Saint Timothée

Tropaire ton 4 : “Maître en douceur, sobre en tout et comme prêtre revêtu de noble conscience, tu as puisé au Vase d’élection les ineffables vérités; tu as gardé la foi et comme lui mené ta course à bonne fin; saint apôtre Timothée, prie le Christ notre Dieu de sauver nos âmes.”

Saint Timothée nous est principalement connu par les lettres que Paul lui a adressées, et qui sont conservées dans le NT. Il apparaît également dans le livre des Actes des Apôtres. La tradition de l’Eglise a consigné davantage de choses dans nos synaxaires. Nous savons que son père était païen et sa mère juive. Elle s’appelait Eunice, et il est fort possible qu’elle ait été parente avec de Saint Paul, ce qui fait que Paul et Timothée avait peut-être des liens de sang. La famille de Timothée résidait en Lycaonie, une région orientale de l’actuelle Turquie, probablement dans la ville principale : Lystres, ville plusieurs fois visitée par Saint Paul d’après les Ecritures. Eunice était convertie au christianisme et avait transmis cette foi et vision du monde à son fils. Paul, constatant son tempérament et ses capacités le choisit pour l’accompagner dans ses voyages missionnaires dans la région. Il choisit de le faire circoncire.

Ce choix est très intéressant théologiquement. Sa mère, prenant acte du dépassement de la loi de Moïse après la Résurrection du Seigneur, ne l’avait pas circoncire. Quand nous sommes baptisés, le Christ prend notre place et nous transmet son observance parfaite. Ainsi, le Christ circoncis était suffisant pour observer la circoncision pour le jeune juif Timothée. Mais Paul, fin connaisseur des faiblesses humaines, choisit de faire circoncire Timothée. Cela n’est plus nécessaire, mais pour les interlocuteurs limités et pas aussi connaisseurs de la théologie que Paul, ceci n’est pas forcément connu et assimilé. Ainsi, la circoncision de Timothée est à voir sous l’angle de la facilité pastorale auprès du public juif que Paul va rencontrer dans la région, comme l’explique Saint Jean Chrysostome dans ses commentaires. Ce n’est donc pas pour sauver Timothée que Paul le circoncit, mais plutôt pour sauver les juifs de la région. Un synaxaire occidental précise de très jolie façon : « il commença par le circoncire : les cérémonies de l’ancienne loi n’obligeaient plus, depuis la loi nouvelle publiée par Jésus-Christ, mais il était pourtant permis de les observer comme une chose indifférente jusqu’à la ruine de Jérusalem et du Temple : par là, disent les anciens Pères, on enterrait la synagogue avec honneur ».

Timothée accepte donc une cérémonie très douloureuse, non obligatoire, de partir avec Paul pour une vie de pauvreté, une vie dangereuse, loin de sa famille. Cela vous donne une première idée du personnage. Lorsque Paul écrit aux Philippiens « J’espère dans le Seigneur Jésus vous envoyer bientôt Timothée, afin d’être encouragé moi-même en apprenant ce qui vous concerne. Car je n’ai personne ici qui partage mes sentiments, pour prendre sincèrement à cœur votre situation; » (Phi 2 :19-20) on voit toute l’estime qu’il avait pour Timothée. Il le lui dira d’ailleurs dans sa première épitre « Pour toi, homme de Dieu, fuis ces choses, et recherche la justice, la piété, la foi, la charité, la patience, la douceur. » (1 Tm 6 :11). Être appelé « homme de Dieu » par Saint Paul, ce n’est pas rien. Timothée, fait partie des compagnons de route de Paul, avec Silas et Barnabé. Il est cité dans l’entête de la première épître aux Thessaloniciens, et au total dans six lettres de Saint Paul. Compagnon de confiance, c’est lui qui est chargé par Paul d’aller redresser les corinthiens, en proie à des déviations de foi et de comportement : « Si Timothée arrive, faites en sorte qu’il soit sans crainte parmi vous, car il travaille comme moi à l’œuvre du Seigneur. » (1 Co 16 :10). Nous n’avons pas tous les détails de la vie de Timothée malheureusement, mais l’on peut faire certaines déductions évidentes. De cette phrase de Paul « Sachez que notre frère Timothée a été relâché; s’il vient bientôt, j’irai vous voir avec lui. » (Heb 13:23) l’on peut déduire qu’il a connu aussi la prison et l’enfermement pour sa foi. De cette autre phrase « Ne néglige pas le don qui est en toi, et qui t’a été donné par prophétie avec l’imposition des mains de l’assemblée des anciens. » nous en déduisons le plus logiquement qu’il a été fait évêque. Les spécialistes disent que la date la plus probable de son sacre épiscopal fut l’an 64. Nous n’allons pas discuter de cela. Saint Jean Chrysostome rapporte qu’il fut élevé à l’épiscopat pour la ville d’Ephèse, avec donc pouvoir d’ordonner des prêtres, des diacres et de participer au sacre d’évêques. Le patriarche de Constantinople précise qu’il était à Ephèse avant que Saint Jean ne vienne, que Saint Jean ne vint pas à Ephèse comme évêque mais comme apôtre, et qu’il exerça donc une autorité bien supérieure à celle de Timothée, qui était néanmoins considéré comme une sorte de métropolite, car il était le premier évêque de toute la partie asiatique.

Timothée, à l’exemple de Saint Jean, menait une vie très ascétique. Les gens se souviennent de façon anecdotique qu’il ne buvait que de l’eau. Saint Paul lui ordonna donc de boire un peu de vin, car son ascèse finissait par mettre sa santé en danger. Il fallait que la chair soit assez forte pour servir l’esprit et demeure assez faible pour que l’esprit poursuive sa domination. D’où le « un peu » paulinien. La mention de Saint Paul était aussi pastorale, car les gens, par imitation, essayaient souvent de prendre leurs pasteurs comme modèles.



La deuxième épitre à Timothée est très émouvante lorsque l’on connaît les circonstances. Il semble que Saint Paul l’ait écrite en prison, à Rome, avant son exécution. Il s’agit un peu du testament d’un père spirituel à son disciple, peu avant la mort. Saint Paul n’aura écrit que des belles choses sur et à Timothée. Saint Jean a peut-être été plus exigeant avec Timothée. Dans son apocalypse, il est écrit « Écris à l’ange de l’Église d’Éphèse: Voici ce que dit celui qui tient les sept étoiles dans sa main droite, celui qui marche au milieu des sept chandeliers d’or: Je connais tes œuvres, ton travail, et ta persévérance. Je sais que tu ne peux supporter les méchants; que tu as éprouvé ceux qui se disent apôtres et qui ne le sont pas, et que tu les as trouvés menteurs; que tu as de la persévérance, que tu as souffert à cause de mon nom, et que tu ne t’es point lassé. Mais ce que j’ai contre toi, c’est que tu as abandonné ton premier amour. Souviens-toi donc d’où tu es tombé, repens-toi, et pratique tes premières œuvres; sinon, je viendrai à toi, et j’ôterai ton chandelier de sa place, à moins que tu ne te repentes. Tu as pourtant ceci, c’est que tu hais les œuvres des Nicolaïtes, œuvres que je hais aussi. Que celui qui a des oreilles entende ce que l’Esprit dit aux Églises: A celui qui vaincra je donnerai à manger de l’arbre de vie, qui est dans le paradis de Dieu. » (Apo 2 :1-7). Il se peut que l’ange de l’Eglise d’Ephèse soit Timothée. Le message est globalement très positif et on voit qu’il est encouragé dans sa haine de l’hérésie et dans sa haine des actions des hérétiques. Mais Saint Jean lui reproche, si c’est bien à lui qu’il s’adresse, d’aimer avec moins d’intensité qu’auparavant.

Il eut néanmoins l’occasion de prouver son amour à Dieu d’une façon qui enlève toute équivoque. Les païens marchaient dans une procession dédiée aux idoles. Timothée essaya de leur faire entendre raison quant à la vérité de Dieu et au salut, mais ils accueillirent ceci en le frappant à mort à coup de pierres et de massue. Il expira quelques heures après ce quasi lynchage public. Saint Jean l’évangéliste sacra Jean 1er pour lui succéder, et Onésime, le fameux esclave de l’épitre à Philémon sera par la suite, le troisième évêque d’Ephèse.

Pour terminer, puisque Saint Jean Chrysostome nous apprend que les reliques de Saint Timothée était miraculeuses, il convient d’en dire quelques mots. Sous Constance, un des fils et successeurs de Constantin le grand, les reliques de Timothée sont ramenées à Constantinople en 356. Avec les reliques de Saint Luc et de Saint André, il est mis sous l’autel de l’église des apôtres. Saint Jérôme témoigne que les démons poussaient des hurlements tant la présence des saints était manifeste pendant la translation entre Ephèse et Constantinople. L’occident le fête le 26 janvier, et l’Orient le 22.