pour la gouverner avec Lui. Le psaume 8 nous renvoie à cette bizarrerie : l’homme est moins que les créatures spirituelles et il est appelé à gouverner. « Qu’est-ce que l’homme, pour que tu te souviennes de lui? Et le fils de l’homme, pour que tu prennes garde à lui? Tu l’as fait de peu inférieur à Dieu, Et tu l’as couronné de gloire et de magnificence. Tu lui as donné la domination sur les œuvres de tes mains, Tu as tout mis sous ses pieds, » (Ps 8:4-6). Ici la traduction française ne pouvait qu’être impropre ou imprécise : tu l’as fait de peu inférieur à Dieu. Le texte dit « tu l’as fait de peu inférieur à Elohim ». Le réflexe sera de dire « Elohim est un des noms de Dieu, donc la traduction est correcte ». La LXX pourtant traduit « Elohim » par « Anges » et elle a parfaitement raison. Elohim ne veut pas tout le temps dire Dieu. Elohim veut surtout dire les êtres spirituels. En fait Elohim veut surtout dire ceux qui ne sont pas issus de la terre. Donc cela peut désigner Dieu, mais cela peut aussi vouloir désigner les autres créatures spirituelles, à savoir : les anges. L’hébreu dit Elohim, et le grec de la LXX dit Theos pour cette réalité spirituelle. On peut donc comprendre qu’une de ces créatures spirituelles n’ait pas accepté cette décision pour le moins déroutante de Dieu : donner le pouvoir à une créature bien inférieure. La rébellion du serpent tient donc aussi de ce problème : il lui était insupportable de voir Dieu donner le pouvoir à l’homme, et rester dans un rôle qu’il a probablement jugé subalterne. La ruse a fonctionné puisque l’homme n’a pas voulu gouverner le monde selon les termes divins, mais selon les paradigmes humains. Je reviens à Elohim. Elohim est une catégorie spirituelle. Voyez ça comme un rôle. Le Dieu que nous essayons de désigner par Elohim est en fait le Elohim des Elohim. Une fois que l’on comprend cela, les phrases du genre «il n’y a pas de Elohim comme YHWH » deviennent plus claires il me semble. Cela veut dire que parmi tous les Elohim, parmi tous ceux qui sont dans cette réalité céleste, aucun n’est comparable à YHWH. Les raccourcis YHWH Elohim dans la Bible se comprennent donc par rapport à la vision du monde spirituel, et non pas par rapport aux sottises des philologues qui imaginent des collages de textes différents. Être monothéiste, revient à dire que parmi tous les Elohim, parmi toutes les créatures spirituelles du monde céleste, une seule est source de tout le reste : YHWH. Autour de Lui, dans le monde céleste, vous avez tout un ensemble de créatures spirituelles. La Bible les désigne parfois sous le nom de « fils de Dieu », « conseil divin ». La Bible nous montre parfois comment le conseil divin entoure Dieu dans ses décisions. Pourquoi Dieu voudrait-il donc s’entourer de créatures pour prendre des décisions ? S’il a pu créer l‘univers, il a clairement les capacités de le gouverner, de l’organiser. Mais on comprend dans le biblique, que Dieu veut partager son autorité. Dieu veut des relations avec ses créatures. On comprend également, que ce partage d’autorité se passe mal, aussi bien dans le monde céleste que dans le monde terrestre. Il fait face à deux rébellions. Une rébellion angélique que nous étudions aujourd’hui, et une rébellion humaine que nous allons voir dans la prochaine étude. Même si l’une entraine l’autre, il y a bien deux rébellions face à Dieu. La rébellion angélique se manifeste ici au chapitre 3 et plus tard au chapitre 6. La rébellion humaine se déroule en premier lieu au chapitre 3, mais nous verrons également lors du chapitre 11 de la Genèse l’épisode de la tour de Babel. Ce moment montre merveilleusement la rébellion humaine qui veut retrouver son ancienne gloire dans la hauteur perdue de l’Eden. La Bible en nous montrant la rébellion humaine, nous montre aussi l’influence occulte de la rébellion de la partie des elohim qui refusent la monarchie divine, pour devenir eux même monarques au sein de nouvelles religions, et qui veulent remonter jusqu’au ciel dont ils furent chassés. Derrière la rébellion humaine, il y a toujours une rébellion d’Elohim, de créatures spirituelles en révolte. C’est un des grands messages du biblique. C’est pourquoi Satan est le prince de ce monde. En Deutéronome 32, Dieu entérine probablement cette conjonction de rébellions, en appointant à chaque nation un elohim. Voici le passage selon le grec de la LXX qui rend ceci très explicite. La Torah massorétique rend autre chose, et nous expliquerons pourquoi dans l’étude du Deutéronome. La digression serait trop longue. Voici donc le passage, tiré du grec de la LXX, qui je le rappelle est le texte d’autorité dans l’Eglise orthodoxe. « Quand le Très-Haut a divisé les nations, quand il a séparé les fils d’Adam, il a fixé les limites des nations selon le nombre des anges de Dieu. Et son peuple Jacob devint la portion de l’Éternel, Israël était la lignée de son héritage. » (Dt 32 :8-9). Les prophètes vont ensuite montrer comment derrière chaque royaume, derrière chaque nation non juive dans l’AT, une puissance maléfique est à l’œuvre. Nous étudierons en détail deux prophéties d’Isaïe et d’Ezéchiel qui reconnaissent même le Diable à l’œuvre derrière des souverains. Ceci permet de mettre le ministère de Jésus sous la bonne perspective. Non pas la vue juive actuelle étriquée et nationaliste, mais bien celle de celui qui va détruire les fondements de la rébellion, mais de la bonne rébellion. Là où les juifs voulaient un messie qui attaque l’empire romain, Jésus vient pour détruire les puissances angéliques rebelles, les elohim en révolte à l’œuvre derrière l’empire romain, et derrière tous les empires et toutes les nations du monde. A partir de Jésus, la reconquête est mondiale. Le livre des actes est une invasion en règle de tous les pays. C’est une guerre spirituelle foudroyante. L’apôtre Paul explique dans certains passages de ses épîtres que la guerre doit être menée au niveau spirituel. Lorsque nous avons un ennemi, ce n’est pas l’ennemi humain que nous devons combattre, mais bien la puissance spirituelle parasite qui l’anime. C’est cela le vrai ennemi, pour lequel Jésus nous a donné toutes les armes. Saint Denis l’Aréopagite, disciple justement de Saint Paul a enseigné que les anges étaient organisés en neuf corps différents : les Anges, les Archanges, les Principautés, les Puissances, les Dominations, les Vertus, les Trônes, les Chérubins et enfin les Séraphins. D’après les épitres de Paul, il semblerait que cette organisation perdure chez les anges rebelles. Par exemple, prenons ce passage de la première aux Corinthiens, le fameux passage du chapitre 15 sur la résurrection des morts : il explique « Car, puisque la mort est venue par un homme, c’est aussi par un homme qu’est venue la résurrection des morts. Et comme tous meurent en Adam, de même aussi tous revivront en Christ, mais chacun en son rang. Christ comme prémices, puis ceux qui appartiennent à Christ, lors de son avènement. Ensuite viendra la fin, quand il remettra le royaume à celui qui est Dieu et Père, après avoir détruit toute domination, toute autorité et toute puissance. Car il faut qu’il règne jusqu’à ce qu’il ait mis tous les ennemis sous ses pieds. » (1 Co 15:21-24). Ces trois termes sont des ordres angéliques. On peut donc très clairement comprendre ce passage comme le fait que la rébellion céleste est également terminée et que les anges rebelles sont détruits. Dans Ephésiens, il fait également allusion à des ordres angéliques, bons cette fois : « Il l’a déployée en Christ, en le ressuscitant des morts, et en le faisant asseoir à sa droite dans les lieux célestes, au-dessus de toute domination, de toute autorité, de toute puissance, de toute dignité, et de tout nom qui se peut nommer, non seulement dans le siècle présent, mais encore dans le siècle à venir. » (Eph 1:20-21).



Les chérubins

Je continue le détour avec l’aspect des chérubins, ce qui permettra de mieux comprendre l’aspect de serpent du Diable. Les chérubins sont donc le huitième corps de l’armée des anges. Oubliez les images d’épinal avec des petits bébés ailés qui jouent de la lyre. Ceci marque plutôt une forme de décadence romaine dans la compréhension du biblique, et dans la représentation picturale des choses spirituelles. Les chérubins sont des créatures assez déroutantes dans leur aspect dans le monde matériel. Ils ressemblent plutôt à des assemblages improbables d’animaux ailés à l’aspect plutôt changeant. La fin du chapitre 3 de la Genèse nous apprend qu’ils sont à la frontière entre le terrestre et le céleste. Si on les voit, c’est que l’on passe de l’un à l’autre. C’est pourquoi la liturgie à précisément un chant des chérubins, c’est pour marquer le moment où nous accédons concrètement à la liturgie céleste devant Dieu lui-même. Les chérubins étaient matérialisés par des statues sur l’arche d’alliance, à l’intérieur du tabernacle ou dans le premier Temple de Jérusalem. Après l’expulsion de l’humanité du jardin d’Eden qui était cette réunion du terrestre et du céleste, Dieu avait recréé de façon temporaire des connexions entre le terrestre et le céleste, dans le Tabernacle ou dans le Temple, d’où la présence de chérubins. Les chérubins, d’après la Bible portent le trône divin. Dieu était présent dans cet eden miniature en attendant l’incarnation. Les chérubins étaient des mélanges d’animaux, mélange symbolisant probablement la symphonie du vivant rendant gloire à Dieu. Les visions prophétiques rapportent la vision de ces créatures étranges qui chantent la gloire divine. Les anges, dans le premier corps angélique sont cette fois sans ailes, et sont les messagers divins, qui viennent apporter les directives du monde céleste au monde terrestre. Ils ont l’aspect d’hommes. Il est normal qu’ils viennent dans le monde terrestre car nous ne pouvons plus aller dans le monde céleste. Ils accomplissent également des missions, comme l’ange qui vient délivrer Pierre de sa prison dans le livre des Actes. Les anges servent la volonté divine dans ce but de réunion suite à la chute. Avec tout ceci à l’esprit, passons maintenant à une étude plus poussée de Satan.

Reprenons la création depuis la départ. Dieu a créé un monde magnifique, ordonné, où la vie peut s’épanouir et il nomme les hommes comme souverain de cette création. Dieu dit de nombreuses fois que cela est bien. Pas l’ombre d’une hésitation dans son esprit. Puis vient le serpent. Lorsque Isaïe a la vision du trône céleste au chapitre 6 de son livre il le relate ainsi « L’année de la mort du roi Ozias, je vis le Seigneur assis sur un trône très élevé, et les pans de sa robe remplissaient le temple. Des séraphins se tenaient au-dessus de lui; ils avaient chacun six ailes; deux dont ils se couvraient la face, deux dont ils se couvraient les pieds, et deux dont ils se servaient pour voler. Ils criaient l’un à l’autre, et disaient: Saint, saint, saint est l’Éternel des armées! toute la terre est pleine de sa gloire! Les portes furent ébranlées dans leurs fondements par la voix qui retentissait, et la maison se remplit de fumée. Alors je dis: Malheur à moi! je suis perdu, car je suis un homme dont les lèvres sont impures, j’habite au milieu d’un peuple dont les lèvres sont impures, et mes yeux ont vu le Roi, l’Éternel des armées. Mais l’un des séraphins vola vers moi, tenant à la main une pierre ardente, qu’il avait prise sur l’autel avec des pincettes. Il en toucha ma bouche, et dit: Ceci a touché tes lèvres; ton iniquité est enlevée, et ton péché est expié. » (Is 6 :1-7). Le mot utilisé ici est Séraphins, ce qui relève du plus haut niveau angélique, le neuvième corps d’anges, le plus proche de Dieu. Et bien le terme hébreu ici est le pluriel du terme saraph, qui signifie… serpent. Isaïe dit en fait « des serpents se tenaient devant lui ; ils avaient chacun six ailes, etc ». C’est le même terme qui est utilisé en Nb 21:8 : « L’Éternel dit à Moïse: Fais-toi un serpent brûlant, et place-le sur une perche; quiconque aura été mordu, et le regardera, conservera la vie. ». Fais toi un saraph, qui est rendu par serpent brûlant. Les traducteurs rendent souvent saraph par serpent brûlant, car saraph, comme na’hash est polysémique. Saraph en tant que nom signifie serpent, et en tant que verbe signifie brûler. Ainsi, nous avons une riche instruction provenant de l’hébreu qui nous apprend les choses suivantes : le serpent que nous voyons nous apparait en tant que serpent car il est de l’ordre de Séraphims, et cet ordre signifie serpent. C’est ainsi que son immatérialité se manifeste dans la vision au sein du monde matériel. Mais avant qu’il n’ouvre la bouche pour répandre ses mensonges et ses ruses, il n’y a rien de négatif à ce qu’il n’apparaisse comme un serpent.

Le Diable dans la prophétie d'Isaïe

Restons chez Isaïe, car au chapitre 14, chapitre dans lequel il utilise à nouveau le terme Saraph, et nous donne un enseignement sur le Diable. Voici la prophétie extraite de ce chapitre : « Alors tu prononceras ce chant sur le roi de Babylone, Et tu diras: Eh quoi! le tyran n’est plus! L’oppression a cessé! L’Éternel a brisé le bâton des méchants, La verge des dominateurs. Celui qui dans sa fureur frappait les peuples, Par des coups sans relâche, Celui qui dans sa colère subjuguait les nations, Est poursuivi sans ménagement. Toute la terre jouit du repos et de la paix; On éclate en chants d’allégresse, Les cyprès même, les cèdres du Liban, se réjouissent de ta chute: Depuis que tu es tombé, personne ne monte pour nous abattre. Le séjour des morts s’émeut jusque dans ses profondeurs, Pour t’accueillir à ton arrivée; Il réveille devant toi les ombres, tous les grands de la terre, Il fait lever de leurs trônes tous les rois des nations. Tous prennent la parole pour te dire: Toi aussi, tu es sans force comme nous, Tu es devenu semblable à nous! Ta magnificence est descendue dans le séjour des morts, Avec le son de tes luths; Sous toi est une couche de vers, Et les vers sont ta couverture. Te voilà tombé du ciel, Astre brillant, fils de l’aurore! Tu es abattu à terre, Toi, le vainqueur des nations! Tu disais en ton cœur: Je monterai au ciel, J’élèverai mon trône au-dessus des étoiles de Dieu; Je m’assiérai sur la montagne de l’assemblée, A l’extrémité du septentrion; Je monterai sur le sommet des nues, Je serai semblable au Très Haut. Mais tu as été précipité dans le séjour des morts, Dans les profondeurs de la fosse. Ceux qui te voient fixent sur toi leurs regards, Ils te considèrent attentivement: Est-ce là cet homme qui faisait trembler la terre, Qui ébranlait les royaumes, Qui réduisait le monde en désert, Qui ravageait les villes, Et ne relâchait point ses prisonniers? Tous les rois des nations, oui, tous, Reposent avec honneur, chacun dans son tombeau. Mais toi, tu as été jeté loin de ton sépulcre, Comme un rameau qu’on dédaigne, Comme une dépouille de gens tués à coups d’épée, Et précipités sur les pierres d’une fosse, Comme un cadavre foulé aux pieds. » (Is 14:4-19). On voit dans cette prophétie que Dieu donne à Isaïe contre le roi de Babylone, qu’à partir d’un moment il ne parle plus du roi de Babylone. Il parle de la créature spirituelle qui anime le roi de Babylone et à qui Dieu s’adresse également. On comprend bien qu’il s’agit du Diable en personne. Coupable d’avoir caressé les 5 désirs suivants : vouloir monter au ciel : être au sommet du monde céleste, élever son trône au-dessus des étoiles de Dieu signifie avoir le pouvoir, l’autorité sur toutes les créatures spirituelles. Souvenez vous que dans la Bible, les corps célestes sont des représentations de créatures spirituelles. Je m’assiérai sur la montagne de l’assemblée peut se comprendre comme dominer le « conseil divin » dont j’ai parlé précédemment. Je serai semblable au très haut ne me semble pas demander d’explication complémentaire. C’est le rendu latin de cette prophétie d’Isaïe qui retrace la chute de l’ange rebelle qui a popularisé le mot « Lucifer ». Le verset 14:12 est rendu ainsi par Saint Jérôme dans sa sublime Vulgate : « Quomodo cecidisti de caelo, Lucifer, qui mane oriebaris? corruisti in terram, qui vulnerabas gentes? » « Te voilà tombé du ciel, Astre brillant, fils de l’aurore! Tu es abattu à terre, Toi, le vainqueur des nations! ». Lucifer rend donc ici « astre brillant ». Lucifer rend l’hébreu Heilel הֵילֵל qui signfie « brillant ». Le grec de la LXX est plus disert : Ἑωσφόρος pour Ἑως aube et φόρος porteur, le porteur d’aube littéralement. Du point de vue astronomique, c’est de la planète Vénus dont il est question ici. Conclusion que l’on peut tirer : nous ne connaissons pas le nom de cet ange rebelle.

Le Diable dans la prophétie d'Ezechiel

Passons à la prophétie d’Ezechiel, qui est assez proche mais qui mérite d’être lue : « La parole de l’Éternel me fut adressée, en ces mots: Fils de l’homme, Prononce une complainte sur le roi de Tyr! Tu lui diras: Ainsi parle le Seigneur, l’Éternel: Tu mettais le sceau à la perfection, Tu étais plein de sagesse, parfait en beauté. Tu étais en Éden, le jardin de Dieu; Tu étais couvert de toute espèce de pierres précieuses, De sardoine, de topaze, de diamant, De chrysolithe, d’onyx, de jaspe, De saphir, d’escarboucle, d’émeraude, et d’or; Tes tambourins et tes flûtes étaient à ton service, Préparés pour le jour où tu fus créé. Tu étais un chérubin protecteur, aux ailes déployées; Je t’avais placé et tu étais sur la sainte montagne de Dieu; Tu marchais au milieu des pierres étincelantes. Tu as été intègre dans tes voies, Depuis le jour où tu fus créé Jusqu’à celui où l’iniquité a été trouvée chez toi. Par la grandeur de ton commerce Tu as été rempli de violence, et tu as péché; Je te précipite de la montagne de Dieu, Et je te fais disparaître, chérubin protecteur, Du milieu des pierres étincelantes. Ton cœur s’est élevé à cause de ta beauté, Tu as corrompu ta sagesse par ton éclat; Je te jette par terre, Je te livre en spectacle aux rois. Par la multitude de tes iniquités, Par l’injustice de ton commerce, Tu as profané tes sanctuaires; Je fais sortir du milieu de toi un feu qui te dévore, Je te réduis en cendre sur la terre, Aux yeux de tous ceux qui te regardent. Tous ceux qui te connaissent parmi les peuples Sont dans la stupeur à cause de toi; Tu es réduit au néant, tu ne seras plus à jamais! » (Ez 28 :11-19)

Ici, on retrouve quelque chose de très proche de la prophétie d’Isaïe. Elle est censée s’adresser à un roi, le roi de Tyre, mais son contenu ne peut pas concerner entièrement le roi de Tyre. Ce pauvre roi de Tyre n’a jamais été en Eden. Donc à nouveau, le prophète s’adresse à la puissance spirituelle qui anime le roi de Tyre. Et il s’agit donc de l’ange rebelle. Il y a un avant et un après pour cet ange. Un avant glorieux et un après de rébellion. Cette prophétie introduit néanmoins une énigme par rapport à ce que nous avons identifié jusqu’ici sur cette entité spirituelle devenue rebelle. Jusqu’ici il nous semblait clair qu’il s’agissait d’un Séraphin, et maintenant nous voici avec une prophétie déclarant qu’il s’agit d’un Chérubin. Alors, comment démêler ceci ? Tout d’abord l’expression « chérubin protecteur » devrait se traduire par « chérubin ordonné », « chérubin choisi ». Le terme hébreu est mimsa’h, qui partage la racine avec Messie. L’ange qui est devenu le Diable avait donc un statut tout à fait particulier. Ce n’était pas un chérubin ordinaire, si tant est que l’on puisse dire que les chérubins sont ordinaires ; Il semble que l’on doit voir de la part de l’Ecriture non pas une hésitation sur le statut du Diable avant sa rébellion, mais des informations convergentes. De plus il semble qu’il ne faille pas prendre de façon trop rigoureuse les notions de rangs angéliques comme des natures angéliques différentes, indiquant qu’un ange de tel ordre ne pourrait pas être ensuite de tel autre rang. Saint Denys l’Aréopagite explique dans son ouvrage « la hiérarchie céleste » que signifie ces 9 ordres d’anges : « Selon moi, la hiérarchie est à la fois ordre, science et action, se conformant, autant que faire se peut, aux attributs divins, et reproduisant par ses splendeurs originelles comme une expression des choses qui sont en Dieu. Or, la beauté incréée, parce qu’elle est simple, bonne et principe de perfection, est pure aussi de tout vil alliage ; toutefois, et selon les dispositions personnelles de chacun, elle communique aux hommes sa lumière, et par un mystère divin, les refait au modèle de sa souveraine et immuable perfection. Le but de la hiérarchie est donc d’assimiler et d’unir à Dieu, qu’elle adore comme maître et guide de sa science et des fonctions saintes. » (La hiérarchie céleste chap 3).

Je me base également sur ce passage très éclairant de Saint Denys dans la hiérarchie céleste, où il explique pourquoi c’est un Séraphin, donc ange le plus éloigné du matériel et du terrestre qui est venu purifier les lèvres d’Isaïe, et non pas un ange plus bas dans cette hiérarchie et donc plus proche de nous : « l’Ecriture n’indiquerait pas qu’une intelligence du premier ordre fut descendue pour purifier Isaïe, mais seulement qu’un des anges qui président à notre hiérarchie reçut, en ce cas, la dénomination de séraphin, précisément en raison de la fonction qu’il venait de remplir, et parce qu’il devait enlever par le feu l’iniquité du prophète, et ressusciter dans son âme purifiée le courage d’une sainte obéissance. Ainsi nos oracles parleraient ici, non pas de l’un des séraphins qui entourent le trône de Dieu, mais l’une de ces vertus purifiantes qui sont immédiatement au-dessus de nous ». (Hiérarchie céleste ch 13). Si je paraphrase l’évêque de Paris, ce n’est pas un séraphin, mais un ange avec fonction de séraphin qui a purifié Isaïe. Donc, l’Ecriture peut appeler un ange selon son rang, où selon son rôle. Il semble donc raisonnable de penser que le Diable est donc un séraphin avec un rôle de chérubin, ce que tendrait à confirmer la précision faite par Ezekiel : « chérubin choisi ».

Le Diable dans le livre de Job

Passons à la première partie du livre de Job. Le dialogue entre Dieu et Satan est bien connu. Mais il faut entrer dans les détails pour voir qui est le Diable. Tout d’abord, nous apprenons que chaque action humaine est comme « enregistrée ». On rendra compte de chacune d’entre elle à la fin de notre vie. Cette perspective est assez effrayante, il faut bien l’admettre. Et il semble que justement Satan soit charger de s’occuper, tout ou partie de ceci. Et Dieu de demander à Satan s’il a bien vu toutes les actions de Job, qui semblent sans égal aux yeux de Dieu. Et Satan répond ainsi à Dieu, si on paraphrase : tu te trompes sur Job. Tu ne le connais pas comme moi je le connais. Job t’abuse. Mais si tu lui fais du mal, tu verras que j’ai raison… Satan, si vous me permettez cette métaphore, est comme un employé qui challenge son employeur sur la conduite de son entreprise et qui veut agir sur un domaine qui ne relève pas de sa compétence. Si l’on rapporte à ça au niveau du conseil divin, une question est maintenant ouverte à l’intérieur de cette instance. Dieu pourrait anéantir Satan, mais il choisit de répondre à la question. Job va servir à Dieu à démentir Satan. D’un point de vue eschatologique, Job est l’acte d’accusation de Dieu contre Satan.

Terminons avec une description de ce que Satan et ses démons font dans le monde. Comment ils agissent et comment nous pouvons répondre. Suivant Saint Pierre, être bien conscient de la situation : « il tourne autour de vous comme un lion rugissant, cherchant qui il pourra dévorer » (I Pi VIII 5) . Macaire Boulgakov catégorise ainsi ses actions : tromper ceux qui n’ont pas la parole divine, faire douter ceux qui l’ont et enfin poursuivre les hommes de calamités dans les limites définies par Dieu. L’action du Diable depuis la chute est directement sur l’âme. Macaire le grand enseigne ainsi cette terrible vérité : « Dès que le mal fut entré sur la terre par le péché, il (le Diable) eut libre accès dans l’âme pour s’entretenir journellement avec elle, comme un homme fait avec un autre homme, et lui faire des propositions insensées ». A nous qui cherchons parfois le repos, le Pape Léon rappelle « il épie les habitudes de chacun ; il observe ses penchants ; il étudie ses passions, et attaque les côtés où il découvre le moins d’obstacles » (sermon sur la nativité du Seigneur VII 3). A noter que la notion d’ange gardien qui viendrait nous protéger de cela est une opinion théologique, et non pas un dogme de foi orthodoxe. Cette opinion était défendue par Origène et par Grégoire de Nysse, et décrite dans le Pasteur d’Hermas en ces termes : « deux anges sont placés auprès de l’homme, l’un bon, l’autre mauvais ». Il convient en tout de tempérer ce tableau plutôt sombre avec les notions suivantes : l’empire du mal est restreint sur terre. Tout d’abord, après leur révolte, les anges furent chassés en enfer. Ce jugement néanmoins n’est pas définitif et le sera après le jour du Seigneur, le jugement dernier. A ce moment-là, chaque ange rebelle, chaque démon sera jugé. Saint Antoine le Grand enseigne que plus ils se permettent des offenses aujourd’hui envers Dieu et les hommes, plus leur châtiment infernal sera terrible. Car bien évidemment, les peines infernales ne se valent pas. La justice de Dieu est infiniment juste. Seconde restriction, et de taille : Dieu combat inlassablement Satan et son empire sur la terre. Il a déjà détruit en partie le royaume des esprits malins sur terre. Le Christ est très clairement venu pour détruire les œuvres du Diable, comme le dit St Jean dans son épître. Ceux qui étaient devenus enfants du Diable et de la colère ont retrouvé la capacité de redevenir enfants de Dieu. Troisième restriction : nous pouvons agir de façon efficace contre l’influence de Satan en nous et dans le monde. Nous avons reçu l’enseignement pour cela. Cette académie militaire, si vous me permettez cette métaphore, c’est l’Eglise bien évidemment. Nos armes sont le jeûne, la prière, la vigilance spirituelle. Le Nom de Jésus est également très puissant : « jusqu’à ce jour les démons tremblent au nom du Christ ; la puissance de ce saint nom n’a même pas été affaiblie par nos iniquités » (Grégoire le Théologien, sermon III). Saint Jean Chrysostome enseigne que le signe de croix « épouvante le Diable et ses démons à la vue de l’arme dont se servit le Christ pour tuer leur puissance et trancher la tête du serpent ». Quatrième restriction : jamais Dieu ne permet une épreuve qui soit au-delà de nos forces. Ainsi, à chaque vicissitude de l’existence, nous devons essayer de nous souvenir que c’est quelque chose que Dieu a jugé surmontable. Les épreuves par lesquelles le Diable veut nous perdre, Dieu les transforme en quelque chose qui nous renforce. Saint Basile rappelle que « Dieu se sert de la méchanceté du Diable pour l’instruction de nos âmes, de même qu’un médecin emploie, comme moyen de guérison, le poison de la vipère » (Sermon sur l’origine du mal).



Exégèse du Psaume 82/83

Avant de conclure je voudrais revenir sur une notion assez complexe, celle du terme Elohim / Theos qui amène bien des confusions dans la lecture de la Bible, et les idioties universitaires et académiques actuelles n’aident pas vraiment à éclairer les choses. Le problème avec les Pères est qu’ils ne prennent pas la peine d’expliquer des choses qui leur semblent élémentaires et nous nous retrouvons quelque peu démunis face au texte. Heureusement la LXX enlève la majorité des ambiguïtés, en remplaçant la plupart du temps le terme Elohim par ce qu’il convient de comprendre dans le passage. Il me semble que le comble de l’ambiguïté est dans le psaume 82/83. Avant d’en faire ici une exégèse, tout à fait en rapport puisqu’il s’agit d’une condamnation des démons, il faut revoir quelques concepts.

Les Anges sont décrits dans le biblique selon leur nature, leur statut et leur fonction. La description de la nature est d’être des esprits. Le terme hébreu que l’on attribue souvent exclusivement à tort à l’Esprit Saint est Rua’h qui signifie Esprit. Les anges sont des Rua’h, pneuma en grec. Prenons le passage suivant : « Et Michée dit: Écoute donc la parole de l’Éternel! J’ai vu l’Éternel assis sur son trône, et toute l’armée des cieux se tenant auprès de lui, à sa droite et à sa gauche. Et l’Éternel dit: Qui séduira Achab, pour qu’il monte à Ramoth en Galaad et qu’il y périsse? Ils répondirent l’un d’une manière, l’autre d’une autre. Et un esprit (un rua’h) vint se présenter devant l’Éternel, et dit: Moi, je le séduirai. L’Éternel lui dit: Comment? Je sortirai, répondit-il, et je serai un esprit de mensonge dans la bouche de tous ses prophètes. L’Éternel dit: Tu le séduiras, et tu en viendras à bout; sors, et fais ainsi! Et maintenant, voici, l’Éternel a mis un esprit de mensonge dans la bouche de tous tes prophètes qui sont là. Et l’Éternel a prononcé du mal contre toi. » (1 Ro 22 :19-23). L’armée des cieux reprend ce concept de conseil divin. On voit bien ici Dieu qui trône dans son conseil, composé d’esprits avec une autonomie de décision mais dans l’obéissance.

Deuxième terme qui décrit leur nature : cieux. Shamayim en hébreu, ουρανοι en grec. J’imagine à quel point ce terme est inattendu pour vous. Mais prenons le psaume 88/89 et laissons le psalmiste nous dire les choses : « Les cieux célèbrent tes merveilles, ô Éternel! Et ta fidélité dans l’assemblée des saints. Car qui, dans le ciel, peut se comparer à l’Éternel? Qui est semblable à toi parmi les fils de Dieu? Dieu est terrible dans la grande assemblée des saints, Il est redoutable pour tous ceux qui l’entourent. » (ps 89:6-8) tiré de l’hébreu. Cessons un moment de voir de la poésie et regardons la littéralité. Job 15 :15-16 « Si Dieu n’a pas confiance en ses saints, Si les cieux ne sont pas purs devant lui, Combien moins l’être abominable et pervers, L’homme qui boit l’iniquité comme l’eau! » confirme cette vision des cieux étant des êtres célestes. Très proche des cieux : les étoiles. Que ce soit au septième jour de la création, ou dans Jérémie 8 :2, les anges sont des étoiles dans les cieux : « On les étendra devant le soleil, devant la lune, et devant toute l’armée des cieux, qu’ils ont aimés, qu’ils ont servis, qu’ils ont suivis, qu’ils ont recherchés, et devant lesquels ils se sont prosternés; » (Jer 8 :2). Job 38 :5-7 devient plus clair ainsi : « Qui en a fixé les dimensions, le sais-tu? Ou qui a étendu sur elle le cordeau? Sur quoi ses bases sont-elles appuyées? Ou qui en a posé la pierre angulaire, Alors que les étoiles du matin éclataient en chants d’allégresse, Et que tous les fils de Dieu poussaient des cris de joie? ». Et dernier terme pour la nature angélique : Elohim. Ce terme est un véritable piège dans la Bible. Comme je le disais précédemment, il veut parfois dire Dieu, mais pas tout le temps. Prenons Ju 11 :24 « Ce que ton dieu Kemosch te donne à posséder, ne le posséderais-tu pas? Et tout ce que l’Éternel, notre Dieu, a mis en notre possession devant nous, nous ne le posséderions pas! ». Ce que l’hébreu écrit ici c’est « Ce que Kemosch ton Elohé te donne à posséder, ne le posséderais-tu pas? Et tout ce que YHWH, notre Elohé, a mis en notre possession devant nous, nous ne le posséderions pas! ». Pour bien comprendre ici la dynamique, il faut se souvenir que Elohim ne signifie pas Dieu. En tout cas pas uniquement. Le meilleur exemple possible me semble être ce passage dans le premier livre de Samuel : « Lorsque la femme vit Samuel, elle poussa un grand cri, et elle dit à Saül: Pourquoi m’as-tu trompée? Tu es Saül! Le roi lui dit: Ne crains rien; mais que vois-tu? La femme dit à Saül: je vois un dieu qui monte de la terre. Il lui dit: Quelle figure a-t-il? Et elle répondit: C’est un vieillard qui monte et il est enveloppé d’un manteau. Saül comprit que c’était Samuel, et il s’inclina le visage contre terre et se prosterna. » (1 Sm 28 :12-14). Elle voit un Elohim. Ainsi on peut lire différemment Dt 32 :17 « Ils ont sacrifié à des démons qui ne sont pas Dieu (Eloha), A des dieux (Elohim) qu’ils ne connaissaient point, Nouveaux, venus depuis peu, Et que vos pères n’avaient pas craints. ». Le seul moyen de voir quelque chose de cohérent dans tout ceci est de comprendre que Elohim est le terme pour la nature spirituelle. Il peut donc parfois vouloir parler de la nature angélique sans que cela ne soit systématique. Ainsi dans Gn 1:1, le Elohim ne fait pas référence au conseil divin et à tous les anges.

Les termes relatifs au statut des anges sont souvent du type assemblée, conseil, assemblée, cour. Et enfin les termes de fonction sont « Ange » qui signifie « messager », « veilleur » (dans le livre de Daniel), « chérubin », « séraphin ». Il est donc incorrect de considérer que les chérubins sont des anges, car du point de vue de la fonction cela relève d’une confusion. Mais l’utilisation du terme Ange est devenu trop générique et liée aussi à la nature pour que cette phrase soit considérée incorrecte du point de vue théologique. Fort de toutes ces notions passons au psaume 81/82 : « Psaume d’Asaph. Dieu se tient dans l’assemblée de Dieu; Il juge au milieu des dieux. Jusques à quand jugerez-vous avec iniquité, Et aurez-vous égard à la personne des méchants? Rendez justice au faible et à l’orphelin, Faites droit au malheureux et au pauvre, Sauvez le misérable et l’indigent, Délivrez-les de la main des méchants. Ils n’ont ni savoir ni intelligence, Ils marchent dans les ténèbres; Tous les fondements de la terre sont ébranlés. J’avais dit: Vous êtes des dieux, Vous êtes tous des fils du Très Haut. Cependant vous mourrez comme des hommes, Vous tomberez comme un prince quelconque. Lève-toi, ô Dieu, juge la terre! Car toutes les nations t’appartiennent. » Remplaçons les termes ambigus par leur origine dans l’hébreu et voyons la cohérence du grec « Psaume d’Asaph. Elohim (Theos) se tient dans l’assemblée (sunagogué) de El (thewv); Il juge au milieu des Elohim (theous). Jusques à quand jugerez-vous avec iniquité, Et aurez-vous égard à la personne des méchants? Rendez justice au faible et à l’orphelin, Faites droit au malheureux et au pauvre, Sauvez le misérable et l’indigent, Délivrez-les de la main des méchants. Ils n’ont ni savoir ni intelligence, Ils marchent dans les ténèbres; Tous les fondements de la terre sont ébranlés. J’avais dit: Vous êtes des Elohim (theoi), Vous êtes tous des fils (uioi) du Très Haut (upsitos (le plus haut)). Cependant vous mourrez comme des hommes, Vous tomberez comme un prince quelconque. Lève-toi, ô Elohim (theos), juge la terre! Car toutes les nations t’appartiennent. ». Quel est le contexte. Dieu a confié à des anges le fait le gouvernement des nations (voir Dt 32 :8-9) comme je l’ai expliqué plus haut. Et ces anges appointés à cette tâche ont failli. Ils ont créé des cultes idolâtres dont ils sont les dieux, plutôt que de faire régner la paix et la justice. Ils ont choisi la même voie de rébellion que le premier Elohim rebelle, le Diabolos, le Satan. Par rapport à cela, Dieu, dans une assemblée du conseil divin exprime sa colère et sa déception et annonce un châtiment eschatologique. Les anges en question seront déchu de leur nature angélique et connaîtront la mort qui frappe l’humanité depuis la faute d’Adam et Eve. Le dernier verset est à comprendre au sens où Asaph reprend la parole et exprime son impatience quant à ce châtiment. Il raconte une assemblée du conseil divin, exprime ce que Dieu a exprimé et ensuite parle à nouveau. Le scénario le plus probable est que la séquence suivante s’est produite : l’humanité s’est rebellée à Babel et Dieu a donc créé les nations et les a séparé linguistiquement. Chapitre 11 de la Gn. En Dt on voit qu’il attribue à chaque nation un ange pendant que lui se réserve Israël. Dans ce psaume on voit la rébellion des anges assignés à cette tâche et la condamnation qui en résulte.

Le Diable comme revisitation du monothéisme

Donc vous voyez le propos du biblique n’est pas de dire que les autres dieux n’existent pas. Mais il s’agit bien d’un monothéisme, car tous les dieux de tous les cultes, sont des fraudes : ce sont des anges qui ont choisi la rébellion, à l’imitation du Diable premier rebelle d’entre tous. Il s’agit bien monothéisme, car entre le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, ineffable Trinité de personnes et des anges rebelles singeant sa majesté, il n’y a pas de comparaison. Dans tous les Elohim, il en est un à nul autre pareil. Ceci nous appelle à revoir intégralement notre monothéisme et notre vision de l’histoire. Les prêtres de Zeus, d’Osiris ou de Toutatis, les prêtres de Shiva, ou de je ne sais quelle autre entité ne parlent pas ou ne parlaient pas dans le vide. Ils avaient des contacts et étaient au service de démons. Le Diable est la réponse biblique à toutes les constructions intellectuelles pour répondre au problème du mal et de la théodicée : humanisme, existentialisme, dualisme, athéisme, tous les ismes que vous voulez. Toutes ces visions ne peuvent pas répondre au problème parce qu’elles n’ont pas les bonnes informations. Tout est venu à cause de cet ange. Aucune ne peut apporter de solution, puisqu’il n’y en a qu’une : le Christ.

Conclusion

Voilà pour cet enseignement. Nous espérons que vous avez appris des choses. Nous espérons que vous avez maintenant une vision plus précise et plus orthodoxe du diable et de ses ages. Ce n’est pas un petit sujet, et il méritait à lui seul une étude dédiée. Il y a aura encore à dire sur les démons, sur les néphilims, les géants, etc un peu plus tard au chapitre 6. Dans la prochaine étude nous reprendrons notre analyse habituelle, verset par verset et essaieront d’expliquer au mieux la faute, pourquoi la faute et la notion capitale de péché originel. Le Diable et ses mauvais anges nous livrent une guerre impitoyable. Cette guerre ne peut pas se mener en dehors de l’Eglise. Bienvenue dans les catacombes.